Ferme Intention : de la culture maraichère presque 12 mois par année

Plutôt que de tenter de défier le climat hivernal du Québec, les maraichers Valérie Petit et Jean-Philippe Côté tentent plutôt de travailler en harmonie avec lui. Par la même occasion, les propriétaires de la Ferme Intention, située à Grand-Saint-Esprit, allongeront leur saison de récolte en dehors des périodes d’abondance locale par leur choix de culture et de méthodes de production.

« En ce moment, la culture d’hiver commence à prendre de l’ampleur au Québec. Plutôt que de cultiver des tomates ou des concombres en serre et que ça coûte une fortune en chauffage, on a choisi d’optimiser des légumes de climat froid qui vont tolérer des 0 degré Celsius. Notre objectif est d’étirer le plus possible les saisons pour qu’on puisse s’autosuffire en épinards, en carottes et en crucifères », explique Jean-Philippe.

Valérie Petit et Jean-Philippe Côté démarrent leur première année d’activités, leur serre ayant été installée en août dernier. Pour l’instant, la Ferme Intention concentre sa production sur les épinards, mais dès l’an prochain, Valérie et Jean-Philippe ajouteront à leur production mesclun, chou-fleur, brocoli, chou-rave et carotte. En plus de la culture en serre, la culture en champ devrait voir le jour également en 2022.

Ainsi, à la Ferme Intention, la saison de récolte s’étire jusqu’au mois de décembre et recommence dès le printemps, ce qui ne se fait pas dans les champs.

« C’est certain qu’il va y avoir une période plus creuse, car à partir de décembre et janvier, la luminosité diminue beaucoup. Il fait donc très froid dans les serres qui ne sont pas chauffées. Pendant ces mois-là, il n’y aura pas vraiment de récoltes, mais à partir de février ou mars, quand le soleil recommence à monter, les épinards vont recommencer à faire des tiges, beaucoup plus tôt que si on les mettait directement dans le champ », expliquent les propriétaires.

Toutefois, un système de chauffage pour conserver une température minimale dans la serre sera éventuellement installé. Entretemps, pour maximiser l’efficacité énergétique, ils font appel à quelques astuces. « On va installer des arceaux par-dessus nos rangs avec des toiles de protections qui vont aider à augmenter un peu la température en dessous », illustre Valérie. « Ça fait un peu comme une serre dans une serre », ajoute Jean-Philippe.

Jean-Philippe Côté rappelle qu’une serre n’est aucunement isolée. Lorsque les rayons du soleil touchent la serre, la température monte rapidement à l’intérieur, mais la température chute également rapidement dès que le soleil se couche. « Les tomates et les concombres doivent donc être dans des serres chauffées qui requièrent énormément d’énergie. Ça peut être rentable, mais à grosse échelle seulement », affirme Jean-Philippe.

« Oui, c’est plaisant de manger des tomates l’hiver, mais ce n’est pas normal dans nos climats d’en manger autant. C’est d’ailleurs une grosse cause de GES. Je pense qu’il faut un peu adapter notre alimentation et manger le plus possible en fonction de ce qui est disponible en saison », expliquent Valérie et Jean-Philippe.

Savoir bien investir

Bien que le couple ait acheté la ferme en 2012, ce n’est que lors du premier confinement, au printemps 2020, qu’il a décidé sérieusement de se lancer en agriculture. La terre qu’ils ont acquise était celle du grand-père de Jean-Philippe.

Durant ces quelques années, le projet mijotait et le couple économisait pour que lorsque le moment viendrait de se lancer, il soit en mesure d’investir suffisamment et intelligemment pour que le projet fonctionne. Valérie est ingénieure agricole, alors calculer et faire des prévisions en agriculture, c’est sa spécialité. Jean-Philippe, quant à lui, a complété un DEP en production horticole en 2008.

Les premiers investissements de Valérie Petit et de Jean-Philippe Côté ont été, en plus de l’achat de leur serre de 32 pieds par 100 pieds, la construction d’un garage comprenant une salle de lavage et une chambre froide. Ils ont également fait niveler et drainer souterrainement leur terre.

« On commence graduellement, mais chaque étape qu’on fait, on le fait bien », insiste Valérie. En ce moment, la Ferme Intention n’utilise pas toute la capacité de production qu’elle possède, sa serre étant remplie à 50% de sa superficie en plants d’épinards. » Nos entre-rangs sont trop larges, parce qu’on n’a pas encore le tracteur adapté pour travailler dans la serre, on a un trop gros tracteur », mentionne Jean-Philippe, expliquant que d’autres investissements s’en viennent.

Un jeu de mots qui fait sourire

Tous auront remarqué le jeu de mots qui sert de nom à l’entreprise maraichère de Valérie Petit et Jean-Philippe Côté : Ferme Intention. Jean-Philippe explique que lorsqu’ils ont créé leur entreprise, lui et Valérie n’étaient pas encore prêts à se lancer en affaires, mais qu’ils avaient la ferme intention de le faire… et c’est comme ça, lors d’un souper entre amis, que le nom de l’entreprise a été créé.

« Maintenant qu’on est dedans, le nom reste encore d’actualité. Je mets une intention de paix et d’amour dans ce qu’on produit. Je trouve ça le fun que notre travail se ramasse dans l’assiette de quelqu’un d’autre, tout en sachant que j’ai mis de l’amour dedans. La raison pour laquelle on fait de l’agriculture, oui c’est parce qu’on aime ce mode de vie, mais c’est aussi parce qu’on a une intention de partage », conclut Valérie.

Rappelons que la Ferme Intention a été finaliste régional à la 23e édition du Défi OSEntreprendre Centre-du-Québec. Valérie Petit est d’ailleurs fière de son plan d’affaires bien étoffé. « Avant de prendre une décision, je réfléchis beaucoup, je calcule tout, et je pèse les pour et les contre. Je veux voir les chiffres! », lance-t-elle.

La Ferme Intention est en pré-certification biologique et devrait être officiellement certifiée au printemps 2022.