Sa mission, aider le peuple haïtien
Que ce soit avec l’AQANU, dont il assume la présidence, ou bien avec l’Internationale de l’Éducation (IE), une organisation syndicale, le Victoriavillois Reginald Sorel répond présent quand il est question d’Haïti. L’homme revient justement d’un séjour dans ce pays, son quatrième cette année.
Reginald Sorel y a séjourné du 18 au 25 octobre. Une halte en sol haïtien prévu bien avant Matthew, ce terrible ouragan qui a dévasté une partie du sud du pays. «Je m’y rendais pour l’Internationale de l’Éducation afin de travailler avec les organisations syndicales sur deux ou trois projets. J’en ai profité bien sûr pour rencontrer les partenaires de l’AQANU, voir leurs besoins et où on peut intervenir», explique-t-il en entrevue avec le www.lanouvelle.net.
Mais le récent ouragan a pris presque toute la place. «Les gens estiment que l’ouragan est pire que le séisme de 2010 pour ses effets à moyen et à long terme, des effets plus désastreux», note-t-il. Matthew, dans une vaste zone, souligne Reginald Sorel, a arraché des toits, détruit des maisons, des écoles, des dispensaires. Et plus encore. «L’ouragan a détruit le gagne-pain des paysans, les cultures et tué le bétail. Des chèvres et des cochons n’ont pas résisté aux vents.»
Les besoins sont immenses, a-t-il constaté. «En priorité, c’est la nourriture, l’eau et un toit pour les gens», dit-il. L’AQANU, indique son président, vient financer des projets que lui soumettent ses partenaires sur le terrain. «Dans la situation actuelle, l’AQANU financera, par exemple, les semences pour réhabiliter les terres détruites et pour réintroduire des animaux», souligne-t-il.
En matière d’éducation, on s’active sur le terrain à la reconstruction d’écoles. L’ouragan, aux dires de Reginald Sorel, a détruit plus de 500 écoles en plus d’en endommager une centaine d’autres. De grandes organisations financent la reconstruction des bâtiments. Les organisations syndicales, elles, voient plutôt à rendre disponible le matériel, les équipements. «Il faut faire en sorte que les enfants retournent à l’école où ils profitent d’un repas chaud par jour. Ils sont soulagés pour la nourriture et pour l’apprentissage», confie le Victoriavillois, ajoutant que la reconstruction des écoles se fait à bon rythme, car elles constituent aussi des bureaux de vote pour les élections à venir dans ce pays sans gouvernement, pour le moment.
Avec l’IE, Reginald Sorel travaille à différents projets : bibliothèque, centre de ressourcement pour les professeurs, école publique pour la formation des enseignants. «On a mis sur pied un projet-pilote sur trois ans afin de qualifier de 100 à 120 enseignants non qualifiés et déjà en poste», signale-t-il.
Campagne de financement
En entrevue, le président de l’AQANU se fait aussi le porte-parole du Groupe Solidarité Jeunesse puisque les deux organismes mènent, jusqu’au 6 novembre, une campagne de financement conjointe.
«L’argent amassé sera partagé entre les deux organisations pour répondre à des besoins immédiats», précise Reginald Sorel rappelant que Solidarité Jeunesse retournera bientôt en Haïti.
L’AQANU, pour sa part, doit concentrer ses efforts pour réapprovisionner les écoles, les dispensaires et l’achat de semences et de bétail. «On travaille avec des groupes de paysans qui nous font part de leurs besoins. Mais on ne peut répondre à toutes les demandes», fait remarquer Reginald Sorel.
L’homme constate aussi que, même si les gens de la région continuent de faire preuve de générosité, la réponse au Canada et au Québec envers Haïti n’est pas la même qu’à la suite du tremblement de terre de 2010.
Reginald Sorel ne cache pas le niveau de corruption en Haïti, certains détournements de l’aide internationale. Mais il rassure les Sylvifrancs. «Tout l’argent que nous recueillons sert à 100% sur le terrain, pas de frais d’administration. Et nous travaillons avec des partenaires de confiance que nous connaissons bien», insiste-t-il, ajoutant que les citoyens peuvent soutenir Haïti par des dons dans des boîtes à cet effet installées dans les édifices publics, les écoles, les bibliothèques et par le biais des sites Internet de l’AQANU et de Solidarité Jeunesse.
Résilients oui, mais…
On dit des Haïtiens qu’ils font preuve de résilience face aux épreuves auxquelles ils font face. C’est vrai. Mais un certain découragement se fait aussi sentir, perçoit Reginald Sorel. «Après le séisme de 2010, en plein milieu du désastre, on sentait l’urgence, mentionne Reginald qui y était cinq semaines après la violente secousse. Maintenant, on en parle de l’ouragan, mais on ne sent pas l’urgence.»
Vrai aussi que Port-au-Prince, où logeait le Victoriavillois, se situe à des centaines de kilomètres des zones affectées. Reste que la catastrophe les dépasse. «Il y a tant à faire. Même les organisations ne savent pas par où commencer. Oui, les Haïtiens sont résilients, mais ils se sentent dépassés», observe Reginald Sorel.
D’où l’importance de soutenir Haïti. «Je comprends la fatigue de certains d’entendre parler d’Haïti. Mais elle est vraie la misère des gens. On ne l’invente pas. Quand on travaille avec des organisations de base sur le terrain, on peut aider. C’est vrai qu’on ne peut tout changer, mais notre action aidera les gens à survivre. Ça, c’est clair!», conclut Reginald Sorel.
Témoin ou presque d’un meurtre
Au fil de ses séjours en sol haïtien, Reginald Sorel en a entendu des coups de feu régulièrement. Des tirs au loin ou, parfois, un peu plus près.
Cette fois-ci, installé dans le lobby de son hôtel, il a entendu deux coups de feu tout près. À peine 50 mètres environ. Assez pour que Reginald constate un certain énervement du personnel de l’hôtel. Lui aussi s’est approché et il a vu : un corps inerte au sol. «C’était un voleur abattu par un policier en civil», souligne Reginald étonné aussi par la suite des choses.
«Le cadavre est resté là au moins une heure. Des gens, des enfants, des voitures s’arrêtaient, puis repartaient. À un moment, un groupe de policiers, genre groupe tactique avec armes automatiques, s’est approché. Ils ont pris quelques photos et sont repartis», relate-t-il.
Ainsi, en cette période trouble dans ce pays sans gouvernement, avec une corruption bien présente, Haïti représente un pays plutôt insécure. «Il faut prendre des précautions. Il existe des zones où on ne doit pas aller, d’autres à éviter la nuit», indique Reginald Sorel qui évite, par exemple, de marcher dans la rue et d’utiliser les guichets automatiques. Il y a donc des choses à faire et à ne pas faire. Comme marcher seul en période d’obscurité, entre autres.