Projet éolien : nombreuses furent les questions
Le projet d’aménagement possible de 67 éoliennes dans la MRC d’Arthabaska continue d’alimenter les passions et les discussions. À la Salle du Canton de Warwick, de nombreux citoyens, mardi soir, ont participé à la troisième séance d’information organisée par la MRC d’Arthabaska.
Une séance plus longue, un peu plus agitée qu’à Saint-Albert alors que certains ont à quelques reprises élevé la voix. Une séance de 2 h 30 au cours de laquelle, pendant près de 120 minutes, les citoyens ont pu prendre la parole, donner leur opinion et poser des questions. La mairesse suppléante de Warwick, Noëlla Comtois, a adressé un mot de bienvenue en invitant d’abord les gens à se lever et à se recueillir en guise de soutien pour le maire Pascal Lambert qui repose toujours dans un état critique à l’hôpital. « On a reçu beaucoup d’amour de la part des gens de Warwick, de la région aussi. Il reçoit une vague d’amour. J’espère qu’il va la ressentir et que ça l’aidera à reprendre la forme », a-t-elle exprimé.
Le représentant de la MRC d’Arthabaska et maire de Saint-Rosaire, Harold Poisson, et le préfet Christian Côté ont ensuite brièvement pris la parole avant de laisser le micro au directeur général de la MRC, Frédérick Michaud, qui, en une trentaine de minutes, a exposé le projet pour ensuite laisser place à la période de questions. Claude Desrochers, ex-maire de Warwick, a été le premier à s’approcher du micro. Comme producteur, a-t-il dit, il a été approché par Boralex, le promoteur du projet éolien, mais il a décliné l’offre pour des raisons qu’il n’a pas révélées.
Ses interrogations ont notamment porté sur des questions de déboisement, de distance et de bruit.
À la mairesse suppléante, il a demandé si la Ville s’engageait à informer les citoyens de la date des moments importants, comme ceux de la signature d’un registre ou de la tenue d’un référendum. Ce sera le cas, a répondu Noëlla Comtois. Un autre résident de Warwick, l’avocat Alain Pard, a reproché, de son côté, un manque d’information, disant souhaiter, comme le permet la technologie, pouvoir savoir à quoi ressemble visuellement le projet avec les éoliennes sur le territoire. « Ça m’aiderait beaucoup à faire un choix », a-t-il dit sous les applaudissements de plusieurs.
Par ailleurs, un tel projet mériterait, selon lui, que toute la population puisse se prononcer. Et dans le cas d’une approbation, les élus pourraient alors entreprendre les modifications de zonage nécessaire. La question à l’effet que le projet ne prévoit aucune éolienne à Kingsey Falls, alors que s’y trouve le siège social de Boralex, a été évoqué. Le préfet de la MRC et maire de la Municipalité, Christian Côté, y a répondu, expliquant l’impossibilité pour des raisons techniques. En fait, à la limite, Boralex pourrait y implanter une seule éolienne, ce qui est insuffisant pour assurer une rentabilité.
Un employé de Boralex et résident de Warwick a confirmé les propos du préfet. En cours de séance, certains se sont accrochés au micro, trop longtemps au goût de certains, comme une octogénaire qui, pendant de longues minutes, a raconté sa vie et ses voyages au grand dam de plusieurs qui réclamaient qu’elle laisse sa place ou qu’elle en vienne à poser une question. Exaspérés, des gens ont même quitté la salle. Il aura fallu qu’Harold Poisson intervienne pour que la dame accepte de se taire. « Félicitations pour vos beaux voyages », lui a dit M. Poisson.
Alors que dans sa présentation du projet, Frédérick Michaud faisait savoir, selon des études, que les éoliennes n’avaient aucun impact sur les valeurs foncières des propriétés et sur l’économie touristique, une résidente, pour sa part, a soutenu qu’à Sainte-Sophie-d’Halifax, des résidents mécontents ont décidé de s’en aller, n’en pouvant plus du bruit des éoliennes.
« Y a-t-il des études sur la faune et la flore? », a-t-elle questionné. Le promoteur Boralex, a-t-on dit, a entrepris une étude de caractérisation de la faune et de la flore, un exercice qui s’échelonne sur une année pour couvrir les quatre saisons. Un résident du rang 2, Joël Boivin, a, quant à lui, dénoncé la séance d’information qu’il a qualifiée de « pitch de vente » alors que les intervenants, selon lui, ne font état que des points positifs. « Vous parlez d’argent, mais non pas des effets négatifs sur l’environnement », a-t-il exprimé, tout en souhaitant une consultation publique neutre.
« L’argent mène le monde », a crié un homme au fond de la salle.
Il a aussi été question de redevances au cours des échanges, le préfet Christian Côté soulignant que, vent ou non, les redevances aux producteurs et aux municipalités étaient garanties. « Il s’agit de compensations fixes, profit ou non », a-t-il assuré. Certains, comme un agriculteur, y sont allés d’un cri du cœur, en quelque sorte, s’inquiétant des impacts sur les cultures, les érablières et des tensions parasites. « Pensez aux producteurs qui ont travaillé toute leur vie. Faites attention à être équitable », a-t-il signalé.
Par ailleurs, le temps presse pour les opposants au projet, a fait valoir une productrice Valérie Dumas, rappelant que les élus warwickois ont entrepris le processus pour modifier le zonage devant permettre les éoliennes. « Pour tous les citoyens dans les zones concernées, il est important de réaliser que c’est à nous de faire valoir nos droits, à nous de travailler pour montrer aux élus que notre qualité de vie vaut bien plus que de l’argent. À nous de se mobiliser et d’aller signer le registre en temps et lieu à la fin de juin pour s’opposer au projet », a-t-il mentionné. En cours de soirée, le directeur général de la Ville de Warwick, Matthieu Levasseur, a précisé que les personnes concernées allaient recevoir par la poste l’avis public à cet effet.
Un ex-vice-président de Cascades, qui a œuvré dans le domaine de l’énergie, a commenté le projet, soulevant le phénomène social relié aux éoliennes. « Il y a toujours un expert qui dit une chose et un autre qui affirme le contraire », a-t-il dit. Tout en remerciant les organisateurs de la réunion d’information, les citoyens, a-t-il constaté, souhaitent la tenue d’une consultation.
Il s’est questionné également à savoir si le jeu en valait la chandelle avec un projet de 1,2 milliard de dollars tandis que l’efficacité des éoliennes se situe à quelque 30%. « Ça veut dire que c’est un projet à 70% d’inefficacité », a-t-il noté. Les retombées, a relevé le DG de la MRC d’Arthabaska, tiennent compte de la période d’inefficacité des éoliennes.
Pour le citoyen, une étape importante n’a pas été réalisée : une meilleure gestion de la consommation dans la population. Frédérick Michaud reconnaît que les Québécois consomment beaucoup, qu’il manquera d’énergie dans les prochaines années. « Il y a un dialogue qui doit se faire au Québec. »
Tous ne sont assurément pas en désaccord avec le projet. C’est le cas du producteur warwickois Olivier Lavertu qui fait partie d’un groupe de 40 propriétaires en faveur des éoliennes. Mais pas à n’importe quelles conditions, a-t-il soutenu. « Nous ne sommes vraiment pas pressés de signer. Je ne signerai pas si je n’obtiens pas ce que je veux. Il y a des clauses auxquelles on tient », a-t-il affirmé.
En fin de rencontre, le préfet Christian Côté a estimé que les gens, finalement, ne sont pas nécessairement contre les éoliennes, mais leur emplacement pose problème. Il a plaidé en faveur de l’agriculture. « Oui, a-t-il confié en répondant à une question, un fonds agroenvironnemental pourrait être mis de l’avant, même si le projet éolien ne se réalisait pas. Dans la MRC, l’agriculture, c’est notre fierté. Un tel fonds, c’est pertinent et c’est un besoin. »