Du 9e étage à la rue : les technologistes manifestent

Pour la première fois, les technologistes médicaux… et médicales (puisqu’elles sont nombreuses) sont sortis de leur laboratoire pour manifester en un lieu stratégique, en face du Centre de prélèvements de l’Hôtel-Dieu d’Arthabaska afin de sensibiliser le public aux effets que pourrait avoir le projet Optilab sur les services.

Le projet Optilab vise à centraliser dans onze serveurs québécois la grande majorité des prélèvements à analyser. En Mauricie et au Centre-du-Québec, c’est vers Trois-Rivières que seraient dirigés les prélèvements.

Entre 11 h 30 et 13 h 30, les technologistes se sont relayés pour brandir leurs pancartes aux yeux des passants, distribuer leurs tracts «Barrette va trop vite».

Cette manifestation, l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) l’avait prévue bien avant la rencontre de la semaine dernière avec les autorités du CIUSSS, note Sylvie Godin, répondante politique de l’Alliance.

Minuit moins cinq

L’Alliance réclame toujours un moratoire sur ce projet de réorganisation des services, même si tout laisse croire que la machine est déjà lancée.

«Il est peut-être minuit moins cinq, mais il n’est pas trop tard! On peut avoir encore un certain poids», répond Mme Godin.

Elle dit que si la population paraît peu réactive à ce projet, c’est qu’elle est difficile à joindre par les grands médias – la télévision surtout – et que dès qu’un opposant se manifeste, le docteur Barrette sort ses grands discours rassurants pour les patients, leur martelant que rien ne changera pour eux.

Or, poursuit la porte-parole syndicale, au-delà du centre de prélèvements, c’est tout un changement qui se prépare pour eux et qui n’est pas sans risque.

Elle répète que beaucoup de questions demeurent sans réponse quant aux spécimens qu’on voyagera sur les routes vers Trois-Rivières. «On nous parle des prélèvements en externe. Mais beaucoup de ceux-là peuvent nécessiter aussi des résultats rapides et des soins immédiats», poursuit Mme Godin, parlant des anticoagulants, des formules sanguines pour dépister cancer ou anémie, des enzymes cardiaques. «Même un glucose trop élevé découvert à la suite d’un bilan annuel nécessite une intervention rapide.»

Les technologistes s’inquiètent aussi des délais dans le transport, les manipulations, les fioles qu’il faut diviser, les conditions de conservation des spécimens qui prendront la route, beau temps, mauvais temps. «On est déjà témoin d’erreurs et de pertes pour ceux qui voyagent déjà. En concentrant les analyses vers un seul serveur, on va multiplier ces erreurs et ces pertes.»

Quant aux pertes d’emploi – l’équivalent de 20 postes à temps complet – pour la Mauricie et le Centre-du-Québec, la représentante syndicale se demande comment il faut interpréter cette annonce du CIUSSS. «On pourrait penser que le CIUSSS en coupera 40 et en créera 20 nouveaux à Trois-Rivières, ce qui représenterait finalement ses 20 postes coupés!»

Même s’il est retraité depuis sept ans des laboratoires de l’Hôtel-Dieu, Jean-Guy Laveault tenait à appuyer la cause des technologistes, ce qu’il a été lui-même pendant 34 ans.

Le projet Optilab l’inquiète aussi et doute qu’il génère des économies. Concentrer la majorité des analyses dans un seul serveur est risqué selon lui. «Et si la machine brise? Et à l’Hôtel-Dieu, ça prend des équipements pour les besoins de l’hôpital. Ces équipements finiront vite par être sous-utilisés.»

Est-ce que vraiment, se demande-t-il, les mamans technologistes médicales seront prêtes à aller travailler ailleurs? Les pertes d’emploi pourraient être plus importantes que prévu, craint-il.

Le projet Optilab commence à faire sortir certains dirigeants et médecins sur la place publique, se réjouit Sylvie Godin. D’autres manifestations à l’échelle québécoise devraient avoir lieu au cours des prochains jours.