Les programmes d’externat en soins infirmiers amputés par les coupes en santé

MONTRÉAL — Les programmes d’externat pour les étudiantes en soins infirmiers, qui permettent aux futures infirmières de pratiquer certaines activités, sont amputés par les compressions dans le réseau de la santé. La FIQ et l’OIIQ demandent au gouvernement Legault de donner une directive claire pour rétablir rapidement l’accès aux externats partout en province.

La Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), qui compte plus de 80 000 membres infirmières, infirmières auxiliaires, inhalothérapeutes et perfusionnistes cliniques, dénonce dans un communiqué diffusé lundi les coupes en santé qui touchent les stages offerts aux étudiantes en soins infirmiers dans le cadre des programmes d’externat.

En entrevue avec La Presse Canadienne vendredi dernier, le président de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ), Luc Mathieu, a décrit la situation.

«Les étudiantes qui font leurs formations collégiales — après deux ans, et celles qui font leur formation à l’université, après une année — elles peuvent nous demander, à l’Ordre, d’avoir le statut d’externe. Ça les autorise à exercer certaines activités des infirmières. Pas complètement, puisqu’elles sont en apprentissage, mais pendant les périodes d’été par exemple, et jusqu’à tout récemment même, pendant toute l’année. Elles peuvent donner un coup de main aux équipes de soins. Mais là, avec la coupure de 1,5 milliard $ que Santé Québec est en train de faire à la demande du gouvernement, il y a plusieurs établissements qui ont décidé de couper dans ces postes», explique M. Mathieu.

Il y voit une incohérence avec le souhait du gouvernement d’améliorer l’accès aux soins. «Ce n’est pas une bonne idée, commente-t-il. C’est une solution d’aujourd’hui pour générer les problèmes de demain.»

M. Mathieu est d’avis que cela représente un frein pour préparer les jeunes infirmières à entrer dans la profession. Il explique que ces stages aident à la réussite des étudiantes lors de leur examen d’admission à la profession d’infirmière et, par la suite, à mieux s’intégrer dans leur milieu professionnel. Il déplore que Santé Québec agisse dans «une logique budgétaire à court terme».

«On cherche des sous, et je comprends que le réseau est sous pression, mais là, ce n’est pas une bonne décision économique parce que d’investir dans les jeunes, dans la future relève, c’est un investissement, fait valoir le président de l’OIIQ. Parce qu’on les prépare mieux et on le sait par des témoignages qu’avoir le statut d’externe, ça contribue, c’est un facteur de rétention.»

Contrecoups pour les vacances d’été

La FIQ abonde dans le même sens en soulignant que cela nuit à la formation des infirmières, à leur intégration dans le réseau et à la rétention de personnel. La fédération soutient que la décision a déjà été appliquée par plusieurs CISSS et CIUSSS.

«Le gouvernement et beaucoup d’établissements nous ont annoncé dans les dernières semaines couper ce programme. C’est de la relève qu’on va perdre cet été, ce sont des bras, des gens qui normalement viennent nous aider dans le réseau de la santé l’été, et ça va être extrêmement difficile», prévient le vice-président à la FIQ, Jérôme Rousseau.

Il a aussi fait valoir que les stages dans le milieu de la santé sont rarement rémunérés. «À moyen terme, c’est un très mauvais signal en termes d’attraction et de rétention, a-t-il dit en entrevue. On manque déjà beaucoup de personnel, d’infirmières, de professionnels en soins dans le réseau de la santé. C’est un élément de plus qui fait que ça va être difficile dans les prochaines années si on continue dans cette voie de couper l’externat.»

De plus, le réseau de la santé est en «mode rattrapage», ce qui fait en sorte que les établissements tentent d’offrir plus de soins et services pour venir à bout des listes d’attente, notamment en chirurgie. «C’est clair qu’il va y avoir des impacts si on empêche les externes de venir travailler, parce que ce sont des vacances qu’on ne sera pas en mesure de donner, explique M. Rousseau. Ça va être des gens qui vont manquer dans les équipes de soins, donc, ça va générer soit des manques de services ou, ultimement, ça va causer du temps supplémentaire obligatoire dans les équipes qui sont déjà en place.»

Le vice-président de la FIQ indique aussi que certains établissements comptaient sur cette relève pour la période estivale. «On ne peut pas se permettre dans le réseau de la santé d’empêcher des externes de venir travailler, parce qu’on en a besoin. Il y a même des équipes qui les attendaient pour pouvoir les intégrer dans leur équipe de travail pour être en mesure de prendre des vacances cet été», mentionne-t-il.

La FIQ et l’OIIQ exhortent le gouvernement à récupérer des sommes ailleurs.

Le contenu en santé de La Presse Canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est l’unique responsable des choix éditoriaux.