Des alternatives au pétrole? Certains désespèrent
VICTORIAVILLE. Ce ne sont pas les idées qui manquent pour des solutions de rechange aux énergies d’origine fossile. La biomasse, l’hydrogène et le lithium, l’éolien en sont toutes. Certains suggèrent même de trouver des sources à l’extérieur de la planète! Mais «Est-il trop tard?» Tel est le titre du récent ouvrage et la grande question que pose le prof Claude Villeneuve de la Chaire Éco-Conseil de l’Université du Québec à Chicoutimi.
De retour à Victoriaville pour une troisième fois, M. Villeneuve animait un des panels du colloque Vertech portant sur les sources d’énergie de remplacement.
Ce panel réunissait Carol Montreuil de l’Institut canadien des produits pétroliers, Christophe Coutanceau, professeur à l’Université de Poitiers, Renault Lortie, directeur des ventes chez Gaz Métro, Patrice Mangin, professeur à l’Université du Québec à Trois-Rivières et PDG d’Effensys ainsi que Jean-Michel Lavoie, professeur à l’Université de Sherbrooke, titulaire de la Chaire de recherche industrielle en éthanol cellulosique.
Fidèle à lui-même, parfois sarcastique, le prof Villeneuve a brossé des perspectives environnementales plutôt sombres pour l’avenir de la planète. Cela si rien n’est fait maintenant avant que la terre se peuple de 20 millions de «nouveaux amis» d’ici 2050 et connaisse une forte croissance de la consommation d’énergie. La Chine, par exemple, s’industrialiserait à raison d’un Canada par année.
«Si la tendance se maintient», la demande d’énergie primaire va doubler d’ici 2050 avec tous les impacts environnementaux que cela suppose, les changements climatiques étant déjà «la réalité de notre siècle», a affirmé M. Villeneuve.
Aucun des panélistes n’a contesté les données du portrait livré par le professeur Villeneuve. Pas même Carol Montreuil, porte-parole des l’Institut canadien des produits pétroliers.
Claude Villeneuve lui a d’ailleurs reproché d’avoir «esquivé le problème», M. Montreuil ayant dit qu’il fallait donner du temps au temps, qu’il s’était écoulé des centaines d’années pour passer d’une source d’énergie à une autre, du bois au charbon, par exemple.
Il a ajouté que les énergies alternatives avaient un bel avenir, qu’elles avaient connu une explosion de 300% en 25 ans. «Cela semble fulgurant, mais dans la tarte de la consommation, elles occupent 15% au lieu de 5%, les énergies fossiles représentant encore 85%.» M. Montreuil a ajouté que jamais, les changements climatiques ne faisaient partie du «top 10» des préoccupations des investisseurs.
Le prof Villeneuve a convenu qu’on ne pourrait, du jour au lendemain, se priver de pétrole. Quatre milliards d’humains en mourraient, beaucoup ne sachant pas tenir une hache!, a-t-il dit.
Le plus optimiste des panélistes, Renault Lortie dit avoir espoir en l’avenir, parlant de la recette mondiale que Gaz Métro utilise pour faire reculer le «mur», investir dans l’efficacité énergétique.
L’efficacité énergique et l’éducation de la population, a ajouté le prof Coutanceau celui qui proposait de sortir de la planète pour se mettre en quête de nouvelles sources d’énergie.
Il a aussi été question de l’«inertie» politique en ce domaine, le prof Villeneuve dénonçant l’absence de soutien gouvernemental à la recherche et au développement de bioproduits.
Le prof Mangin, «vendu» à la biomasse, a renchéri en disant que jamais cette filière ne pourra se développer sans subsides, ne pouvant concurrencer celle du pétrole. M. Lavoie partage ce point de vue, disant qu’il faudrait probablement augmenter les taxes sur les carburants liquides et les faire diverger vers la recherche et le développement.
À ce participant qui soutenait qu’avec l’air, l’eau et les ressources dont le Canada dispose, il avait moins à se préoccuper de toutes ces questions, le prof Villeneuve a riposté. «Le Canada a beau être grand, mais il est aussi concerné. On l’a longtemps perçu comme un pays imaginaire». M. Villeneuve a ajouté que même au nord, les autochtones s’inquiétaient des changements qu’ils constatent de visu.