«Il y a un gros, gros problème au Chêne»
VICTORIAVILLE. Si elle devait faire tenir son message en un seul mot, Carole Bélisle dirait «Dénoncez!». Elle est la sœur de Patrice Bélisle, résidant du centre d’hébergement Le Chêne décédé le 20 octobre trois semaines après avoir été frappé à coups de soulier par un autre usager. «Ce que j’espère en dénonçant? C’est que les témoins dénoncent ce qu’ils voient, qu’ils cessent d’avoir peur des représailles. En dénonçant, de place en place, il n’existera plus d’endroit comme celui-là. J’ai bien avisé mes deux garçons que je ne voudrais jamais me retrouver dans un tel centre! Aux décideurs, je dis «faites du ménage»!»
Avant même le décès de son frère, Carole Bélisle avait entrepris des démarches pour porter plainte à l’encontre du centre d’hébergement Le Chêne.
Elle considérait que depuis qu’il avait été transféré à l’unité prothétique, son frère Patrice était devenu le punching bag de résidants aux comportements agressifs.
Elle ne saurait dire le nombre de fois où il a été frappé, tassé, jeté par terre. «Ancien infirmier, il faisait des risettes à tout le monde. Et il souffrait, disait-on, d’«errance invasive».»
Carole Bélisle décrit son frère, ancien infirmier, comme un homme doux, très frêle à la fin de sa vie. La dégénérescence fronto-temporale lui faisait perdre la mémoire et, parfois, l’usage de la parole. Il s’était d’abord retrouvé à la résidence du Roseau en septembre 2012 puis transféré à l’unité prothétique du Chêne en avril dernier. «Mon autre frère et moi nous nous étions opposés à ce qu’il soit transféré là, sachant que l’unité avait mauvaise réputation avec ses cas d’agressivité. Même des gens du personnel du Roseau s’étaient étonnés qu’on le transfère au Chêne.»
Mme Bélisle dit que leur voix n’a pas été entendue. «Comme elle ne l’est jamais quand on fait des demandes et des suggestions», déplore-t-elle. Elle parle de cette fois où, à la suite d’une chute (avait-il été poussé?) elle a demandé à ce que son frère puisse obtenir un scan afin de déterminer l’ampleur de ses blessures internes. «Ce ne sont pas des soins et de l’acharnement thérapeutique que je demandais, mais un diagnostic!» Elle évoque aussi cette suggestion qu’elle avait faite d’installer des caméras de surveillance.
La dame dit que depuis deux ans, elle rendait fréquemment visite à son frère, assez souvent pour constater des déficiences dans l’encadrement des résidants et un grand roulement chez le personnel. Oui, dit-elle, il y a eu quelques ajouts d’effectifs. «Mais avec ces usagers très agressifs, il y a un gros, gros problème au Chêne. Le personnel aussi est en danger; les gens sont dévoués, mais surchargés et essoufflés.»
Carole Bélisle dit qu’elle comprend les doléances du personnel et qu’elle a pardonné à l’usager qui a blessé son frère. «Le monsieur est malade. Jadis, il y avait des endroits, à Saint-Ferdinand par exemple, pour des cas de ce genre. Même ses proches ont peur de lui.»
Carole Bélisle dit que ce n’est pas par vengeance qu’elle dénonce, mais elle veut «brasser la cage» des décideurs, les invitant à investir de l’argent sur le «plancher» pour prendre soin des gens, plutôt que de se «mettre à trois pour pousser le même crayon».
Elle a été indignée que personne du Centre de santé et de services sociaux (CSSS) d’Arthabaska-et-de-L’Érable ne l’appelle et ne l’informe de la tenue d’une conférence de presse tenue jeudi dernier au sujet du décès de son frère.
Loin de l’avoir rassurée, les propos des autorités du CSSS ne sont, à ses yeux, que du «blabla», un ramassis de phrases vides de sens.