Fiasco SAAQclic: l’ex-PDG Denis Marsolais dit avoir informé le gouvernement

QUÉBEC — L’ancien président-directeur général de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ), Denis Marsolais, a informé le gouvernement Legault des dépassements de coûts dans le dossier SAAQclic.
C’est ce qu’il a admis mercredi à la commission Gallant chargée de faire la lumière sur les problèmes liés à la modernisation des systèmes informatiques de la SAAQ.
Le 8 juin 2022, M. Marsolais rencontre, avec trois de ses vice-présidents, l’attaché politique du ministre des Transports, Alain Généreux, au siège social de la SAAQ afin de lui faire un état de la situation.
La SAAQ à ce moment-là sait qu’il lui manque 222 millions $ pour livrer la phase 2 de son projet numérique. Pourtant, ce chiffre n’apparaît nulle part dans la présentation faite par les v-p à M. Généreux.
Selon son témoignage, M. Marsolais réalise pendant la rencontre «qu’il y a quelque chose qui cloche» et que la SAAQ est en train d’induire le gouvernement en erreur.
Le document qui est présenté indique que les négociations contractuelles en cours avec les fournisseurs seront «sans impact» sur le budget. «Ce n’était pas tout à fait exact», se souvient-il.
Il attend à la fin de la réunion pour prendre Alain Généreux à part et l’informer qu’il y aura un dépassement de coût de 222 millions $. «Je lui ai dit textuellement. Je lui ai dit: “Je vais toujours te donner l’heure juste”.»
«Il n’y a pas de têtes qui ont roulé? C’est majeur, ça!» s’est alors exclamé le commissaire Denis Gallant, soulignant que ce que les v-p de la SAAQ avaient présenté à M. Généreux était carrément «faux».
Même s’ils cachaient de l’information, aucun de ces employés n’a perdu son emploi, a confirmé M. Marsolais.
«Est-ce que vous considérez que vous avez informé le gouvernement du dépassement de coût? Ils étaient conscients qu’il allait y avoir un dépassement de coût?» lui a demandé la procureure Mélanie Tremblay.
«J’ai informé l’attaché politique responsable du dossier du ministre des Transports sur le dépassement de coût, le gouvernement, indirectement», a répondu l’ex-PDG.
Le virage numérique raté de la SAAQ devrait coûter aux contribuables au bas mot 1,1 milliard $ d’ici 2027, soit 500 millions $ de plus que prévu, selon les calculs du Vérificateur général du Québec.
Le chien de garde a également souligné dans son rapport qu’en 2022, en pleine campagne électorale, la SAAQ a morcelé l’avenant de 222 millions $ afin qu’il passe sous le radar.
Denis Marsolais a quitté au printemps 2023 suite à la débâcle. Celui qui est aujourd’hui président de l’Office de la protection du consommateur nie avoir été limogé par le gouvernement.
En début de témoignage mercredi, il a confié avoir accepté le poste de PDG de la SAAQ, à la demande du gouvernement Legault, à contrecœur. «Je n’avais aucun intérêt», a-t-il avoué candidement.
À son arrivée, il ne prend pas connaissance de l’important contrat qui lie la SAAQ aux firmes LGS-SAP, mais sait qu’on a arrêté d’inclure dans le calcul les coûts d’exploitation.
Il a particulièrement confiance en son vice-président des technologies d’information, Karl Malenfant, un homme «fort intelligent» qui «connaît bien son dossier» et est parfaitement «structuré».
Devant la commission, M. Marsolais s’est défendu d’avoir été naïf. «Ce n’est pas ma naïveté qui m’a piloté là-dedans», a-t-il déclaré, assurant «au contraire» avoir toujours été en mode «alerte».
Il a juré avoir surveillé le processus de vérification externe, appuyé sa division de vérification interne et obtenu des conseils juridiques afin de valider certains éléments en lien avec le projet numérique.
M. Marsolais a entamé son témoignage mercredi matin, au moment même où l’Unité permanente anticorruption (UPAC) menait une perquisition au siège social de la SAAQ.