Dépenses dans des cégeps : un «petit chapitre qui nous salit»

Ni le directeur général, ni le secrétaire général du cégep de Victoriaville ne seraient gênés ou honteux de mettre sur la table leurs comptes de dépenses. Même que le directeur général Paul Thériault a dit qu’il rougirait moins à présenter ses factures à la Vérificatrice générale ou à la ministre qu’à sa conjointe… tant elle pourrait lui reprocher de trop fréquenter les McDo et Harvey’s.

Ce récent rapport de la Vérificatrice générale (VG) du Québec Guylaine Leclerc ayant mis sa loupe sur 232 comptes de cinq cégeps du Québec pour en conclure que 65% comportaient des anomalies a fait réagir les autorités du cégep lors de sa dernière séance du conseil d’administration. Pendant une quinzaine de minutes, devant les administrateurs, Paul Thériault et le secrétaire général François St-Cyr, ont abordé ce sujet «fragile». «Ne soyez pas inquiets!», ont-ils soutenu devant les administrateurs.

Dès la sortie de l’article dans Le Devoir, Paul Thériault a été interpellé par tous ceux qui le croisaient la semaine dernière. Il a même révélé qu’une demande d’accès à l’information avait été déposée à son endroit et à celui de ses collègues. Ce «petit chapitre» du rapport de la VG le déçoit. «Il fait mal parce qu’il nous salit.» Mais ce n’est pas la première fois, a-t-il ajouté.

Il a affirmé qu’au cégep de Victoriaville, le remboursement des dépenses se faisait de façon rigoureuse et serrée, que s’appliquait la politique numéro 10. Depuis une dizaine d’années, a renchéri François St-Cyr, la prudence s’est installée, rappelant qu’à une certaine époque, le cégep de Victoriaville avait aussi vécu sa part de «scandales», s’étant fait taper sur les doigts.

M. St-Cyr a expliqué que certaines dépenses étaient bien balisées, comme le per diem autorisé pour le déjeuner, le dîner, le souper, le tarif des chambres d’hôtel, l’allocation pour le kilométrage. Il a poursuivi en disant que c’était davantage le gros bon sens et le bon jugement qui s’appliquaient dans le cas du remboursement des frais de représentation. Il arrive parfois que la haute direction ou des directeurs de services aient à rencontrer des partenaires pour des projets de développement et qu’ils paient leur repas dans un resto… qui ne sera pas un McDo, a-t-il précisé. Le gros bon sens s’applique et il est possible que le secrétaire général n’autorise pas telle ou telle dépense, le «steak de trois pouces», par exemple. Et puis, M. St-Cyr souligne que les frais de représentation étaient habituellement préautorisés par le supérieur immédiat. «Du vin, on en prend, mais à nos frais», a signalé M. Thériault.

Ce dernier espère que la ministre Hélène David, dont il dit qu’elle a agi avec discernement dans ce dossier, n’ajoutera pas de nouvelles règles administratives, «on est en train de couler sous les redditions de comptes». Il a rappelé que les collèges s’étaient confrontés à des dizaines de millions de compressions, que des centaines de postes avaient été abolis dans le réseau, que les cégeps attendaient son approbation pour nommer des centaines de postes dans les conseils d’administration.

«Mais si la ministre exige qu’on soit plus pointu, qu’elle veuille par exemple que noir sur blanc, on inscrive que la boisson est interdite», ça ne créera pas de problèmes», a nuancé le secrétaire général.

Mardi matin, la ministre convoquait une conférence téléphonique afin de rappeler leurs responsabilités aux présidents des conseils d’administration», une «perte de temps», a dit le DG. Le président du c.a. du cégep de Victoriaville, Vincent Bourassa, lui-même fonctionnaire, a dit qu’on «est tellement surveillés» et que personne ne veut perdre sa réputation pour 10 $.