Cancer du sein : l’importance de la prévention, témoigne Suzane Jean

En rémission du cancer du sein qui l’a frappée de plein fouet il y a un an, Suzane Jean de Victoriaville se voit plutôt en mission pour sensibiliser, pour insister sur l’importance de la prévention et du dépistage. Pour, dit-elle, faire comprendre aux femmes d’arrêter d’avoir peur et de ne pas hésiter à consulter.

À l’occasion du mois d’octobre, le mois de la sensibilisation au cancer du sein, Suzane Jean a accepté de partager son expérience, accueillant chez elle le journaliste du www.lanouvelle.net, un an jour pour jour après l’annonce du terrible diagnostic. La Victoriavilloise ne ressentait aucun symptôme, n’éprouvait aucune douleur. « Je n’avais rien, mes seins étaient beaux, sans aucune bosse. Je n’avais aucun signe », raconte-t-elle.

Mme Jean s’est tout simplement présentée à son rendez-vous annuel pour la mammographie. Un rendez-vous d’ordinaire printanier, mais repoussé de quelques mois en raison de la COVID-19. C’est donc en plein été, en juillet, l’an passé, qu’elle a passé mammographie et échographie.

Puis arrive l’appel de son docteur. « J’ai une femme médecin extraordinaire, note-t-elle. Elle m’a appelée parce qu’elle avait un doute. Elle me référait à Québec pour une résonance magnétique et une biopsie. Elle m’a prévenue : que ça vous tente ou non, vous devez y aller. Je m’y suis rendue. »

Dans la semaine suivante, Suzane Jean était fixée sur son sort. « Mon médecin m’a dit : cette fois, on n’a pas de chance. J’ai entendu le grand mot (cancer). Je pense que je n’ai rien entendu de plus difficile », confie-t-elle. Il s’agit, lui a-t-on dit, d’un cancer sournois, le carcinome lobulaire. « Il ne se voit pas physiquement. Si je n’étais pas allée en prévention, je ne serais pas là aujourd’hui », mentionne-t-elle.

Dès lors, tout s’enclenche rapidement. On doit l’opérer dans un délai de 28 jours. Elle a été prise en main par « le bienveillant Dr Martin Rouillard », comme elle dit, et encouragée d’apprendre que ce type de cancer se traite bien. Malheureusement, le cancer, qui s’est d’abord attaqué au sein gauche, s’est faufilé jusque dans le sein droit. Mastectomie totale, l’ablation des deux seins a été nécessaire. L’intervention a été pratiquée à Québec. « La chirurgienne m’a expliqué ce qui allait se passer et ensuite ce fut la plasticienne parce qu’il fallait notamment choisir la grosseur des seins à reconstruire. Tout se fait au cours de la même intervention », explique Mme Jean alors âgée de 59 ans.

En ce temps de COVID-19, son conjoint n’a pu l’accompagner à l’intérieur des murs du centre hospitalier, devant se contenter d’attendre dans la voiture. L’hospitalisation a duré deux jours. Mais la procédure veut qu’on fasse des prélèvements sous le bras en vue d’une analyse qui mènera à une autre mauvaise nouvelle : cinq ganglions sont touchés. Trois semaines plus tard, elle rentre, une fois de plus, au bloc opératoire. Ainsi, toutes traces de cancer ont été enlevées au niveau des ganglions.

Tout n’allait cependant pas s’arrêter là. En présence de ce sournois cancer, on préférait la soumettre à des traitements de chimio et de radiothérapie : cinq mois de chimiothérapie, dont deux intensifs. 

Oui, il y a des effets secondaires, répond-elle, quand on la questionne sur le sujet. Une médication permet d’éviter les nausées et la diarrhée. « Ce qui a été extrêmement difficile, le perte des cheveux, des cils et des sourcils. Mon conjoint a été extraordinaire. Il m’a soutenue en se rasant la tête », raconte-t-elle. À un certain moment, après la chimiothérapie, une fatigue s’installe et le sommeil n’y peut rien. « J’étais bien et, pouf!, je tombais de fatigue. Ça ne partait pas avec un dodo. C’est le temps, et non le sommeil, qui nous régénère », signale-t-elle.

Puis trois semaines après la fin de la chimiothérapie, au tour de  la radiothérapie à Trois-Rivières tous les jours pendant trois semaines, traitement qui, pour elle, a été plus souffrant. À travers cette épreuve, elle a puisé dans son cœur, dans son être. « Je n’ai pas vraiment vécu de déni, à peine un jour ou deux. Mais je ne dis pas que j’ai accepté ce que je vivais, je l’ai accueilli. Ce mot, accueilli, ça sonne avec vie, avec vivre. Je trouvais cela plus doux. » Mais qu’on ne lui parle pas de « son cancer ». « Il ne m’appartient pas. Il est de passage. C’est une expérience que je vis », lance-t-elle.

S’accrocher

Suzane Jean, contrairement à d’autres, n’a pas vécu de sentiment de colère. Elle a plutôt accueilli cette expérience qui se présentait. Avec espoir. « Je me suis connectée à la science, à la recherche et à ces magnifiques médecins. J’en ai eu sept du début à la fin. Ils ont fait équipe pour me préserver, pour me sauver la vie », exprime-t-elle.

« Je suis une fille qui a la foi, renchérit-elle. J’ai la foi en la médecine, la foi en moi, à ma force de vivre. Je voulais rester vivante et continuer à aimer mon chum, mes proches, ma famille. C’était mon moteur. »

Mme Jean se considère choyée aussi d’avoir pu compter sur son entourage. « J’ai été très bien accompagnée. Mon chum, très présent, continuait à travailler tous les jours, mais il arrivait rapidement quand j’en avais besoin. Il le faisait avec une bienveillance et un amour sans borne. Ma famille aussi m’a portée, m’a aimée. Et j’ai aussi la chance d’avoir des voisins aimants », observe-t-elle.

Rémission

Suzane Jean a terminé son dernier traitement de radiothérapie le 31 mai. Les plus récents examens lui ont appris qu’il n’y avait plus aucune trace de cancer. « Dr Rouillard m’a demandé : vous faites quoi, madame Jean? Bien, je vis. Il m’a répondu : eh bien, continuez à vivre. » Oui, c’est ce qu’elle fait. Elle envisage, après avoir repris des forces, reprendre son boulot de dame de compagnie quelque part en 2022, peut-être à l’automne.

Mais surtout, cette mission qui lui tient à cœur, sensibiliser les femmes à l’importance de la prévention, les encourager aussi, inviter celles qui sont aux prises avec la maladie « à s’accrocher aux gagnantes » tout en sachant que certaines malheureusement ne survivront pas.

Aujourd’hui, tellement reconnaissante, Suzane Jean, tous les matins, au réveil, dit merci à la vie. « Merci de me permettre de vivre cette journée qui m’attend pour profiter de chaque instant. Et le soir, en me couchant, je demande d’avoir la chance de m’éveiller pour vivre une autre journée. »

Suzane Jean souhaite aussi donner au suivant. Et c’est déjà commencé d’ailleurs. Elle a d’ailleurs amassé des fonds et participé à une récente marche à Trois-Rivières au profit de la Société canadienne du cancer.

L’an prochain, elle mijote un projet pour amasser des sous pour le service d’oncologie de l’Hôtel-Dieu d’Arthabaska. « J’aimerais faire quelque chose de gros. Ce n’est rien comparativement à tout ce que j’ai reçu de soins, de bienveillance et d’amour », souligne-t-elle.

« J’aimerais aussi, poursuit-elle, agir comme bénévole en oncologie, soutenir, accompagner des gens qui n’ont pas cette chance de l’être », conclut-elle. Suzane Jean adresse aussi ses remerciements à la Ville de Victoriaville qui a accepté d’illuminer son centre-ville en rose au cours de la première semaine d’octobre et l’hôtel de ville jusqu’au 21 pour souligner ce mois de sensibilisation à la cause.