Homicide involontaire : l’accusé témoigne pour sa défense
« Ce n’était pas voulu. J’avais zéro intention que ça se passe de même, ni même le blesser », a exprimé, avec émotion, Dominic Bernaquez-Lachance lorsque son avocat Me Guy Boisvert, en fin d’interrogatoire, l’a invité s’il le souhaitait à s’adresser au juge Simon Ricard de la Cour du Québec.
L’homme, âgé de 39 ans, de Notre-Dame-de-Lourdes témoignait pour sa défense, mardi après-midi, au palais de justice de Victoriaville. Il fait face à une accusation d’homicide involontaire en lien avec la mort de David Murray, 33 ans, survenue en mai 2022.
Opérateur de machinerie lourde, l’accusé connaissait peu David Murray, l’ami de cœur de sa belle-sœur Catherine Lavoie, l’ayant rencontré trois fois. « Ça avait l’air de quelqu’un de bien correct. Ça avait l’air d’une bonne personne », a-t-il dit.
Le jour du drame, le 28 mai 2022, les deux hommes avaient passé l’après-midi à s’adonner au tir récréatif. Puis les deux couples avec les enfants s’étaient rassemblés pour le souper.
Vers 19 h 30, relate l’accusé, Catherine est retournée seule dans son logement. Son copain David, lui, ira la rejoindre environ une heure plus tard.
Dominic Bernaquez-Lachance et sa blonde Isabelle Lavoie réintègrent alors le logement d’Isabelle. Quand celle-ci ira au lit, Dominic, lui, consultera son téléphone pour y lire des articles.
Après un premier appel reçu vers 23 h sur le téléphone du logement, un deuxième appel survient très peu de temps après. L’accusé décide de répondre cette fois. Il entend la voix paniquée de Catherine qui réclame son aide, elle qui habite dans le même immeuble à l’étage. « En sortant de l’appartement, j’ai entendu un cri de Catherine, un cri de détresse, un cri de mort, dira-t-il plus tard en contre-interrogatoire. Ça m’a fait un boule en dedans. »
Dominic Bernaquez-Lachance dit s’être précipité en courant dans les escaliers pour aller à la rescousse de sa belle-sœur. Il a raconté ensuite ce qu’il a vécu en entrant dans l’appartement. « J’ai vu David, enragé, arriver sur moi les bras dans les airs dans l’intention de me pogner. Je voyais sur son visage qu’il n’avait pas l’air là. Il était enragé. Je lui demandais ce qui se passait en lui disant d’arrêter. Je ne comprenais rien, je ne comprenais pas. »
L’accusé explique ensuite comment, instinctivement, il a réussi à le maîtriser. La lutte, estime-t-il, a duré environ une minute ou deux minutes maximum. « J’étais à bout d’énergie. C’est très exigeant, très demandant, a-t-il confié. J’en étais rendu à me dire : je le lâche ou je le serre. J’ai décidé de serrer et de le mordre en même temps (dans le dos). C’est alors qu’on est tombé au sol. J’ai cessé de serrer. David était endormi. Tout était beau. »
Dominic Bernaquez-Lachance a toujours maintenu sa position. Ils ont convenu d’alerter la police. « Durant l’appel au 9-1-1, j’étais calme, il respirait. Je pensais que tout allait bien. Jamais dans ma tête je ne pensais que j’allais faire du mal. Jamais je n’ai pensé que je pouvais le blesser dans la position que j’étais », a-t-il affirmé.
S’il a toujours maintenu sa position, a-t-il soutenu, c’était pour éviter que David se relève. « Je suis demeuré en position défensive, sécuritaire. J’étais en position de protection. J’avais peur qu’il puisse se relever et attaquer de nouveau. »
Tout se passait bien, selon lui, puisqu’il l’entendait respirer. Tout semblait bien aller jusqu’à l’arrivée des policiers, moment où Dominic Bernaquez-Lachance s’est rapidement relevé. Ce n’était plus son combat, a-t-il noté.
Mais quand un policier a placé David Murray en position latérale de sécurité, un sentiment de panique a envahi l’accusé lorsqu’il a aperçu le visage bleu. « J’ai vu que ça n’allait pas si bien. Je me suis dit que j’étais dans la marde, que ma vie était finie. »
En contre-interrogatoire, Me Michel Verville de la poursuite a notamment relevé que l’accusé empruntait, pour la première fois, un terme comme enragé pour qualifier David Murray.
Première fois aussi où il aurait entendu sa belle-sœur crier « Arrête David » sans compter qu’il s’est souvenu de la façon dont il a maîtrisé son « adversaire ».
À cela, l’accusé a répondu que deux ans et demi plus tard, il a eu amplement le temps de réfléchir et de refaire le fil des événements.
Questionné sur la maîtrise de l’individu, Dominic Bernaquez-Lachance a indiqué n’avoir jamais pensé à poser d’autres gestes. « Dans une telle situation, tu es pris dans la peur. Je trouvais que la situation était sous contrôle. Je n’ai pas pensé à d’autres solutions. Mon cerveau s’est arrêté à ça », a-t-il fait savoir, ajoutant aussi que dans la position qu’il avait adoptée, il n’a jamais vu le visage de celui qu’il retenait. « J’avais une prise relaxe et je l’entendais respirer. »
Jusqu’à l’arrivée des policiers, a-t-il signalé, la respiration n’a pas changé de façon drastique pour qu’il s’en rende compte.
Après l’audition de l’accusé, Me Guy Boisvert a fait savoir qu’il n’avait pas d’autre témoin et déclarait sa preuve close.
Vers 15 h 30, le juge Simon Richard de la Cour du Québec a accepté d’ajourner le procès jusqu’à jeudi matin pour permettre aux deux parties de préparer leurs plaidoiries.
Au total, le ministère public a fait entendre sept témoins, en plus de faire entendre des documents audio (les appels au 9-1-1 et à la SQ), de même que l’interrogatoire vidéo de l’accusé.