Octobre 70 sous l’angle de la jeunesse
Avec Chronique d’une insurrection appréhendée. Jeunesse et crise d’Octobre, Éric Bédard revisite cette période trouble de l’histoire du Québec à l’occasion de son 50e anniversaire. Dans son livre, l’historien examine la place de la jeunesse dans le discours et la pensée felquiste des années 1960, mais aussi la perception qu’en avaient les autorités.
«Cinquante ans ont passé et on a maintenant une distance pour bien analyser la Crise d’octobre. De plus, on a davantage accès aux archives. Mais il demeure que cela reste un événement «actif». Il a une charge et, comme Québécois, ils ne nous laissent pas indifférents. Octobre continue de nous diviser», précise d’entrée de jeu un Éric Bédard qui a fait le choix d’aborder ce pan de l’histoire du Québec dans une perspective universitaire.
«En tant que chercheur, à partir d’archives, j’ai décortiqué la réaction des autorités face à ce que je qualifie de «peur de la jeunesse». Une réaction qui s’inscrit dans la période turbulente de la fin des années 1960. En 1970, ne l’oublions pas, nous sommes deux ans après Mai 68 en France et quelques mois après les émeutes de la Kent University aux États-Unis. Cela explique en partie le recours à la Loi sur les mesures de guerre», avance-t-il.
«Évidemment, avec le recul, la réaction des gouvernements de l’époque avec la présence de l’armée dans les rues et les arrestations massives était démesurée». À ce sujet, dans le cadre de ses recherches, le docteur en histoire de l’Université McGill et diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris a mis la main sur un document inédit. En effet, pour la première fois, on rend publique une liste issue des autorités qui cible les personnes arrêtées en vertu de la Loi sur les mesures de guerre, la liste de «l’opération Cross-Laporte».
«On avait dans la ligne de mire beaucoup de jeunes. Trois quarts des personnes sur la liste ont 30 ans et moins. C’est très frappant. La liste est également hétéroclite. On a ratissé très large. On y trouve des gens du milieu syndical, de l’extrême gauche et même des poètes comme Gérald Godin ou Gaston Miron et la chanteuse Pauline Julien. Je ne suis pas certain que c’était des grosses menaces à la sécurité nationale ces gens-là. C’est comme si on avait voulu leur donner une leçon», conclut le professeur à la TÉLUQ.
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