David Giguère : de «futur décrocheur» à entrepreneur

David Giguère est malentendant de naissance. Au début de son primaire, il a éprouvé des difficultés d’apprentissage en raison de sa condition. «Un professeur m’a traité de futur décrocheur quand j’étais en troisième année.» Il avait tort.

David Giguère a persévéré et a cumulé les succès. Aujourd’hui âgé de 22 ans, il vient de terminer ses études collégiales à l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec (Campus de La Pocatière) et il détient sa propre ferme à Deschaillons-sur-Saint-Laurent.

«Ici, on ne se laisse pas décourager par les obstacles», souligne sa mère, qui croit fermement qu’«on a les limites qu’on s’impose».

Mise au fait des mots de cet enseignant, elle s’est aussitôt mise à la recherche d’une autre école qui serait en mesure de mieux épauler son enfant. «Ma mère a contacté le ministère de l’Éducation pour savoir s’il y avait des écoles spécialisées. Trois mois plus tard, je fréquentais l’école Oraliste de Québec. Mes parents habitaient à ce moment à Saint-Maurice. Ma mère a commencé à me voyager matin et soir jusqu’à Québec. Elle a fait ça pendant quatre ans.»

L’école Oraliste n’accueille que des enfants ayant des problèmes auditifs ou langagiers. Son programme d’intervention leur permet de surmonter leurs difficultés ou leurs faiblesses afin qu’ils puissent ensuite aller à l’école de leur choix et, ultimement, avoir un réel choix de carrière. « Cette école-là m’a vraiment permis d’avoir un grand succès académique. J’y ai amélioré de beaucoup ma débrouillardise, mon perfectionnisme et ma persévérance», souligne David Giguère. «Quand j’y suis entré, je ne savais pas comment écrire un texte. J’étais en mesure de ne rédiger que la moitié d’un paragraphe! Quand j’ai quitté, je pouvais facilement écrire des textes de 2000 mots et plus!», illlustre-t-il.

David Giguère a réintégré l’école régulière en secondaire 2. Il a fréquenté le Séminaire Saint-Joseph de Trois-Rivières jusqu’à la fin de ses études secondaires.

L’appel de la terre

Lorsqu’est venu le temps de faire son choix de carrière, il était clair pour lui que ce serait en lien avec la terre. «J’ai toujours été en campagne dans ma jeunesse. À Saint-Maurice, mes parents avaient une ferme de moutons. À l’âge de 7 ans, j’ai démarré mon propre élevage de poules pondeuses chez eux. En 2013, quand j’avais 10 ans, mes parents ont déménagé à Champlain et j’y ai transféré mes poules. Elles y sont encore.»

Ce petit côté entrepreneur a continué de grandir en lui. Il s’est inscrit à l’Institut de technologie agroalimentaire du Québec avec le désir de démarrer sa propre ferme. Quelques mois avant de terminer ses études collégiales, il a commencé à rédiger son plan d’affaires. En août 2021, il a acheté sa ferme à Deschaillons. Il a terminé ses études en mai 2022, fin prêt à vivre cette nouvelle aventure.

«Je commence petit cette année parce que je veux acquérir plus d’expérience avant de me lancer dans plus gros. J’essaie de développer davantage de techniques. C’est une année expérimentale», indique celui qui cultivera 25 sortes de légumes cet été sur une superficie de 0,3 hectare. «L’an prochain, je prévois tripler, avec un hectare en maraîcher. Par la suite, je vais augmenter d’un hectare chaque année.»

Sa terre compte 21 hectares au total, dont sept sont boisés. Pour le moment, un agriculteur loue une bonne partie de ses champs pour de la grande culture. À plus long terme, David Giguère aimerait produire du maïs sucré et expérimenter des cultures un peu plus inusitées, comme la camerise.

L’an prochain, il transférera les 30 poules qui sont encore chez ses parents dans sa grange, qui sera transformée en poulailler. Il en profitera pour grossir son élevage et atteindre les 99 poules.

Bien entouré

David Giguère a su bien s’entourer pour réaliser son rêve. «Mes parents m’aident beaucoup. En+reprendre MRC Bécancour aussi. C’est Véronique Poulin, du Marché public de Deschaillons, où je vais vendre l’ensemble de ma production cet été, qui m’a suggéré de faire appel à eux», dit-il.

Plein de projets

Au printemps 2023, le jeune producteur ouvrira un kiosque à la ferme sur son terrain, en bordure de la route 132. «En 2024, je vais commencer à avoir des serres.»

Éventuellement, il fera l’acquisition de machineries neuves. Pour le moment, il utilise celle que son père possédait lorsqu’il exploitait une ferme laitière à Saint-Étienne-des-Grès, il y a de ça plusieurs années déjà.

David Giguère aimerait également organiser des visites à la ferme, avec diverses animations comme des formations ou des « ciné-fermes» à la fin de l’été, en période d’abondance.

Agriculture écoresponsable

Soucieux de l’environnement, le jeune homme a comme vision de faire de l’agriculture écoresponsable qui tendra vers le biologique.

Il a d’ailleurs pris soin de mettre en valeur cette orientation dans le nom de son entreprise : Ferme Plume Verte. Ce nom s’avère également un clin d’œil à sa toute première incursion dans l’univers de l’entrepreneuriat agricole, à l’âge de 7 ans…