Rincon Latino, bien plus qu’un dépanneur

VICTORIAVILLE. Il n’y aurait ni la musique ambiante, ni l’accent latino qu’on aurait l’impression, à écouter Ramiro Ortiz Amariles que son commerce fait figure de «magasin général» pour la communauté latino de Victoriaville. Il y a la nourriture bien sûr. Mais surtout, il y a l’écoute, le service et la présence de M. Ortiz, né Colombien, Victoriavillois par choix.

On se trouve au Rincon Latino, le mot «rincon» signifiant «coin» en espagnol. Il décrit l’aire physique qu’occupe le commerce dans le «coin» de la Place Demers (dans le voisinage d’Escomptes Lecomte au centre-ville).

Et il fait référence à l’«espace» qu’il propose pour les services, les échanges et les conseils que peuvent y trouver les immigrants, nouveaux comme plus anciens.

Les «Latinos» fréquentent le dépanneur afin d’y dénicher les produits qu’ils ne trouveraient pas dans les supermarchés, d’y prendre un café, d’y jaser avec les membres de la famille de M. Ortiz, d’écouter un match de soccer à la télé «colombienne», de transférer de l’argent à un proche resté au pays (par Western Union ou Ria).

C’est une histoire de famille que celle de ce petit commerce, tous les membres y mettant la «main à la pâte», Diana Galeano Sierra, l’épouse de M. Ortiz, et leurs trois enfants.

Du réconfort au moins dans l’assiette

Le dépanneur est né d’un besoin.

Installé à Victoriaville depuis 2002, M. Ortiz sait à quel point il est difficile de s’adapter à la culture et à l’hiver québécois. Encore plus ardu d’intégrer la communauté si, en raison de la barrière de la langue, on n’accède pas un emploi.

Qu’au moins, un nouvel arrivant puisse retrouver, dans son assiette un peu de réconfort facilite les choses, explique-t-il.

Pendant quelques années, pour sa famille et ses amis, M. Ortiz se rendait à Montréal pour acheter les produits que l’on trouve traditionnellement dans la cuisine mexicaine, colombienne, guatémaltèque. «Tropicale» en fait, parce que, précise encore le commerçant, des gens d’origine africaine fréquentent sa boutique.

Sur les tablettes, on trouvera grande variété de boissons gazeuses, de tortillas, de sardines, de légumineuses, de riz, de yuka, des saucisses colombiennes, parfois même de bananes plantains. Le dépanneur n’offre à peu près que des produits qu’on ne dénicherait pas dans les supermarchés.

L’homme de 53 ans a un long parcours derrière lui… et l’habitude du public, alors qu’il était chauffeur de taxi dans son pays. Installé dans les Bois-Francs, il a travaillé pendant sept ans chez Olymel à Princeville, jusqu’à ce que la maladie le handicape. Il n’a pu, non plus, pratiquer le métier de soudeur auquel il s’était pourtant formé.

À des nouveaux arrivants qui lui demandent conseil, il recommande d’aller à l’école… «Parce qu’il faut faire quelque chose qu’on aime», dit-il.

Dans son petit commerce qu’il rêverait d’agrandir pour exploiter un restaurant, il sait qu’il propose des services utiles aux immigrants, qu’il recrée pour eux un espace réconfortant.

Québécois… bienvenus

Par vagues successives, Victoriaville a été une terre d’accueil pour grand nombre de réfugiés colombiens. Beaucoup en sont partis, M. Ortiz parlant de Victoriaville comme d’une «ville de transition». «Certains commencent à revenir…»

Sur la porte de son commerce, il a pris la peine d’inscrire un message de bienvenue aux Québécois, parce qu’il souhaite aussi favoriser les échanges interculturels autour de ses quelques tables. C’est un lieu où, évidemment, on pourra pratiquer son espagnol.

«Merci à Dieu!», s’exclame-t-il, ajoutant qu’il s’est toujours senti bien accueilli à

Victoriaville. Son épouse, préposée aux bénéficiaires, travaille à l’Hôtel-Dieu d’Arthabaska. La plus âgée de ses trois filles a, depuis longtemps, quitté la maison pour, entre autres, le faire grand-père deux fois.

Sur l’écran de sa tablette, il montre fièrement les photos de tout son monde, attire l’attention sur les graines de café en train de rougir à son caféier placé tout à côté d’un petit sapin de Noël.