Pénurie de main-d’oeuvre : la CDEVR en action

Le phénomène de la rareté de la main-d’oeuvre ne date pas d’hier. Les intervenants du milieu, comme la Corporation de développement économique de Victoriaville et sa région (CDEVR), s’y attardent, bien sûr, afin d’aider les entreprises à combler leurs besoins.

Plusieurs facteurs expliquent cette difficulté qu’éprouvent bien des entreprises à recruter des travailleurs. «Les corporations de développement économique travaillent à la croissance et au développement des entreprises. Il faut donc que la progression de la population puisse suivre pour répondre à ces emplois, ce qui n’est pas toujours le cas nécessairement»,  indique Andrée-Anne Perreault, coordonnatrice au développement industriel à la CDEVR.

Le départ des baby-boomers a aussi laissé des postes vacants, sans compter la mentalité qui, aujourd’hui, est tout autre. «Auparavant, bien des gens conservaient leur emploi et faisaient la même chose toute leur vie. On n’en est plus là aujourd’hui, souligne la coordonnatrice. On veut tous le meilleur pour nous et on essaie de progresser. Des emplois au salaire minimum toute une vie n’intéressent plus personne.»

Ainsi, le modèle d’affaires est à revoir, estime Andrée-Anne Perreault. «On tente de faire comprendre aux entreprises que des postes au salaire de 15 $ l’heure seront difficiles à combler», note-t-elle en citant l’exemple de Cascades qui emploie quelque 1200 personnes dans la région.

«Cascades a beaucoup d’emplois en usine et réussit à combler ses postes. Pourquoi? Parce qu’elle offre des salaires et des conditions.»

Ces deux éléments revêtent une grande importance. «Le salaire est un point important, mais les conditions de travail le sont aussi. Quand tu n’as pas les deux, ça ne marche pas», signale-t-elle.

Pour aider au recrutement de personnel, la CDEVR se tourne notamment vers l’international. Malgré la pandémie, les missions se sont poursuivies, mais en mode virtuel. La Corporation travaille aussi à attirer des gens provenant d’autres régions, en situation d’immigration ou non. «À ce chapitre, on agit avec des organismes partenaires. Ça fonctionne bien jusqu’ici. On a le plus haut taux de succès en 2021 que ce qu’on n’a jamais eu dans les années passées», note la coordonnatrice au développement industriel.

Une campagne d’attraction se dessine à la CDEVR, un projet sur environ 10 mois comportant la réalisation de vidéos démontrant la capacité d’accueil et d’intégration des gens. «C’est bien beau faire de l’attraction, mais si tu ne travailles pas sur la rétention par la suite, cela pose problème. C’est l’enjeu, les gens repartent. On réussit à les faire venir, mais ils quittent deux ans plus tard», fait remarquer Mme Perreault.

À cet effet, un projet se déploiera au Centre-du-Québec. Dans chacune des MRC, un organisme se verra confier le mandat de «gérer le après 17 h». «Prévoir des activités pour tous les gens qui arrivent afin de créer un sentiment d’appartenance dans la communauté et faire en sorte qu’ils s’y intègrent bien», fait-elle valoir.

La MRC d’Arthabaska planche, elle aussi, sur un contenu visuel s’adressant à un public plus large visant à favoriser la qualité de vie. Pour attirer une main-d’œuvre, encore faut-il, observe la coordonnatrice, avoir un toit pour loger les gens. Or, la région, comme d’autres, vit une crise du logement. «Il y a une pénurie actuellement. C’est hallucinant. Tellement que certains industriels s’accaparent de baux au nom de leur compagnie afin de pouvoir loger des employés», signale-t-elle.

Andrée-Anne Perreault précise d’ailleurs qu’une table, réunissant différents intervenants, a justement été mise en place à Victoriaville afin d’analyser la situation et de trouver une solution à ce problème. La CDEVR envisage aussi, dit-elle, de tenter un projet avec la France dans le but d’y recruter des gens.

Mouvance observée

La rareté de la main-d’œuvre et la crise sanitaire n’ont pas mené, heureusement, à des fermetures dans le monde industriel de la région. «La pandémie a plutôt créé une certaine mouvance entre les régions et les grands centres. Le temps d’arrêt, je pense, a permis à plusieurs une remise en perspective de la qualité de vie», souligne Mme Perreault, tout en observant la venue en région de plusieurs Montréalais.

«Un important entrepreneur, à Drummondville, me confiait n’avoir jamais vendu autant de résidences à des gens de Montréal. Je suis convaincue que la Métropole perd des plumes aux dépens des régions parce qu’on se rend compte des modèles d’affaires différents et de la qualité de vie», note-t-elle.

Interrogée sur les secteurs particulièrement touchés par la difficulté de recrutement, Andrée-Anne Perreault pointe le domaine de la soudure. «La pénurie chez les soudeurs est particulièrement difficile. Il s’agit pour nous d’un important cheval de bataille», assure-t-elle, précisant du même souffle que le problème, dans le secteur commercial, affecte grandement la restauration.

Quant à la formation et aux besoins en ce sens, la coordonnatrice au développement industriel à la CDEVR se réjouit de la récente naissance de l’organisme La FaculT. «Ça vient répondre à un besoin. Et avec ce qu’on vient de vivre, on voit que la formation à distance, ça fonctionne», constate-t-elle.

Enfin, Andrée-Anne Perreault tient à rappeler que la CDEVR, pour tous les besoins en entreprise, se retrouve «au centre de la plaque tournante du développement économique». «Que ce soit, par exemple, pour les besoins d’achat d’équipements, de confection de site Web ou encore un fonds de roulement pour le démarrage d’entreprise. Les gens ne se doutent pas à quel point la Corpo peut répondre aux besoins actuels. On répond aux besoins ponctuels. Les gens peuvent nous contacter, mais on constate qu’ils n’ont pas encore assez développé ce réflexe d’appeler à la CDEVR», conclut-elle.