D’intéressantes retombées de la mission de Clipperton

L’expédition scientifique, menée par Michel Labrecque et Julie Ouimet du 28 janvier au 11 février sur l’île inhabitée de Clipperton loin dans le Pacifique, connaît une suite fort intéressante pour les deux plongeurs de Saint-Christophe-d’Arthabaska. La France a, en effet, annoncé la création d’une aire marine protégée (AMP).

«La ministre française de l’Environnement, Ségolène Royal, a annoncé la création d’une aire marine protégée de 12 000 nautiques autour de Clipperton, correspondant aux eaux territoriales françaises, indique Michel Labrecque. Cela donnera plus de poids pour aller de l’avant avec une règlementation pour empêcher la pêche illégale».

Lors de leur mission à Clipperton, les Sylvifrancs avaient d’ailleurs surpris un bateau de pêche illégal dans le secteur.

«La création de l’AMP envoie un message clair aux illégaux : on sait que vous y aller. Maintenant, on ne veut plus», ajoute Julie Ouimet.
Cette annonce rapide par la France a de quoi surprendre Michel et Julie. «On ne pensait pas voir ça à court terme. De façon réaliste, on ne pensait pas que cela arriverait avant quatre ou cinq ans. Ces processus sont longs et remplis de considérations, notamment politiques», souligne Julie Ouimet.

Michel et Julie croient que la présence d’un scientifique français, conseiller politique par surcroît, a contribué à ce résultat positif, tout comme la remise rapide d’un rapport aux autorités françaises.

«Nous avons produit un rapport d’environ 80 pages contenant des recommandations touchant, non seulement l’aspect marin, mais aussi tout ce qui touchait la terre, l’île», note Michel Labrecque, ajoutant que le scientifique, pour sa part, a produit un rapport plus pointu de deux pages dans lequel il recommandait une protection de 100 000 nautiques.

«Le rayon de 12 000 nautiques n’est pas aussi grand qu’on l’aurait souhaité, mais, comme cela se fait ailleurs dans le monde, on commence par un plus petit rayon qui s’agrandit avec le temps», signale Julie.

Les avantages

La création de l’aire marine protégée de Clipperton n’est pas encore en vigueur. Différentes étapes doivent d’abord être franchies.

«On ne connaît pas encore ce qui sera fait précisément», précise Julie Ouimet.

«Une AMP, fait savoir Michel, définit comment on protégera ces eaux-là pour faire de cette zone une situation durable. Le but, c’est d’étudier ce qui s’y passe, ce qu’on peut permettre pour qu’il n’y ait pas d’impact.»

La France, par ailleurs, souhaite créer à Clipperton une base scientifique permanente, pouvant contribuer à décourager les pêcheurs illégaux. «Ça fait des yeux, une présence sur le site», note Julie Ouimet.

On pense aussi que le secteur de Clipperton pourrait être une pouponnière pour un certain type de requin. «On peut peut-être rebâtir une population de requins. Éventuellement, tout peut mener à une plus grande importance de l’écotourisme, un secteur qui pourrait devenir une nouvelle destination pour les adeptes de plongée», indique Michel Labrecque.

L’écotourisme, observe-t-on, devient plus lucratif que la pêche aux requins. «À plusieurs endroits où se faisait beaucoup de pêche, les pêcheurs sont devenus des opérateurs écotouristes et gagnent mieux leur vie tout en protégeant la ressource», renchérit Julie.

Ultimement, les intervenants mobilisés souhaitent la création, dans le Pacifique, d’un corridor de protection, comme on le voit dans la Méditerranée.

Retour à Clipperton

Julie Ouimet et Michel Labrecque retourneront, en principe, à Clipperton fin avril début mai 2017. Ils ont en main les autorisations nécessaires.

Tout est prêt, à 80%, 90%, pour cette deuxième mission. Ne reste, en fin de compte, qu’à compléter le financement de l’expédition.

«Il nous faut un bateau plus rapide que le premier avec lequel on a perdu quatre jours. Mais l’embarcation coûte 100 000 $ de plus», révèle Michel. D’où l’invitation lancée aux compagnies et entreprises intéressées à s’impliquer comme partenaires financiers. Elles peuvent se manifester à michel@n2pix.com ou au 819 357-4390.

Outre le bateau, l’équipage souhaite disposer de plus grandes ressources au niveau des équipements.

Cette mission poursuit l’objectif de baliser des requins. Mais il y a plus. «On veut passer plus de temps sur l’île et dans l’eau pour analyser les plus petites espèces, pour constater si on ne trouverait pas d’autres espèces qui n’ont pas été répertoriées», souligne Julie.

«La première fois, ajoute Michel, on a identifié une nouvelle espèce qu’on retrouve ailleurs dans le monde, mais pour la première fois vue à Clipperton. Cela prouve ce corridor de migration.»

Le couple des Bois-Francs compte bien en profiter, si les conditions le permettent, d’effectuer de la plongée technique en eau profonde pour vérifier une information reçue à l’effet que des requins en quantité nageraient à quelque 150 pieds de profondeur.

On souhaite aussi documenter le lagon sur Clipperton, ce qui n’a pas été fait la première fois pour des raisons de sécurité.

Et peut-être aussi l’étude d’un problème de rats qui ont été emmenés sur l’île par des bateaux. Ces bestioles  commencent à influencer l’écosystème, fait-on remarquer.

L’expédition devrait compter un total de 18 membres, incluant Julie et Michel, les scientifiques et les passagers payants. «Plusieurs personnes de la première expédition souhaitent revenir», termine Michel Labrecque.