Agressions sexuelles : la sexologue Élise Bourque met en cause la pornographie

Parmi les différents facteurs qui peuvent expliquer pourquoi un homme va commettre des agressions sexuelles, la sexologue Élise Bourque identifie la pornographie.

«Il ne faut pas oublier que les jeunes garçons d’aujourd’hui et même les plus vieux vont beaucoup s’informer avec la pornographie. Je ne dis pas que la cause de tout ça, c’est la pornographie, mais disons que cela n’aide pas. On y traite les femmes comme des objets sexuels. Si c’est ça ta conception des rapports homme-femme, ça part mal!», explique la sexologue qui pratique depuis 22 ans.

«Dans la pornographie, il y a très peu de sentiments et de respect. De façon générale, la pornographie s’adresse aux hommes. Donc, elle est faite pour leur plaire. Un moment donné, les gars ne font plus la différence entre la réalité et ce qu’il voit. Ça les amène à penser que la sexualité c’est quelque chose que l’on multiplie avec plusieurs filles. Plus tu en as, plus t’es hot! La pornographie a un impact sur la façon dont ils vont traiter les femmes. On peut s’amuser dans la vie, on peut avoir une vie sexuelle épanouie, mais il faut que l’on soit deux personnes consentantes», rappelle la détentrice d’un baccalauréat et d’une maîtrise clinique en sexologie de l’Université du Québec à Montréal.

De là, l’importance de l’éducation sexuelle à l’adolescence insiste-t-elle. «Oui ! Les sexologues, on le hurle depuis 40 ans. On s’oppose aux cours d’éducation sexuelle, car on pense que l’on va aller montrer aux jeunes comment faire des fellations. Comme il y a un vide, les jeunes se tournent vers la pornographie. Et qu’est-ce qu’on y montre? Que la femme est un objet sexuel et que l’homme peut en abuser. Un homme équilibré va faire la part des choses, mais si moindrement il y a des carences, peu d’éducation ou peu de modèles positifs, c’est problématique. Il y en a qui pense que c’est correct. En banalisant la pornographie, on banalise la sexualité et on banalise les rapports homme-femme. Ce n’est pas fait par des sexologues la pornographie. Ce n’est pas fait par des gens qui veulent éduquer, mais par des gens qui veulent exciter», explique la sexologue.

Également, l’accès à la pornographie en bas âge via Internet peut causer des dommages importants à un cerveau en plein développement. «En ayant accès à la pornographie trop tôt, on n’a pas le temps d’apprendre ce qu’est un rapport homme-femme sain. Si on n’a pas de beaux modèles devant soi, l’enfant va être influencé. J’ai une adolescente des services sociaux que je vois actuellement qui regarde de la pornographie depuis qu’elle a 7 ans. Elle est complètement contaminée par ça. Elle est très carencée. La jeune fille ne parle que de sexe, elle ne veut que du sexe. Elle s’est brainwashée», déplore-t-elle.

L’impact de la nouvelle vague de dénonciations

Le #MeToo deux provoque des réactions dans la pratique des sexologues comme Élise Bourque. «Dans les dernières semaines, il y a des hommes qui, se sentant coupables, veulent consulter. Par exemple, un homme m’a appelé en me mentionnant qu’il avait été dénoncé deux fois sur Facebook. Il m’a dit qu’il n’avait jamais violé personne tout en reconnaissant qu’il avait parfois trop insisté. Au téléphone, il pleurait. «Ma vie est finie, pouvez-vous me voir?», révèle la thérapeute qui va le rencontrer dans deux semaines.

«Je vais le faire parler. En pleurant, cela démontre qu’il y a une forme d’empathie. On peut faire quelque chose. Lors de nos rencontres, on va parler de consentement, de respect de soi et du respect de l’autre. Je vais l’amener à faire un cheminement par rapport à tout ça», souligne-t-elle en rappelant que les sexologues sont là pour aider. «Il n’y a pas de mal à demander de l’aide», conclut Élise Bourque.

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