Le CETAB+ : l’expertise en matière d’agriculture biologique

Le Centre d’expertise et de transfert en agriculture biologique (CETAB +) du Cégep de Victoriaville ne ménage pas ses efforts depuis 2010, effectuant de la recherche appliquée en productions végétales biologiques, dispensant aussi de la formation et du coaching en plus de proposer aux entreprises agricoles un service-conseil de nature technique, de gestion et de mise en marché.

Les projets abondent au CETAB+ qui en mène une quarantaine de projets chaque année, pas toujours des projets de recherche. Parfois, c’en est de transfert, de démonstration. « Une formule de recherche intéressante qu’on retient de plus en plus se nomme le modèle mère-fille. Après une expérience menée ici à Victoriaville en station de recherche, on la reproduit plus simplement sur des fermes. Ça aide beaucoup au transfert et à tester des choses dans des conditions réelles, agricoles et pas seulement dans une ferme expérimentale où il est plus facile de tout contrôler. C’est très porteur et d’autres centres de recherche au Québec commencent à s’en inspirer. Ils constatent que c’est une formule gagnante pour tout le monde. Je dirais que ça fait progresser tout le monde plus rapidement, tant les chercheurs que les agriculteurs », fait valoir le directeur du CETAB+, Jean Duval.

Le CETAB emploie actuellement quelque 35 personnes, une douzaine en service-conseil, quatre au niveau administratif, le reste, cinq chercheurs et des membres de l’équipe technique. « Il y a de la demande pour les services-conseils qui se développent. En 2021, on a ajouté deux autres conseillers. Le bio se développe partout en province. Il y a donc des besoins pour de l’encadrement », précise Jean Duval.

Le bio, dit-il, a gagné 10% des fermes au Québec, mais non pas en superficie. Les plus récentes données (2021) du Portail Bio Québec font état de 3303 entreprises détenant une certification biologique, dont 306 dans la région Centre-du-Québec.

Dans les dernières années, le secteur bio s’est beaucoup développé dans la région de Lanaudière. « Certains agriculteurs étaient déjà reconnus pour bien réussir, avec une bonne réputation, et ils ont emprunté la voie du bio. Donc, quand des leaders font ce pas, ils ont une grande influence », observe le directeur du CETAB+.

Dans la région, selon lui, on observe une croissance, pas tant dans le domaine laitier, un peu dans les grandes cultures, mais c’est davantage chez les maraîchers diversifiés. Le bio, c’est d’autres façons de faire, c’est toujours un peu insécurisant, note-t-il. Mais le gouvernement du Québec propose des subventions pour les aider à faire la transition vers le bio. « Ils défraient beaucoup, ils aident pour l’achat d’équipements de désherbage mécanique. Ils aident avec une rémunération à l’hectare pour les années de transition. Même si c’est insécurisant, l’aide existe. C’est pour ça aussi qu’il est important d’être accompagné par des gens d’expérience, des conseillers qui vont aider », soutient Jean Duval.

Le bio, la voie à suivre?

Le directeur du CETAB+ croit que la voie biologique peut inspirer beaucoup de monde. Le plan d’agriculture durable du gouvernement du Québec, selon lui, pointe dans cette direction. « On y fait état de réduction des pesticides, réduction des engrais chimiques. Dans le bio, c’est ce qu’on fait depuis longtemps. Oui, c’est la direction que ça prend. Il est certain qu’il y a des obstacles, fait-il remarquer. Mais au Québec, on est les champions du bio au Canada. On constate un intérêt chez les consommateurs et les producteurs. C’est de faire en sorte de réaliser un développement de façon harmonieuse, car tout n’est pas évident. »

Le CETAB+ propose aussi de nombreux cours non crédités, de courtes formations d’une journée ou de quelques jours. « Ça fonctionne très bien, assure le directeur. Ça se donne aussi en ligne. C’est intéressant pour les producteurs agricoles qui ne veulent pas nécessairement s’engager dans de longues études sérieuses. Une belle avenue qui met en valeur toute l’expertise de notre équipe. »

Différents sujets y sont abordés, de la compréhension des sols à la connaissance des intrants pour l’agriculture biologique, tous les produits pouvant être utilisés, en passant par la taille des arbres fruitiers. « Des choses très pratiques. On est vraiment dans le concret avec notre clientèle, les agriculteurs. On ne pellette pas des nuages. » Avant la pandémie, ces cours se faisaient en mode hybride, en ligne et en présence. « C’est encore notre but, d’autant qu’au 71, rue Bernier, nous disposerons d’une salle multifonctionnelle qui pourrait servir à dispenser nos formations courtes, une salle adaptée pour le mode hybride », confie Jean Duval.

À venir

Pour le CETAB, dans les prochaines années, il est beaucoup question de consolidation. « On sera beaucoup dans la consolidation dans les prochaines années, car on a quand même grossi rapidement », constate le directeur. Le CETAB a eu droit à une belle surprise il y a quelques mois, une contribution financière gouvernementale de 800 000 $. « On achève de la dépenser. On en prendrait d’autres de belles surprises de la sorte. C’est aussi qu’il y a toujours des projets qui sont difficiles à financier, notamment parce qu’ils ne cadrent pas dans les critères habituels de subvention. »

Une aide de la sorte permet d’essayer des choses. « Parfois, ça nous procure d’avoir des premiers résultats qui rendent ensuite le projet plus facile à défendre pour aller décrocher une subvention », signale Jean Duval.

Par ailleurs, le CETAB+ mijote un projet avec Inovem ayant comme thématique « Comment pallier au manque de main-d’œuvre dans nos secteurs respectifs? » « Soit par l’automatisation, la robotisation, la mécanisation, indique M. Duval. Ça démarre cette année pour une période de deux ans. Oui, l’agriculture fait aussi face à ce très sérieux défi de la main-d’œuvre. Comme partout, c’est un enjeu. »

Dans le rétroviseur

D’abord chercheur à ses débuts, Jean Duval assume la direction du centre depuis 2016. Il apprécie le travail accompli. « Oui, fier du travail parcouru, je suis très content, on est une belle équipe, on a une belle croissance, exprime-t-il. On avait une vision d’être un acteur incontournable dans le bio au Québec. Je pense qu’on y est rendu, et plus que ça. On est le plus grand centre dédié en agriculture biologique peut-être en Amérique du Nord. La langue, puisqu’on travaille en français, limite peut-être l’impact du centre en Amérique du Nord. On n’essaie pas de diffuser au Canada anglais et aux États-Unis. On dessert super bien le Québec, notre mission. Le gouvernement nous paie pour ça, pour soutenir l’agriculture bio au Québec. C’est ce qu’on fait. »

Mais des collaborations internationales surviennent parfois. Avant la pandémie, on organisait des voyages exploratoires pour voir les pratiques ailleurs. De telles expériences reprendront éventuellement. Au printemps, le centre quittera les locaux qu’il occupe au troisième étage de la résidence du Cégep pour emménager quelque part en mai au 71, rue Bernier, voisin de l’INAB. « C’est vraiment important que je sois près de mon équipe, dit-il. On y sera tous, à l’exception des gens de service-conseil qui travaillent de la maison. Ils disposeront cependant d’espaces, d’un bureau satellite rue Bernier. » Le CISA, lui, occupera des locaux dans l’ancienne caisse du centre-ville au 33, rue Notre-Dame Est.

Retour sur le colloque

Chaque année, le CETAB+ met de l’avant son colloque bio. L’édition 2022 a connu une belle réussite le 17 février. « Ça a bien marché. C’était seulement en ligne, mais on a attiré quand même 350 personnes », se réjouit Jean Duval. L’événement se composait de deux grands volets : grande culture et maraîchage en horticulture. Des invités français y ont effectué des présentations, dont Thomas Nesme de l’Université de Bordeaux. « C’était intéressant. Est-ce possible, faisable, réaliste qu’on parvienne à 100% d’agriculture biologique? C’est ce qu’il a abordé en effectuant des projections avec une équipe de travail pour dire finalement qu’il existe plusieurs freins. En fait, pour que le bio se développe au-delà de 20% de la superficie, il y aurait de sérieux obstacles, dont nos habitudes de vie », note le directeur du CÉETAB+.

Toute la thématique tournait autour de l’efficience, surtout pour les maraîchers. « Comment être le plus efficace possible dans les opérations? Un autre Français a exposé ce qu’il faisait sur sa ferme au point de vue ergonomique, du travail du sol. Tout est bien pensé. C’est vraiment de bonnes idées et très inspirant », commente-t-il.