Les pompiers de Warwick bonifient leur offre de services

Le Service de protection contre les incendies de Warwick (SPIW) ajoute une nouvelle corde à son arc afin de mieux répondre aux besoins du milieu agricole. Tous les pompiers de la brigade ont suivi une formation en sauvetage élaborée par l’Association canadienne de sécurité agricole (ACSA) afin de pouvoir intervenir auprès de victimes ensevelies par le grain.

Après avoir réussi leur formation théorique en ligne, les sapeurs ont pu concrètement, samedi et dimanche, expérimenter un sauvetage grâce à une remorque-simulateur fournie gracieusement par G3, une société de Winnipeg, un des leaders canadiens en entreposage, entreposage portuaire et mise en marché à l’international de la production céréalière canadienne.

La ferme Landrynoise de Saint-Albert, la plus importante ferme laitière au Québec, a accueilli les pompiers dans un vaste hangar pour leur permettre de réaliser la partie pratique de leur formation en plus de fournir plusieurs tonnes de céréales pour bien faire fonctionner le simulateur de silo à grain. « On remercie notre partenaire toujours ouvert à la collaboration », exprime le directeur du SPIW, Mathieu Grenier. 

L’idée d’une telle formation, souligne le directeur Grenier, remonte avant la pandémie. « L’idée revient au chef aux opérations Guillaume Morin qui, en 2019, en fouillant sur Internet, a appris l’existence de la formation. Il m’en a parlé et j’ai trouvé l’idée très intéressante. On a contacté l’ACSA et entrepris les démarches. À ce moment, raconte-t-il, l’Association en était à traduire sa formation en français. Ces gens souhaitaient venir au Québec. Ils étaient heureux que quelqu’un cogne à la porte. »

Mais l’arrivée de la pandémie a entraîné un retard de deux ans. Sans la COVID, les pompiers warwickois auraient été fin prêts à la fin de 2020.

Des pionniers

Les pompiers de Warwick font office de pionniers, devenant la première brigade au Centre-du-Québec, et l’une des cinq premières municipalités au Québec, à avoir été ainsi formée.

Il est important d’innover et d’évoluer, note le directeur Mathieu Grenier. « On cherche toujours du nouveau, on observe tous les ans quels sont les risques potentiels sur notre territoire, quelle est notre capacité d’intervention et s’il y a quelque chose de nouveau qui se développe. On évalue toujours les nouvelles entreprises et les risques qu’elles génèrent pour être prêts », expose-t-il.

Ainsi, depuis plusieurs années, le SPIW tenait à développer le côté agricole qui constitue une très grande partie du territoire. On dénombre, dans la MRC d’Arthabaska, quelque 1500 entreprises agricoles. Le territoire couvert par les sapeurs warwickois compte pas moins de 165 exploitations agricoles animales. On en retrouve 80 à Warwick, 55 à Sainte-Élizabeth-de-Warwick et 30 à Saint-Albert.

Déjà l’an dernier, Warwick allait de l’avant pour bonifier son offre de service en offrant à ses pompiers la formation en désincarcération industrielle et agricole.

Une formation accessible

L’ACSA a formé, au Québec, sept instructeurs pour dispenser la formation, dont deux pompiers de Warwick, le chef aux opérations Guillaume Morin et le lieutenant et technicien en prévention incendie, Pier-Antoine Marchand. « Ils ont été formés maîtres instructeurs. Ce sont eux qui nous forment et ils pourront être appelés à en former d’autres ailleurs Québec », précise Mathieu Grenier. 

Tous les frais sont assumés par la société G3, dont les frais de transport de la remorque-simulateur, un équipement unique au Canada.

Quant à l’Association canadienne de sécurité agricole, elle a fait don aux pompiers de Warwick des équipements utilisés pour les sauvetages.

La Ville de Warwick, pour sa part, a payé le salaire des pompiers, le temps de leur formation. La Ville a aussi acquis, l’an dernier, une remorque d’une valeur d’environ 15 000 $ pour le matériel de désincarcération industrielle et agricole. Elle abritera aussi les équipements pour le sauvetage en silo à grain.

En action

En fin de semaine, par groupe de quatre, les pompiers, supervisés par Guillaume Morin et Pier-Antoine Marchand, ont pu s’exercer, mettre à profit les connaissances acquises pour secourir une personne ensevelie dans le grain jusqu’à la taille.

Et on n’a pas seulement utilisé un mannequin. Certains pompiers ont joué la victime et ont pu expérimenter la sensation qu’un ensevelissement peut créer sur le corps humain. 

« En sauvetage, oui, il faut se dépêcher, mais on ne doit jamais brûler d’étapes, explique Mathieu Grenier. Il y a plein de risques inhérents à ça. Il faut prendre le temps, d’autant que de faux mouvements peuvent être dangereux pour la victime, mais aussi pour les sauveteurs. La sécurité prime toujours. Les intervenants ont tous des harnais, ils sont attachés et il faut aussi attacher la victime. En pareille circonstance, ce n’est pas une course contre la montre.

Tout doit se faire dans les règles de l’art pour la sécurité de tous. »

Un élément important de la formation vise justement la reconnaissance de la capacité des pompiers à intervenir. « Nos intervenants ne doivent pas mettre leur vie en danger en faisant quelque chose pour laquelle ils ne sont pas formés et qu’ils ne maîtrisent pas, indique le directeur du SPIW. Il peut donc arriver qu’on soit, par exemple, obligé de demander l’intervention d’une équipe en espace clos ou d’une équipe de sauvetage en hauteur. Tout dépend de la situation. La formation nous apprend à nous servir des outils, mais une grande partie consiste à reconnaître les dangers et à évaluer la capacité à intervenir. »

De plus, les pompiers peuvent être appelés à intervenir ailleurs que dans un silo puisque le grain peut être stocké en d’autres lieux, comme en tas dans un entrepôt. Des accidents surviennent aussi lorsqu’il est transporté en vrac. « Aux États-Unis, il y a plus d’accidents dans les transports que dans les silos, fait savoir Mathieu Grenier. Et la moyenne d’âge des décès dans les véhicules de transport est de 11 ans. Il s’agit souvent des enfants des agriculteurs qui viennent aider et qui se font surprendre lors des déchargements, par exemple. »

Les statistiques révèlent qu’au Canada, chaque année, une centaine de décès se produisent dans les exploitations agricoles. Du nombre, quatre morts sont directement liés à l’ensevelissement dans le grain. « C’est ce qui a mené à la mise sur pied par l’ACSA du programme de formation dédiée aux pompiers et aux premiers répondants et à un programme adapté aux travailleurs des milieux agricoles pour les sensibiliser et les préparer à intervenir dans des situations d’urgence impliquant du grain stocké », fait remarquer Mathieu Grenier qui invite les exploitants d’entreprises agricoles à se conscientiser davantage sur les risques d’accident à la ferme. « Il existe différentes formations en ligne, elles sont très accessibles et peu coûteuses », note-t-il.

Maintenant formés, les pompiers de Warwick souhaitent ne pas devoir intervenir, mais ils seront prêts, au besoin. Le service sera disponible dès le printemps 2023. Et annuellement, les sapeurs s’exerceront pour maintenir leurs compétences.

Ils souhaitent aussi que leur exemple puisse faire des petits et inciter d’autres services à en faire autant, étant convaincus que « se former et former les travailleurs aux dangers de leur milieu est sans aucun doute un outil pour faire prospérer une entreprise agricole en protégeant aussi leurs familles et le travail de toute une vie ».