Se relever d’un choc traumatique, c’est possible
VICTORIAVILLE. Le drame survenu dimanche soir dernier à Saint-Albert ayant entraîné la mort d’un petit garçon a bouleversé grand nombre de personnes… Beaucoup se demandent ce qu’il faut faire en de tels cas, comment, entre autres, on peut être utile, attentif à la famille éprouvée.
Au CLSC Suzor-Coté, la psychologue Johanne Beaumont et le coordonnateur des services en santé mentale adulte Martin Dumont acceptent l’entrevue sans toutefois vouloir commenter le cas particulier de l’accident survenu à Saint-Albert.
L’un et l’autre rappellent que l’aide existe pour des gens en détresse, que des intervenants sociaux peuvent se déplacer à la suite d’un appel au 8-1-1, peu importe le jour ou l’heure. Mais ils ne s’imposent jamais dans un milieu.
«On ne voudrait surtout pas envahir les gens. Il faut se montrer soucieux de leur rythme, respecter les gens dans leur douleur», dit M. Dumont.
Même s’il est pénible de se rappeler un événement, soutient la psychologue, les séances de «verbalisation» sont indispensables. «Les membres d’une famille peuvent le faire entre eux. Cela leur permet de ventiler.»
Les réactions à la suite d’un choc traumatique peuvent être très différentes d’une personne à l’autre. «Le choc peut entraîner un évanouissement affectif. C’est une sorte de réflexe de protection. Certains voudront s’isoler. D’autres voudront, au plus vite, reprendre le travail, par exemple.»
La peine, la douleur, la souffrance pourront entraîner toutes sortes de phénomènes, comme l’insomnie, la perte d’appétit. «Toutes ces réactions sont normales», dit la psychologue.
On commencera à s’inquiéter lorsque persistent des comportements qui font qu’on ne reconnaît plus la personne. «Il faut être attentif à la durée et à l’intensité des troubles.»
Il n’y a pas de recette miracle pour traverser une expérience traumatique, conviennent les professionnels. Cela parce que trop de facteurs entrent en jeu, liés, entre autres, au tempérament des gens à qui cela arrive.
La psychologue se fait toutefois rassurante. «Entre 70% et 80% des gens auront à vivre un événement traumatique au cours de leur vie. Pour 1% à 14% de ces gens, le temps seul qui fait généralement un bon travail ne suffira pas à s’en remettre. Sans aide, ces gens risquent de développer des problèmes plus sévères.»
Mme Beaumont fait énormément confiance à la capacité de l’humain à se «réguler» lui-même. Elle donne l’exemple d’un avion volant dans une zone de turbulences. «On peut se fier sur soi pour se calmer et se dire que l’avion nous mènera à destination.»
Ces drames humains que sont le deuil d’un enfant, la perte d’un emploi, le diagnostic d’un cancer «nous obligent à nous revisiter, à prendre du recul, à revoir nos priorités, à nous construire une autre route», dit Martin Dumont. «Des gens se découvrent des parties d’eux-mêmes qu’ils ne se connaissaient pas.» On le voit chez les gens qui ont le cancer.
«Ce fut difficile, ça restera malheureux», finissent par se dire les gens qui ont «digéré et vu autrement» les événements traumatiques qu’ils ont vécus, soutient encore la psychologue.
Le plus difficile, admettent les professionnels, c’est de trouver un sens à ces tragédies qui bouleversent.
Ils concluent en disant que les victimes doivent pouvoir exprimer leur douleur et que les proches doivent faire preuve d’ouverture, de disponibilité et de présence, conseillent encore Mme Beaumont et M. Dumont.
Reste qu’il faut respecter le besoin qu’ont les gens affligés de vouloir se retirer, ce qui est légitime, soutiennent encore les gens du CLSC. Et que les proches attristés doivent aussi pouvoir exprimer leurs inquiétudes.