Raymond Gravel : une sentinelle

Après un parcours singulier pour arriver à la vie presbytérale, Raymond est arrivé à la vie éternelle encore par un parcours singulier. Ce ne fut pas là le choix de sa raison, mais de sa conscience. C’est elle, qui éclairée avant tout par la Bible dont il avait une solide connaissance, lui a servi de guide et de force dans tous ses combats.

N’en déplaise à ses farouches détracteurs, ces mots du pape François s’appliquent particulièrement à lui. «Tout être humain, dit-il, possède sa propre vision du bien, mais aussi du mal. Notre tâche est de l’inciter à suivre la voie tracée par ce qu’il estime le bien.» François sous-entend que l’on n’a pas à le juger. Contrairement à cette femme qui me disait : «Je ne prie pas pour la guérison de l’abbé Gravel, mais pour sa conversion».

Mais Raymond préférerait que l’on parle moins de lui que des questions posées à l’Église, comme la sentinelle pose des questions à la nuit quand elle se prolonge. Car pour lui, le discours de l’Église était souvent d’un autre âge ou, en tout cas, pas à l’âge de l’éternel Évangile. Il a demandé au Magistère s’il était encore évangélique en tenant un discours exclusif et non pas inclusif. On est femme avortée? Exclue de l’Église. Couple homosexuel? Exclu de la table eucharistique et de toute bénédiction de l’Église. Femme? Exclue du sacerdoce. Laïc? Exclu des instances décisionnelles. D’une autre théologie que la sienne? Exclu des Conseils d’Église. Prêtre-député? Exclu du ministère paroissial. Marié civilement? Exclu de toute célébration en Église.

Heureusement que Raymond a entendu, avec le pape François, un discours crédible quand le Magistère parle des choses humaines, une parole dans laquelle les gens se reconnaissent. Une parole franche, directe, audacieuse, celle que toute sa vie Raymond a pratiquée.

Raymond a pris avec sérénité le dernier droit de son parcours singulier. Et après avoir dit des centaines de fois : «Viens Seigneur Jésus!» (Apocalypse 22, 20), il entend maintenant le Seigneur lui dire à son tour : «Viens Raymond Gravel!»

Gérard Marier

Victoriaville