La communauté collégiale manifeste contre les compressions
Des étudiants, des membres du personnel enseignant et de soutien du Cégep de Victoriaville ont manifesté, mercredi avant-midi, devant l’établissement pour dénoncer les compressions budgétaires et le gel d’embauche dans le réseau collégial.
Cinq intervenants ont pris la parole, à commencer par le président de la Fédération de l’enseignement collégial (FEC-CSQ), Youri Blanchet.
Les compressions et le gel d’embauche, a-t-il soutenu, ont des impacts partout dans la province et dans le réseau. « En fait, c’est assez alarmant ce qu’on voit dans le réseau actuellement. On voit des rénovations, des mises à niveau qui ne se font pas, on voit de nouveaux programmes ayant besoin de matériel pédagogique, d’équipements et de mobiliers et qui ne peuvent s’en procurer.
On se trouve dans des situations où les bibliothèques ne peuvent même pas acheter d’ouvrages de référence pour les programmes et les étudiants. Il y a un non-sens ici, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas », a-t-il lancé.
La situation affecte, selon lui, les services aux étudiants, les conditions d’études et de travail.
Le réseau collégial, a-t-il poursuivi, a besoin d’investissements majeurs pour se maintenir à flot. « Parce qu’on attend encore une augmentation de notre effectif étudiant de façon marquée dans les prochaines années », a-t-il noté.
L’éducation doit être considérée comme un investissement et non une dépense. « C’est un investissement pour l’avenir et surtout cela a des impacts réels dans notre société. On a des citoyens bien formés et des travailleurs qualifiés. Il est nécessaire de faire entendre notre voix encore haut et fort jusqu’à ce qu’on soit entendu », a fait valoir M. Blanchet.
Pour sa part, la présidente de la Fédération du personnel de soutien de l’enseignement supérieur (FPSES-CSQ), Valérie Fontaine, a qualifié « d’inacceptables » les compressions et le gel d’embauche. « Ce gel est une mesure qui vient mettre à mal notre réseau. Un cégep, c’est comme une microsociété, a-t-elle souligné. On ne peut juger qui est plus important que l’autre. On est tous là pour la même mission et tout le monde est important. On ne peut se permettre de couper des postes. Nos établissements vont se remplir de nouveaux étudiants. Et on n’aura pas les ressources humaines pour les accompagner et leur offrir les services de qualité auxquels ils ont droit », a-t-elle déploré.
Comme son prédécesseur, elle a affirmé que l’éducation, qui coûte cher, constitue un investissement. « On ne peut penser simplement en termes de chiffres et de dépenses. C’est un investissement qui rapporte à toute la société. »
Le gel d’embauche se traduit, a-t-elle confié, par une surcharge de travail qui cause des départs. « Des gens quittent en prévention, tannés de se voir imposer une charge de travail de plus en plus grande jour après jour. Le réseau va s’écrouler si on n’y fait pas attention », a-t-elle prévenu, ajoutant qu’une telle situation ne peut continuer. « Il faut permettre des embauches, offrir des conditions de travail dignes, assurer des investissements dans notre système d’éducation, a-t-elle plaidé. On veut aussi un véritable soutien pour notre personnel, pour les étudiants. On veut une revalorisation de tous nos emplois et des moyens humains à la hauteur des besoins croissants de notre réseau. Aujourd’hui, on est déterminés. On ne laissera pas le gouvernement nous imposer des régressions encore une fois et on va continuer de lutter pour nos droits, notre dignité au travail et la pérennité de notre réseau collégial. »
De son côté, le président de la Fédération du personnel professionnel des collèges (FPPC-CSQ), Éric Cyr, a dénoncé les multiples coupures, notamment celles qui touchent les enveloppes régionales des attestations d’études collégiales (AEC) et les coupures dans les programmes de soutien à la recherche.
« Les coupures dans les enveloppes des AEC signifient, non seulement des pertes d’emploi pour nos collègues, mais aussi une diminution importante dans certaines régions d’une offre d’éducation, de programmes d’éducation des adultes alors que nos communautés et nos entreprises en ont besoin. On a besoin d’une main-d’œuvre spécialisée qui ne sera plus au rendez-vous », a-t-il constaté.
Quant aux coupures dans les programmes de soutien à la recherche collégiale, elles viennent mettre « un frein à l’élan à la recherche collégiale qui s’est développée dans les dernières années et qui est importante ».
« Nous sommes ici pour rappeler au gouvernement qu’investir en éducation, c’est investir dans nos jeunes, dans nos communautés dans notre développement économique. On est ici pour réclamer une stabilité, une pérennité dans le financement des cégeps. Nous sommes ici avec toutes les catégories de personnel, avec les étudiants et on ne laissera pas le gouvernement tronçonner les programmes et services dans les cégeps », a affirmé Éric Cyr.
Représentant les étudiants, le président de la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ), Antoine Dervieux, s’est dit sidéré par l’annonce de la fin du programme de bourses Perspective Québec. « Comme si on n’avait pas assez de bonnes raisons d’être en colère, la ministre nous donne plus de raisons de s’indigner. Ce sont 250 M $ qu’on retire directement des poches de la population étudiante, argent dont les étudiants ont besoin. Un sondage montre que 40% de la population étudiante est aux prises avec des problèmes d’insécurité alimentaire », a-t-il rappelé.
Le réseau collégial ne peut se permettre de continuer avec de telles coupures, selon lui. « Avec autant de coupures, c’est notre population étudiante au complet qui est mise de côté. On ne peut se permettre de continuer ainsi, on a besoin d’un réinvestissement. Avec 250 M $, tellement de belles choses peuvent être réalisées, notamment la rémunération des stages. On en a besoin pour notre population étudiante, mais surtout pour le futur du Québec », a-t-il terminé.
Pour sa part, la troisième vice-présidente de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), Anne Dionne, a plaidé sur l’importance pour le réseau de l’éducation de se doter d’une vision globale à l’intérieur de laquelle le réseau collégial doit occuper une place importante.
« C’est une pierre précieuse que nous avons. Il faudrait que le gouvernement en place s’en souvienne. On fait l’envie de bien du monde avec notre réseau collégial. On est mûr pour se redonner une vision à long terme pour au moins 10 à 15 ans. ll serait temps qu’au Québec, on écoute le personnel de l’éducation et les étudiants. On n’a peut-être pas toutes les solutions, mais on en a quelques-unes. On sait qu’il nous faut une vision à long terme. L’éducation, c’est le socle d’une société saine et démocratique. On le mérite », a-t-elle conclu, tout en dénonçant « ces attaques ingrates contre les cégeps, son personnel et ses étudiants ». « Il faut se serrer les coudes et refuser le fatalisme des compressions et des gels d’embauche. On a besoin de penser et de faire autrement. On est là pour maintenir cette pression, pour montrer notre attachement profond à la formation, au réseau collégial et au Cégep de Victoriaville. Restons solidaires et unis! »
Le directeur général du Cégep de Victoriaville, Denis Deschamps a dit partager les préoccupations des syndicats. « Ce qu’on vit au niveau des budgets d’investissements précarise la situation des collèges pour notre mission d’enseignement et le maintien de nos infrastructures. Nous sommes inquiets et préoccupés », a-t-il confié au www.lanouvelle.net.
Des impacts bien réels peuvent se faire sentir. « Ill se peut qu’on ne soit pas en mesure d’engager tous les gens dont on aurait besoin, particulièrement dans nos centres de recherche. On se questionne. Cela met à mal notre mission de transfert d’expertise, de savoir et de recherche avec les organisations avec lesquelles on travaille », a signalé M. Deschamps.