Viande crue pour chiens… résolument carnivores

SANTÉ. Singulier parcours que celui de Caroline Morin, agronome originaire de Victoriaville, maintenant installée en Montérégie, propriétaire d’un chenil d’une quarantaine de chiens Husky. Surtout productrice de nourriture pour chats et pour chiens. De la moulée? Non, des médaillons de viande crue.

Les médias commencent à s’intéresser à elle qui, pourtant, «cuisine» pour les animaux depuis 1999.

Elle dit qu’à cette époque, elle avait l’air d’une martienne à promouvoir l’agriculture biologique, pire, à faire manger de la viande crue à ses chiens.

Viande crue, lait cru, même combat, pourrait-on dire, mêmes appréhensions sur les risques de contamination.

Au sortir de ses études en agriculture au Collège Macdonald et après avoir travaillé à la santé et à la conservation des sols, c’est par «déformation professionnelle» que son intérêt a bifurqué vers l’alimentation des chiens. «Les chiens ont toujours fait partie de ma vie. Ils en sont le fil conducteur.»

En élevage biologique, explique-t-elle, on enlève les farines de viande de l’alimentation des vaches parce qu’elles sont des herbivores. «Je ne vois pas pourquoi on donnerait exclusivement des céréales à un carnivore comme le chien.»

Ses médaillons, justement de marque Karnivor, elle les fabrique avec de la viande crue de cheval, de poulet, de bœuf wagyu, de bison, de cerf rouge. Elle les additionne de végétaux comme des carottes, de la luzerne, de la betterave, même des canneberges et des pelures de pommes. «S’y ajoutent des aliments fonctionnels comme des probiotiques, des minéraux comme l’argile.» Ses produits sont exempts d’hormones et d’antibiotiques.

À 97%, les ingrédients de ses produits proviennent d’entreprises canadiennes, le plus près possible de chez elle (Sainte-Hélène-de-Bagot), précise-t-elle. «Je ne crois pas à la mondialisation!», s’exclame l’agronome de 49 ans. La traçabilité des ingrédients lui importe.

Déformation professionnelle

Ses recettes, elle les a expérimentées au fil des années avec ses propres chiens. C’est par «déformation professionnelle», dit-elle, et guidée par eux, qu’elle a commencé à s’intéresser à leur alimentation. La santé de son Peewee – elle habitait Québec à l’époque – a été le déclencheur de ses recherches

Le livre de Juliette Baïracly Levy Chiens et chats, leur médecine naturelle a achevé de la convaincre que l’alimentation industrielle y était probablement pour quelque chose dans les problèmes digestifs de son toutou de 9 ans.

Le changement d’alimentation a été «magique» pour Peewee, affirme-t-elle. Il a recouvré la santé et a vécu jusqu’à l’âge de 15 ans.

Depuis et pendant toutes ces années, elle a mené ses expériences. «Les chiens sont mon université. On dit que je suis une crottologue, parce que je m’intéresse à ce qui rentre et à ce qui sort. Quand on voit une plume d’oiseau sortir, facile de comprendre qu’il ne l’a pas digérée.»

Oui, répond-elle, ses produits coûtent plus cher que la moulée que l’on trouve dans les grands marchés et dans les meuneries. «Mais parce que l’animal est en meilleure santé, on économise bien des frais vétérinaires, d’antibiotiques, de cortisone, etc.»

Bientôt des os

Sous la marque Karnivor, son entreprise de neuf employés (l’incluant, elle) produit entre 10 et 12 tonnes de nourriture par mois. Elle s’apprête à lancer une deuxième variété de nourriture pour chats, en proposant six différentes pour les chiens. Elle projette, autre audace, la mise en marché d’os crus. «C’est digestible pour le chien et cela nécessite qu’il apprenne jeune à le gruger.»

Fille de Gervaise Trottier et de Raymond Morin, Caroline Morin revient parfois à son lieu de naissance, entre autres pour y donner des conférences sur l’alimentation crue. De l’oiseau-mouche à la baleine, seul l’humain transforme et cuit les aliments, observe-t-elle. «Cro-Magnon aurait peur s’il voyait ce qu’il y a sur nos tables!»

Au http://www.karnivor.ca/ on peut se faire une idée de son entreprise.