Coupable, Alex Bellemare n’évitera pas la prison

Le Plessisvillois, Alex Bellemare, 25 ans, sur qui pesaient 24 chefs d’accusation, a plaidé coupable, jeudi matin, en lien avec une affaire de leurre, de pornographie juvénile et de voyeurisme. Si la juge Dominique Slater, qui a pris la décision en délibéré, accepte la suggestion commune de la poursuite et de la défense, le jeune homme écopera de 14 mois de prison le 29 juin.

Alex Bellemare a été arrêté le 19 février 2019 pour des événements survenus entre le 1er octobre 2015 et le 1er décembre 2018 et impliquant plus d’une vingtaine de victimes, dont certaines d’âge mineur.

L’audience a pris son envol par l’enregistrement des plaidoyers de culpabilité à trois chefs d’accusation amendés pour y inclure, à l’intérieur de deux des chefs, le nom de plusieurs plaignantes.

L’accusé a reconnu sa culpabilité aux accusations d’avoir eu en sa possession de la pornographie juvénile, d’avoir communiqué par un moyen de télécommunication avec des personnes âgées de moins de 18 ans en vue de faciliter la perpétration d’infractions en matière sexuelle et d’avoir produit subrepticement un enregistrement visuel de différentes personnes se trouvant dans des circonstances pour lesquelles il existait une atteinte raisonnable à la vie privée.

Le représentant du ministère public, Me Jean-Philippe Garneau (Photo www.lanouvelle.net – Archives)

Par la suite, le procureur aux poursuites criminelles et pénales, Me Jean-Philippe Garneau, a exposé les faits. Une ordonnance interdit cependant de publier toute information pouvant permettre d’identifier les victimes.

Une clé USB, remise à la police, contenait des vidéos de nature sexuelle et des photos. «Munis d’un mandat de perquisition pour fouiller la clé, les policiers ont découvert des vidéos et photos sur lesquelles on voyait la plaignante et plusieurs autres personnes. On pouvait déceler qu’une caméra avait été cachée», a-t-il  relaté.

En continuant de creuser, les policiers ont trouvé de nombreuses autres photos à caractère sexuel. «Des plaignantes que les enquêteurs ont pu retracer, et selon ce qu’elles racontent, c’est pratiquement toujours le même  modus operandi. L’accusé entre en contact avec elles par le biais des réseaux sociaux, commence à leur faire des avances et à demander des photos d’elles nues, dans diverses positions tout en les complimentant», a indiqué Me Garneau.

Mais les plaignantes, chaque fois, mettent Alex Bellemare en garde de ne pas conserver ces images. «L’accusé leur répond de ne pas s’en faire, qu’il efface tout. Il utilise Snapchat, une application faisant en sorte que le message s’efface une fois visionné. Par contre, ce que Monsieur faisait, c’est que, avec une autre application, il en conservait des copies sur une clé USB pour un usage personnel. Il faisait donc croire aux victimes qu’il allait seulement regarder et qu’il allait effacer les copies», a fait savoir le représentant du ministère public, précisant qu’aucun cas d’agression sexuelle n’est survenu. «Rien ne démontre non plus qu’il aurait cherché à diffuser ces images d’une quelconque façon. Ça semble être pour son usage personnel», a-t-il noté, en terminé sa narration des faits.

«Mon amour propre et ma dignité ont été violés»

Une plaignante a témoigné par écrit des conséquences subies par les gestes posés par Alex Bellemare. C’est Me Garneau qui en a fait la lecture.

«Les actes portés à mon égard (…) ont éteint quelque chose en moi, écrit-elle, d’emblée. Une partie de moi s’est envolée (…) J’ai toujours été une femme pétillante de joie et fonceuse dans la vie. Les mois suivants (…) ma joie contagieuse s’est transformée en noirceur.»

La plaignante fait mention de nombreuses nuits blanches, de cauchemars, d’antidépresseurs pour contrôler «tous les torts psychologiques». «Non seulement j’ai dû trouver la force de dénoncer, mais j’ai dû affronter les paroles et les regards des gens autour de moi, souligne-t-elle. Je n’ai peut-être pas été abusée physiquement par cet homme, mais mon amour propre et ma dignité ont été violés. La douleur et le sentiment d’être salie sont présents. La femme ne devrait pas se sentir comme un objet.»

Dans son écrit, elle souligne que l’accusé a fait preuve «d’un manque énorme de jugement et de respect envers plusieurs femmes».

Depuis trois ans, elle attend que justice soit rendue. «Trois ans à me demander quand tout cela sera fini, enfin. Trois ans, c’est long quand tu as cette rage au ventre.»

À Alex Bellemare, elle a livré ce message : «Toi qui a osé te servir des femmes pour alimenter tes envies, j’espère que tu apprendras le respect de la femme, que celle-ci est un être humain et non un objet, et que le consentement est mutuel».

Le cheminement de l’accusé

Me Jean-Philippe Anctil en défense
(Photo www.lanouvelle.net – Archives)

En défense, Alex Bellemare a tenu à s’exprimer, à faire part des démarches entreprises et à présenter ses excuses.

D’entrée de jeu, le Plessisvillois a confié qu’à la suite des événements, il a énormément travaillé sur lui, a entrepris des démarches auprès d’un sexologue qu’il a vu à 21 occasions. «J’ai réalisé l’ampleur de ce que j’avais fait. J’ai remonté la pente graduellement avec l’aide de mes proches et de mes amis qui ne m’ont pas laissé tomber», a-t-il témoigné, avouant avoir vécu des moments «très durs». «J’en ai vu de toutes les couleurs. Passer pour un prédateur et un pédophile, c’est quelque chose que je ne souhaite à personne, surtout en sachant que je n’en suis pas un. Pas une journée où je n’ai pas pensé à tout ça, à revenir dans le passé sans cesse pour comprendre ce qu’il s’est passé et apprendre de mes erreurs. J’en ai plus appris sur moi en deux ans que durant toute ma vie», a-t-il exprimé, avant de présenter ses excuses. «J’aimerais m’excuser du plus profond de mon cœur à vous, les filles, d’avoir brisé la confiance que vous aviez en moi, d’avoir brisé aussi votre intimité. Je n’ai jamais voulu faire de mal à personne. J’espère de tout cœur que vous allez bien, que vous êtes heureuses (…) J’espère qu’un jour vous allez me pardonner», a-t-il mentionné, estimant avoir appris de ses erreurs et être de retour sur le droit chemin.

Les représentations sur la peine

Les procureurs de la poursuite et de la défense ont convenu d’une suggestion commune, celle d’une peine de 14 mois d’emprisonnement, plus élevée, donc, que la peine minimale de 12 mois pour certains chefs d’accusation.

«Monsieur semble avoir cheminé. Ce n’est pas la plus haute sentence, mais elle n’est pas déraisonnable, a fait valoir Me Garneau. On a affaire à quelqu’un qui, somme toute, est réhabilité ou en voie de l’être. Mais la peine se doit d’excéder la sentence minimale en raison du nombre de victimes.»

Les parties proposent aussi une période de probation de deux ans au cours de laquelle il lui sera interdit de communiquer avec les plaignantes.

Son nom devra également figurer à vie au registre national des délinquants sexuels, en plus de fournir un échantillon de substance corporelle aux fins d’analyse génétique (ADN).

On s’attend, de plus, à ce qu’il ne puisse, durant la probation, contacter des personnes de moins de 16 ans, sauf sous supervision, et se trouver dans des lieux publics, parcs, écoles, garderies, centres communautaires pouvant être fréquentés par des enfants de moins de 16 ans.

La juge Slater rendra sa décision le 29 juin, accédant ainsi à la demande de Me Anctil pour faciliter la transition des opérations de l’entreprise de son client, Alex Bellemare étant copropriétaire d’une entreprise de chasse et pêche avec son père.

C’est aussi ce qui explique que, dans une condition à être imposée, le Plessisvillois devrait se voir interdire de posséder des armes (pour usage personnel), sauf pour le travail.