Stéphan Émond, l’homme aux deux chapeaux

Les astres se sont alignés, si on peut dire, pour Stéphan Émond qui, peu après sa nomination, en septembre, comme directeur général de la Municipalité de Saint-Samuel, a été promu directeur du Service de sécurité incendie de la Régie intermunicipale de sécurité incendie de Bulstrode. Rencontre avec un homme au parcours singulier.

On ne s’étonne guère de voir Stéphan Émond, un Sherbrookois d’origine, occuper des postes de direction. « Je suis gestionnaire, depuis une vingtaine d’années, dans le domaine du transport. J’ai travaillé pour des compagnies comme Purolator et FedEx », raconte-t-il. Ce qu’il y a de particulier, en fait, c’est qu’il est devenu pompier sur le tard, il y a huit ans, presque à la mi-quarantaine. « Quand j’étais jeune, comme bien des petits gars, je rêvais de devenir pompier, mais la vie m’a amené ailleurs », souligne-t-il.

Malgré les années qui passent, le rêve n’est jamais bien loin. Alors qu’il travaillait chez Purolator à Victoriaville, Stéphan Émond discute avec un client qui, un jour, s’excuse de devoir quitter après avoir reçu un message sur son téléavertisseur. « Le lendemain, il m’apprend qu’il est pompier à Victoriaville, se souvient-il. Je lui mentionne que c’était un de mes rêves, mais que c’était plutôt difficile vu mon âge. Il rétorque qu’il n’est pas trop tard et il m’informe de l’existence d’une école à Victo, le centre régional de formation des pompiers qui forme des pompiers le soir et les week-ends. »

Intrigué, Stéphan Émond profite d’une journée portes ouvertes à la caserne de Victoriaville pour s’informer. Tellement motivé, il s’inscrit à la formation « pompier 1 » sans même, au préalable, avoir été embauché par un service de sécurité incendie et paie personnellement les coûts. « C’est assez spécial de retourner, à l’âge de 43 ou 44 ans, sur les bancs d’école pour une formation de plus de 300 heures », note-t-il.

Le nouveau directeur du Service de sécurité incendie n’a que de bons mots pour le centre qui l’a formé et pour les instructeurs. « C’est génial, c’est vraiment une bonne école avec de bonnes installations. On y envoie d’ailleurs tout notre personnel pour recevoir la formation », souligne-t-il.

Les cours suivis à Victoriaville, une ville qu’il a habitée pendant sept ans, ont plus que confirmé son désir d’exercer le métier de pompier. « La flamme y était toujours, mais la formation l’a rallumée encore plus », exprime Stéphan Émond. L’homme a toujours été naturellement porté vers les gens. « J’ai toujours été quelqu’un qui aimait aider les gens. J’ai fait beaucoup de route pour mon travail. J’en ai vu des scènes d’accident. J’ai le réflexe d’aller aider. C’est plus fort que moi », confie-t-il.

De pompier à directeur

Au cours de sa formation à Victoriaville, les instructeurs de Stéphan Émond lui font savoir qu’on recherche des pompiers à Sainte-Eulalie. « Comme j’habitais à la limite de Victoriaville et de Saint-Valère (territoire que dessert la Régie de Bulstrode), je me disais que j’avais peut-être des chances qu’on m’engage, vu que je n’étais pas si loin. Et c’est ce qui est arrivé. J’ai notamment rencontré Sylvain Beaumier (l’ex-directeur) et on m’a embauché. » Stéphan Émond a en mémoire sa toute première intervention, un feu de cheminée chez un ancien pompier. Rien de dramatique. Mais rapidement, il sera confronté à deux interventions majeures, deux accidents routiers dans des circonstances éprouvantes avec décès. « Ça a été un bon test à savoir si j’étais fait ou non pour ce métier », signale-t-il.

Intervenir en désincarcération n’est pas chose évidente. « Quand on recrute, c’est un aspect que l’on regarde avec les gens. On est conscient que, d’une fois à l’autre, on ne réagira pas de la même façon. Cela dépend de plusieurs facteurs, explique-t-il. Et dans de petites municipalités comme la nôtre, tu peux tomber sur quelqu’un que tu connais. Ce sont des défis supplémentaires pour nos équipes. » Ses débuts comme pompier n’ont finalement fait que confirmer sa passion. « Dès le départ, je me suis impliqué dans tout ce que je pouvais, dès qu’il y avait une activité, j’y étais. J’ai pris goût à m’impliquer dans le service », relate-t-il.

Petit à petit, Stéphan Émond a gravi les échelons. Après quatre années comme pompier, on le nomme lieutenant. « Ça venait encore chercher l’élément de gestion que j’aime. C’était mon travail de tous les jours. Cela combinait en quelque sorte mes deux passions », observe-t-il. Il en a même combiné une troisième, celle de la course automobile. Stéphan Émond a entrepris des démarches et a réussi à se faire embaucher comme pompier au grand prix de formule 1 de Montréal. À ce jour, il a pris part à trois grands prix. Même chose aussi du côté du grand prix de Trois-Rivières.

En devenant lieutenant à la Régie intermunicipale de sécurité incendie de Bulstrode, celui qui habite Sainte-Eulalie depuis près de six ans maintenant a multiplié ses implications, notamment en gestion. « J’ai pris la responsabilité des pratiques, entre autres, élaboré un programme d’entraînement pour les pompiers, quelque chose de dynamique pour les intéresser et les garder allumés. Il faut trouver une façon de faire différente pour garder les gens motivés », indique le directeur, citant en exemple, il y a deux ans, une importante pratique de désincarcération impliquant aussi deux autres services de sécurité incendie.

Son grade de lieutenant, Stéphan Émond l’a conservé durant quatre ans, jusqu’à sa nomination comme capitaine en août dernier. « Le but,  c’était de créer une relève pour Sylvain (Beaumier), pour le libérer un peu, lui donner du temps, lui qui n’a pratiquement jamais pris de vacances et qui manquait très peu d’interventions », expose-t-il. Finalement, la retraite du directeur Beaumier survenue plus rapidement que prévue a fait en sorte qu’en septembre, la Régie de Bulstrode confiait à Stéphan Émond la direction du service de sécurité incendie. « J’aime m’impliquer, rappelle-t-il. On est dans un domaine qui exige de l’engagement. Il faut que tu aies ça dans le sang. Et la gestion, c’est plus fort que moi. C’est probablement mon côté gestionnaire qui s’est manifesté là-dedans de vouloir m’impliquer dans la gestion du service d’incendie. »

Sa vision 

Questionné sur sa vision entourant le service de sécurité incendie, Stéphan Émond insiste sur le grand défi que représentent le recrutement et la rétention de la main-d’œuvre. « On veut susciter l’implication chez nos pompiers, créer un sentiment d’appartenance, fait-il savoir. On est en train d’élaborer une structure. On a procédé à la nomination de lieutenants où chacun aura son équipe pour miser sur le développement de nos gens. Tant pour nos pompiers que pour nos lieutenants, on souhaite les préparer pour un poste plus haut dans la hiérarchie. On mise vraiment sur le développement de nos gens pour les motiver et les garder. »

Le nouveau directeur entend aussi continuer à bâtir sur ce qui a été fait dans le passé. « On n’est pas un gros service, mais on est bien équipé. On veut continuer à développer notre service, car on sait qu’il y aura de gros changements dans les prochaines années. Et on a la chance de faire partie d’une régie, permettant de répartir les coûts entre les quatre municipalités. Cela nous aide à nous projeter dans l’avenir », fait-il valoir. La Régie de Bulstrode regroupe les municipalités de Sainte-Eulalie, Aston-Jonction, Saint-Samuel et Saint-Valère.

En moyenne, le service de sécurité incendie répond à 90 appels par année, incluant les demandes d’entraide sur les territoires de Daveluyville, Saint-Wenceslas et Saint-Léonard-d’Aston. La brigade incendie peut actuellement compter sur 18 pompiers. « On vient d’en embaucher trois nouveaux et on a une autre entrevue dans les prochaines semaines. On travaille vraiment fort pour le recrutement, assure le directeur Émond. Si, par le passé, c’était des périodes occasionnelles de recrutement, maintenant on recrute à l’année. »

Il rappelle que le travail de pompier exige beaucoup de disponibilité et d’engagement. Au-delà des appels d’intervention, il y a les pratiques mensuelles, les activités de prévention, les inspections hebdomadaires des véhicules. « On participe aussi à de plus en plus d’activités communautaires, comme l’Halloween, par exemple. Cela procure une visibilité et aide au recrutement. »

DG à Saint-Samuel

Sa nomination à titre de directeur général de la Municipalité de Saint-Samuel a permis à Stéphan Émond de quitter le poste qu’il occupait chez FedEx à Québec et d’accepter la direction du service de sécurité incendie. « En travaillant à Québec, il m’aurait été difficile d’occuper le poste de directeur du service de sécurité incendie. Mais une belle opportunité s’est présentée à Saint-Samuel, ce qui me permet de combiner les deux postes », conclut Stéphan Émond, heureux.