Une nouvelle et des nouvelles de Chantal Garand

Originaire de la région, Chantal Garand, qui habite la Norvège depuis une vingtaine d’années, est de passage à Victoriaville. Elle est de retour au pays pour participer aux trois lancements d’un recueil de nouvelles auquel elle contribue et qui s’intitule « Hors de soi ».

Rencontrée dans un café, Chantal était bien heureuse d’être de retour chez elle, dans ses racines. En effet, elle profite de son séjour afin de rencontrer sa famille et ses amis. Elle ira aussi à Montréal, Québec et Gatineau pour présenter la nouvelle qu’elle a écrite pour le recueil, publié chez Tête Première, et qui porte le titre de « Résonnances ».

Après avoir écrit « Natalia Z » en 2018 et gagné le Prix du récit Radio-Canada en 2015 avec « Un hibou, un Égyptien et l’étrangère », l’auteure s’est lancée dans ce projet littéraire qui utilise le réalisme magique, un genre avec lequel elle n’était pas très familière. « Je n’ai pas dit oui tout de suite », confie-t-elle. Mais après avoir lu un peu dans ce style, elle a décidé d’embarquer et, au final, elle a eu beaucoup de plaisir à cette écriture qui la sort de sa zone de confort.

« Ç’a été le fun à écrire même si c’était un peu déstabilisant », a-t-elle annoncé. Elle a profité de cette nouvelle pour parler de travail social, dans lequel elle a œuvré de nombreuses années en Norvège avant sa retraite. « Je voulais parler de mon travail avec l’immigration et mes désillusions », note-t-elle. Et comme Chantal, la narratrice du texte quitte son milieu (pas pour les mêmes raisons tout de même). Son texte débute d’ailleurs par la phrase suivante : « J’ai quitté mon village il y a vingt ans. »

Elle a également voulu toucher, dans son écrit, l’exploitation massive du saumon, une réalité de plus en plus présente dans son pays scandinave dont on entend peu parler de ce côté-ci du globe. « J’en ai profité pour régler quelques comptes », dit-elle en souriant. Sa nouvelle a en effet quelques côtés plus sombres, mais porte tout de même une belle lumière.

Ce travail littéraire lui a permis de se mettre en déséquilibre, ce qu’elle a fait à plusieurs reprises au cours de sa vie. 

En visite

Chantal explique qu’elle revient régulièrement à Victoriaville, d’une à trois fois par année, où habitent toujours un frère et une sœur. « Mes racines sont ici, mais je ne reviendrais pas vivre au Québec », mentionne-t-elle. En effet, c’est du côté de la Norvège qu’elle a fait sa vie avec son mari, Fridtjov, ses garçons et ses petits-enfants.

Il faut dire qu’elle s’est fait une belle vie dans son village norvégien, Engelsviken, à une heure de la capitale, Oslo. Elle habite à la campagne, à trois minutes de la mer et aux abords de la forêt où elle se promène souvent. « C’est devenu mon chez-moi depuis la naissance de ma petite-fille qui a maintenant 14 ans », fait-elle savoir. Cela ne l’empêche pas d’être toujours attachée à la région, elle qui est native de Saint-Valère, où elle va encore au cimetière rendre visite aux défunts de sa famille à chaque séjour.

Parlant de famille, Chantal mijote un prochain livre, en collaboration avec son frère Dominique qui est professeur de littérature à Montréal. « Nous écrivons un livre sur notre première mère, qui est morte quand j’avais 4 ans », indique-t-elle. 

L’histoire d’une épouse, d’une mère de neuf enfants, morte trop jeune d’un cancer. « Mes parents s’aimaient follement », résume-t-elle. Et lorsqu’elle est décédée, tous les enfants, sans en parler, ont mis leur deuil de côté au profit de celui de leur père. « J’ai écrit un texte à ce sujet il y a quelques années et ça a fait boom », se souvient-elle. Tous les enfants avaient mis de côté leurs souvenirs et ce n’est que 50 ans plus tard qu’ils se sont mis à en parler.

« Mon père s’est remarié deux ans et demi plus tard », précise-t-elle en ajoutant qu’alors leur première mère est devenue comme un mythe, une icône parfaite. « Nous avons décidé de la démystifier dans ce livre qui paraîtra en 2024 ». Pour l’instant, le roman biographique porte le titre de travail « Neuf mémoires de Marguerite », mais il devrait être modifié. Les coauteurs ont choisi d’élever le propos afin de toucher davantage de gens en décrivant, en plus de cette femme mémorable pour eux, une époque aussi.

D’autres écrits

Outre cela, Chantal a l’intention, à la suite de sa nouvelle « Résonnances », d’aller plus loin dans l’histoire et d’en faire tout un roman. Elle a déjà trouvé plusieurs façons d’aller plus loin dans ce récit. Ce projet est actuellement en développement.

Si Chantal a eu une vie bien remplie, de rencontres et de voyages, celle de sa famille mérite aussi qu’on s’y attarde. D’ailleurs, elle a dans ses tiroirs un manuscrit racontant la vie trop courte de son oncle décédé pendant la guerre. Il s’agit en fait, comme elle l’explique, de raconter la vie de son fils, dans la soixantaine, ce cousin qu’elle n’est pas parvenue à retracer et qui ne parvient pas à régler son passé. « Ce livre, il fallait que je l’écrive, mais il n’est pas prêt à être publié », dit-elle. Et il y a aussi sa palpitante histoire d’amour avec son mari qui mériterait d’être écrite…

Ainsi pour Chantal Garand l’écriture est un moyen privilégié d’expression. « Elle me permet d’évacuer quelque chose et fait que je vais plus loin dans mes pensées. Ça m’oblige à trouver les mots et à fouiller », apprécie-t-elle.