Des groupes appellent à combattre les surdoses plutôt qu’à combattre les drogues

MONTRÉAL — Des organismes d’aide aux personnes qui consomment des drogues se sont unis, d’un bout à l’autre du Canada, pour appeler les gouvernements à mettre fin à leur guerre contre la drogue pour se consacrer plutôt à prévenir les surdoses.

À l’occasion de la Journée nationale d’action contre les surdoses, le 6 avril, l’Association canadienne des personnes qui utilisent des drogues (ACPUD) au Canada et l’Association québécoise pour la promotion de la santé des personnes utilisatrices de drogues (AQPSUD) ont tenu une conférence de presse conjointe pour réclamer la décriminalisation de la consommation de drogues et la mise en place de structures d’approvisionnement sécuritaires.

Pour ces organismes communautaires qui viennent en aide chaque jour à des personnes victimes de surdoses, c’est la prohibition qui est à la source du problème.

On demande aux autorités de faire face au problème dans une perspective de santé publique en misant d’une part sur un approvisionnement sécuritaire pour les consommateurs et parallèlement sur un meilleur accès aux ressources d’aide pour les personnes qui souhaitent cesser de consommer. 

«Scientifiquement, la réduction des méfaits a fait ses preuves tandis que la guerre à la drogue nous a prouvé son inefficacité», peut-on lire dans le communiqué transmis pour l’occasion.

Selon le milieu communautaire, on compterait environ 20 morts par surdose chaque jour au Canada. Les différents porte-parole ayant participé à la sortie publique ont tous rapporté une hausse continuelle des décès sur leur territoire au cours des dernières années. 

Au Québec, l’Institut national de santé publique a recensé 541 décès «reliés à une intoxication suspectée» aux drogues entre janvier et décembre 2022.

«Je n’ai plus de mots pour décrire ce sentiment qui nous habite depuis les sept dernières années. Il s’agit désormais de la nouvelle normalité. Apprendre un décès. Réanimer quelqu’un. Toujours avoir sa naloxone sur soi», a partagé le directeur général de CACTUS Montréal, Jean-François Mary.

Les organismes dénoncent un manque de financement de leurs activités alors qu’ils se disent les véritables ressources de première ligne pour venir en aide aux personnes qui consomment des drogues, et non le réseau de la santé et des services sociaux.

«L’inflation ne touche pas les subventions, de toute évidence», ironise M. Mary en mentionnant que son financement a été ramené au niveau de 2018. Par conséquent, Montréal va perdre des travailleurs de rue, des infirmières et autres services alors que la crise des surdoses s’envenime.

À ce sujet, le directeur général à l’Association québécoise des centres d’intervention en dépendance (AQCID), Vincent Marcoux, explique que le communautaire fournit 90 % des services, mais ne reçoit que 35 % du budget alloué par le gouvernement du Québec à la prévention des surdoses.

«L’argent ne descend jamais jusqu’aux organismes communautaires», observe-t-il.

Du côté de l’Association des intervenants en dépendance du Québec (AIDQ), la directrice générale Sandhia Vadlamudy soutient qu’une véritable volonté des gouvernements «d’accentuer l’offre de soins et de services en réduction des méfaits pourrait être un levier très important» pour améliorer le funeste bilan.

Elle suggère surtout aux autorités de cesser de judiciariser inutilement les consommateurs en réservant les ressources juridiques pour les cas qui constituent une réelle menace à la sécurité publique.

En plus de la conférence de presse, les organismes ont prévu des manifestations un peu partout au pays, dont des marches à Montréal et à Sherbrooke. 

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