Stéphanie Beaudoin regarde maintenant vers l’avant

Bien des gens d’ici et d’ailleurs la connaissent cette jeune Victoriavilloise âgée de 25 ans, baptisée dans les médias «la voleuse ou la criminelle sexy». Stéphanie Beaudoin s’apprête à tourner la page d’un chapitre plutôt douloureux de sa vie. Un chapitre qu’elle regrette encore aujourd’hui et qu’elle regrettera toujours.

Ces jours-ci s’achèvent la probation de 30 mois de la jeune femme tout comme cette dernière condition, celle de ne pas souscrire à un contrat ou une entente pour vendre, publiciser ou utiliser son image dans le but d’exploiter ses démêlés judiciaires afin de retirer un bénéfice monétaire.

Stéphanie Beaudoin a accepté de se confier, de lever le voile sur cet épineux parcours de vie, faisant confiance, pour ce faire, à La Nouvelle Union.

Oui, bientôt, Stéphanie Beaudoin sera libre. «Je tourne la page. Je me libère d’un gros poids, mais ce poids, je l’aurai quand même jusqu’à la fin de mes jours, a-t-elle soutenu. Pas une journée ne passe sans que je pense à la connerie que j’ai faite, au désastre que j’ai causé.»

Les demandes de photos affluent pour Stéphanie Beaudoin. (Photo Marc-Antoine Jean)

Ce désastre, comme elle dit, et son arrestation ont fait grand bruit à l’été 2014. Avec l’aide de complices, elle a commis près d’une quarantaine d’introductions par effraction et de vols dans des résidences des Bois-Francs et de L’Érable.

Lors des représentations sur la peine, la jeune femme a exprimé des regrets et offert ses excuses aux victimes. «Je pense encore à ces gens aujourd’hui, a-t-elle souligné. Je vais m’excuser jusqu’à la fin de mes jours. Et moi-même, je ne me suis pas totalement pardonnée.»

Loin de vouloir minimiser ses actes, reste que «la voleuse sexy» cache un passé douloureux, marqué notamment par un certain événement dramatique. «À 15 ans, il m’est arrivé quelque chose de grave, ce qui fait que j’ai développé une rage énorme. Je n’en parlais pas. J’ai tout gardé pour moi.»

Stéphanie Beaudoin finira par délaisser l’école, vivra aussi une difficile peine d’amour, amplifiée par son trouble de personnalité limite diagnostiqué par une psychiatre qui l’a reçue à la suite de tentatives de suicide.

À 15 ans aussi, son confident, son labrador disparaît mystérieusement (un vol?), ce chien que son parrain lui avait donné à l’âge de 7 ans. «J’ai tout tenté pour le retrouver. J’ai alors commencé à éprouver de l’anxiété, à devenir agressive. Je ne voulais plus vivre. C’est là que tout a commencé», croit-elle.

«Quand j’ai posé les gestes (les crimes), j’étais morte intérieurement. On m’a fait des propositions et j’ai embarqué. Et comme je suis une personne très intense, j’ai embarqué à 110%. On dirait que ça m’a défoulé. Après les délits, la rage qui m’habitait depuis l’âge de 15 ans avait disparu», a-t-elle expliqué.

Un travail sur soi

Un suivi thérapeutique faisait partie de la peine imposée. Encore aujourd’hui, Stéphanie Beaudoin consulte, aux deux semaines, une psychologue qui lui procure un grand bien. «Je ne cesserai pas de la voir. C’est comme mon encadrement. Elle me comprend, me ramène sur terre. Ça m’aide beaucoup.»

Stéphanie Beaudoin a beaucoup appris ces derniers mois, comprend aussi son trouble de personnalité limite, stable et contrôlé maintenant.

La jeune femme affirme avoir grandi, avoir acquis de la maturité à travers les malheureux événements. «J’ai grandement évolué, a-t-elle noté. Je vois la vie d’un autre angle. On dirait que je suis une vieille âme. J’ai tellement de vécu.»

Questionnée sur ce qui lui a fait le plus mal, Stéphanie Beaudoin, qui s’exprime avec franchise et aisance, n’hésite aucunement. «C’est de m’être rendue au point d’entrer dans la vie privée des gens. Je trouve ça décevant. Mes grands-parents ont déjà été victimes de vol. Je sais le mal que ça fait. Avec le recul, a-t-elle ajouté, je constate que j’ai beaucoup grandi, j’ai appris sur moi. Mais il est certain que les victimes, je ne les oublie pas et j’essaierai de me faire pardonner jusqu’à la fin de ma vie.»

Stéphanie Beaudoin dit penser tous les jours à «sa connerie» et aux victimes. (Photo www.lanouvelle.net)

Les conséquences ont été énormes pour les victimes, mais aussi pour la famille de la «criminelle sexy». «Ma famille en a mangé une claque, a-t-elle signalé. Mais mes parents m’ont toujours soutenue, ne m’ont jamais abandonnée. Mon père m’a dit : tu peux faire une erreur de parcours, une grosse erreur, mais ne la refais pas une deuxième fois, car cela ne sera plus une erreur.»

Court séjour en prison

Pour ses crimes, elle a été condamnée, en février 2016, à 90 jours de prison, à purger les fins de semaine.

En raison de sa conduite respectueuse, on lui a rapidement donné son congé. «Je n’ai fait que sept jours, au total, dans les établissements Leclerc, Tanguay et Trois-Rivières. Ensuite, je devais me présenter chaque week-end pour une signature», a-t-elle fait savoir.

En prison, Stéphanie Beaudoin n’a pas joué «à la princesse», se présentant vêtue simplement, si bien qu’elle a su gagner le respect des autres détenues. Même que deux grandes femmes l’ont, en quelque sorte, prise sous leurs ailes.

Même si l’inconnu l’attire, qu’elle aime découvrir toutes sortes de choses, la jeune femme n’aurait jamais pensé vivre pareille expérience. Une expérience qu’elle ne veut absolument pas revivre. «J’ai séjourné à la prison Tanguay avant sa fermeture. C’était atroce, la bouffe était dégueulasse et il faisait froid», se souvient-elle. «J’aurais vraiment été malheureuse de devoir y passer 90 jours. J’aurais capoté», a-t-elle ajouté.

Par ailleurs, Stéphanie Beaudoin a accompli les 200 heures de travaux communautaires imposées par le Tribunal. «J’ai commencé à la bibliothèque de Plessisville pour terminer au Centre d’entraide bénévole Contact de Warwick. J’ai adoré. Diane (Lefort) est super fine. Elle ne m’a pas jugée, m’a aidée et épaulée. Ça m’a fait vraiment du bien», a-t-elle précisé, ajoutant qu’elle souhaite y retourner pour faire du bénévolat, tellement l’expérience a été «magnifique».

De ses démêlés judiciaires, Stéphanie Beaudoin retiendra aussi les bons services de son avocat Me Denis Lavigne. «Il m’a grandement aidée, m’a soutenue moralement. Il m’a donné le courage de continuer, d’affronter. Je lui dois tout», a-t-elle indiqué.

Un désir d’aider les gens

Depuis longtemps, Stéphanie Beaudoin caresse le souhait d’aider les gens. D’ailleurs, au moment des événements, la jeune femme étudiait en soins infirmiers. «Je regrette beaucoup de n’avoir pu terminer ma formation. L’aide humanitaire dans d’autres pays m’intéressait. J’aime vraiment aider les gens», a-t-elle confié, bien consciente des portes qu’elle a elle-même fermées par ses agissements. «Tout ce que j’aurais aimé faire, intervenante sociale, travailleuse de rue, je ne peux le faire avec mon dossier criminel. J’ai ruiné ma vie et mon nom. Je dois repartir à zéro», a poursuivi celle qui a aussi effectué un cours en esthétique et qui envisage maintenant un cours en coiffure. «Pour la créativité», a dit la jeune femme, mais non pour occuper un emploi à temps plein. «Parce que mon intérêt pour aider les gens est plus fort.»

Ce côté prendra éventuellement la forme de capsules vidéo sur YouTube. «J’aimerais expliquer aux jeunes mon expérience, mon parcours pour leur enlever le goût de commettre les mêmes erreurs», a-t-elle laissé savoir.

Stéphanie Beaudoin propose différents types de photographie. (Photo Marc-Antoine Jean)

Elle mijote également des conférences pour aider les gens. Pas dans l’immédiat parce qu’elle n’est pas encore prête à s’exprimer devant un public. Il lui faut aussi du temps pour tout assimiler et mieux se comprendre encore.

Bref, Stéphanie Beaudoin ne manque pas de projets. Bien sûr, les photographies occupent une partie de son temps, des photos d’elles de différents styles réalisées par son ami photographe Marc-Antoine Jean. Son compte Instagram rejoint déjà quelque 10 000 abonnés.

Il y a aussi une offre pour participer à une émission télévisée en Europe. Stéphanie Beaudoin s’étonne que son histoire ait fait le tour du monde. «Je reçois des messages de partout, de Chine avec des symboles. Je n’y comprends rien. Des compagnies m’acheminent des produits pour que je les teste et que je les commente sur Instagram», a-t-elle fait savoir.

Quand on lui demande ce qu’on peut lui souhaiter, la jeune femme répond simplement : «Que ça aille bien. Que je puisse avoir de belles opportunités pour aider les gens. Certes, c’est plaisant les contrats de photos, mais je veux plus que ça. J’aimerais que se développe le côté d’aider les gens», a-t-elle insisté.

Aujourd’hui, Stéphanie Beaudoin regarde devant elle. «Je ne veux pas valoriser ce que j’ai fait et je ne le ferai jamais. Je m’en veux encore et je ne me pardonnerai jamais à 100%. Mais malgré tout, j’en tire une leçon positive», a-t-elle conclu.