COVID-19 : une solidarité à sens unique?

À l’attention de Carol Fillion

Président-directeur général du CIUSSS Mauricie-Centre-du-Québec

En réponse au point presse tenu le 27 avril 2020 à 15 h

C’est avec consternation et une profonde indignation que l’équipe syndicale de l’APTS Mauricie-Centre-du-Québec a pris connaissance hier du point de presse du CIUSSS Mauricie-Centre-du-Québec du 27 avril, qui faisait mention des motifs de propagation de la COVID-19 à l’intérieur de l’établissement ainsi que des articles journalistiques parus à ce sujet.

Les propos des représentants du CIUSSS Mauricie-Centre-du-Québec se centraient sur un seul motif de propagation de la COVID-19, soit la mauvaise utilisation des mesures de protection par ses salariés, accusant donc indirectement ces derniers d’être responsables de cette propagation. Quel manque d’intégrité de l’établissement! Bien que vous mentionnez ne pas chercher de coupable, par votre discours, vous favorisez la perception que les seules responsables sont vos personnes salariées.

L’APTS Mauricie-Centre-du-Québec, depuis le début de la crise, travaille de manière collaborative afin de trouver des solutions aux nombreux problèmes d’application que rencontre l’établissement à faire appliquer les directives du ministère et de l’INSPQ dans tous les points de service et dans toutes les équipes. Nous considérons que l’heure n’est pas à l’accusation.

Nous avons constaté hier que le CIUSSS semble se dégager de ses propres responsabilités en tournant le projecteur sur les salariés, l’APTS MCQ ne tolèrera pas que ceux-ci soient les boucs émissaires de l’ampleur de la crise en Mauricie-Centre-du-Québec. Doit-on rappeler à l’employeur ses responsabilités en matière de santé et de sécurité, notamment de «doter son établissement d’équipements, d’outils et de méthodes de travail sécuritaires et de s’assurer que le travailleur les utilise, de donner à ses travailleurs la formation nécessaire pour qu’ils travaillent de façon sécuritaire ainsi que de superviser le travail de ses employés et s’assurer que les normes de sécurité sont respectées». Doit-on rappeler que nous avons rapporté, depuis le 12 mars, de nombreuses lacunes de l’employeur en lien avec ces obligations.

Tel que le CIUSSS l’a souligné, l’utilisation de mesures de protection n’est pas toujours optimale. Cependant, il ne faudrait pas oublier que les conditions de travail des personnes salariées sont elles aussi loin d’être optimales, tout comme la coordination et la distribution du matériel dans les équipes. Une utilisation parfaite des mesures de protection par les personnes salariées dans ces conditions ne peut pas être raisonnablement attendue, malgré toute leur bonne volonté. Notamment pour les raisons suivantes :

La limite de deux masques de procédure par quart de travail;

La contingence des équipements de protection individuelle (ÉPI) et de désinfectants. Parfois, la non-disponibilité de ceux-ci dans certains points de services;

L’obligation pour les salariés de se déplacer en centre hospitalier afin de se procurer des ÉPI;

Le nombre de modifications des directives via des notes de services et des documents qui sont quotidiennement publiées et qui doivent être appliquées par les personnes salariées;

Les lieux physiquement non adaptés aux bonnes pratiques d’hygiène et de salubrité;

La difficulté voire l’impossibilité de maintenir la distanciation sociale dans plusieurs contextes de soins et de services;

Le manque de présence terrain des gestionnaires;

Le maintien de la mobilité de main-d’œuvre;

La lenteur de la diffusion et de la mise en place des consignes causée par vos enjeux organisationnels et de communication;

Le manque de mesures réellement adaptées aux différents milieux de travail. Parfois trop centralisée d’autres fois pas assez;

Le manque d’explications données aux salarié.e.s qui amène une confusion, une perte de sens et crée un sentiment de peur;

Nous croyons que ces éléments doivent être pris en compte et ne peuvent être ignorés. Nous avons, à de nombreuses reprises, demandé à l’employeur de mettre en place des directives parfois plus préventives que le minimum exigé par l’INSPQ avec comme objectif de mieux protéger la population. Par exemple, nous avons tenté de conscientiser la direction sur l’importance d’éliminer autant que possible les déplacements de salariés entre les différents lieux de travail. Nous constatons sur le terrain qu’il y a encore des déplacements qui pourraient contribuer à la propagation du virus. Le CIUSSS ne semble pas admettre cette réalité et s’y adresser actuellement.

Aujourd’hui, les personnes salariées sont pointées du doigt, mais nous tenons à rappeler qu’il serait réducteur de laisser croire qu’ils sont les seuls responsables. L’APTS Mauricie-Centre-du-Québec ne tolèrera pas qu’on casse du sucre sur le dos des personnes salariées alors que le problème est organisationnel. Nos membres tiennent à bout de bras le réseau de la santé, malgré toutes les imperfections du système.

Ils subissent les conséquences de la propagation de la COVID-19 et mettent en jeu leur santé et leur sécurité parce qu’ils ont à cœur les usagers du réseau de la santé et des services sociaux. Ils sont solidaires dans cette situation. Nous nous attendons du CIUSSS qu’il soit aussi solidaire qu’il le prétend. Qu’il rétablisse les faits. Il est de sa responsabilité de mettre en place les conditions afin de s’assurer que les services à la population soient dispensés de façon sécuritaire, et ce, peu importe les défis. Est-ce qu’il prendra ses responsabilités?

Exécutif local APTS Mauricie-Centre-du-Québec