Séquestration : lourde peine imposée à deux accusés

Rushawn Smith et Mandy Tropia, deux des cinq individus reliés au braquage d’un duplex avec séquestration sur la rue de l’Académie à Victoriaville, séjourneront un bon moment au pénitencier. Entérinant une suggestion commune, le juge Bruno Langelier de la Cour du Québec les a condamnés, mercredi, à six ans de pénitencier.

En matinée, l’avocat Me Guy Boisvert, représentant les deux individus, avait fait part de leur intention de disposer de leur dossier, ce qu’ils ont fait en milieu de journée.

Smith, sur le point d’avoir 20 ans, et Tropia, âgé de 19 ans, ont tous deux reconnu leur culpabilité à des accusations de vol qualifié avec utilisation d’une arme à feu à autorisation restreinte, soit un pistolet.

Me Boisvert a précisé, toutefois, que ce ne sont pas ses clients qui en avaient possession, mais ils en connaissaient l’existence.

Ils ont aussi plaidé coupable à des accusations de séquestration et d’introduction par effraction dans une maison d’habitation et d’y avoir commis des voies de fait causant des lésions.

Me Ann Marie Prince de la poursuite (Photo www.lanouvelle.net – Archives)

En début d’audience, réclamée par la procureure aux poursuites criminelles et pénales, Me Ann Marie Prince, le magistrat a prononcé une ordonnance de non-publication interdisant de révéler des faits pouvant identifier les victimes, les témoins, de même l’adresse exacte (le numéro civique) des plaignantes.

Les accusés, s’exprimant en anglais, une interprète de Montréal s’est chargée de leur traduire tout ce qui se disait en français.

Les faits

La représentante du ministère public a exposé les faits survenus vers 2 h 40 dans la nuit du 26 novembre dernier.

«Les accusés, provenant de l’Ontario, sont arrivés la veille à Victoriaville et ont rencontré les trois autres coaccusés (Angel Alavarez-Martel, André-Patrick Allen et Jean-Paul Kewa Mutombo). La conjointe de l’un d’eux les a hébergés», a relaté Me Ann Marie Prince.

Un coaccusé, par ailleurs, aurait loué d’un individu le véhicule de fuite, un Ford Escape, à bord duquel quatre individus (sauf Mutombo) se sont rendus au duplex de la rue de l’Académie.

«Ils avaient des cagoules, des gants, du ruban. L’un des malfaiteurs avait une arme à feu. En arrivant sur les lieux, Smith et Tropia se sont occupés du logement du rez-de-chaussée alors que les deux autres ont monté à l’étage», a fait savoir Me Prince.

Les entrées de force dans les logements seraient survenues presque simultanément. Après avoir ligoté la locataire, Smith et Tropia ont rejoint les autres dans le logement au deuxième étage.

La résidente, elle aussi, s’est fait attacher mains et pieds et apposé un ruban sur la bouche. Celui qui possédait l’arme l’aurait placée près de la tempe de la dame. Le petit chien, qui aboyait, a été abattu par le bandit qui, selon la procureure, aurait, de nouveau, placé l’arme sur la tempe de la sexagénaire.

Les malfaiteurs auraient aussi entendu la locataire du rez-de-chaussée sortir de son logement. «Elle a réussi à composer le 9-1-1, mais Rushawn Smith est redescendu pour lui arracher le téléphone et la ramener à l’intérieur», a indiqué la procureure de la poursuite.

Les policiers sont rapidement intervenus, localisant les individus dans le secteur. Mandy Tropia avait pris place sur la banquette arrière du véhicule au moment de son arrestation. Rushawn Smith, lui, a été épinglé alors qu’il courait. Il portait toujours une cagoule sur la tête.

Angel Alvarez Martel, pour sa part, a été arrêté à proximité de l’immeuble, tandis qu’André-Patrick Allen a été mis en état d’arrestation un peu plus loin.

«Smith et Tropia ont offert la meilleure collaboration. Ils ont confessé aux policiers leurs crimes et comment cela s’est produit. C’est conforme au récit des faits. Rien de valeur n’a été dérobé», a souligné Me Prince.

Aux questions du juge Langelier, la procureure aux poursuites criminelles et pénales a confié que les deux victimes, deux dames âgées dans la soixantaine, vivaient seules, et que la séquestration a duré entre 5 et 10 minutes.

«Pourquoi cet endroit a été ciblé?», a demandé le président du Tribunal. À cela, Me Prince n’a pu répondre, ne disposant pas vraiment d’information sur les motifs.

Des séquelles importantes

Les deux victimes, dans une déclaration, ont fait état des graves traumatismes subis et d’un sentiment d’incompréhension. «Pourquoi moi? Qui a organisé tout ça? J’aurai de la difficulté à guérir si je n’ai pas la réponse», a noté le juge en soulevant certains passages.

Une victime signale qu’aucune peine ne réparera le mal subi, ajoutant qu’elle devra vivre «dans sa propre prison intérieure».

Insomnie, hypervigilance, peur de la noirceur, les conséquences psychologiques sont importantes. L’une des deux victimes, d’ailleurs, a dû déménager, se disant incapable de réintégrer son domicile.

La peine

La suggestion d’une peine de six ans de pénitencier se situe, a fait valoir Me Prince, au bas de la fourchette des peines qu’on retrouve dans la jurisprudence et qui se situent entre 6 et 13 ans d’emprisonnement.

«Il s’agit, ici, de l’un des crimes les plus graves commis envers deux victimes très vulnérables. Mais on devait tenir compte aussi des facteurs atténuants : l’âge des accusés, l’absence d’antécédents judiciaires, leur collaboration avec les policiers et leur rapide plaidoyer de culpabilité qui évite aux victimes de devoir témoigner. La suggestion m’apparaît raisonnable et adéquate», a-t-elle exprimé.

Me Guy Boisvert représente les deux accusés. (Photo ww.lanouvelle.net – Archives)

En défense, Me Guy Boisvert a précisé que ses clients auraient espéré voir tomber certains chefs. «Ils ont évalué la possibilité d’une défense de contrainte puisqu’ils sont les plus jeunes. Ils ne savaient pas dans quoi ils s’embarquaient, mais ils reconnaissent leur responsabilité. La sentence  est plus que raisonnable dans les circonstances», a-t-il commenté.

À la peine de six ans (72 mois), le juge a retranché la détention provisoire de quatre mois et huit jours. Ainsi, les deux jeunes individus ont à purger une peine de 67 mois et 22 jours.

«Votre jeune âge et l’absence d’antécédent laissent place à l’espoir que vous puissiez vous réhabiliter», leur a dit le magistrat après l’imposition de la peine.

Outre la détention, les individus devront fournir leur ADN. Il leur sera aussi interdit de posséder des armes pour une période de 10 ans. Ils ne pourront pas non plus communiquer avec les autres coaccusés.

L’un d’eux, Angel Alavarez Martel, qui devait subir son enquête sur remise en liberté aujourd’hui (mercredi), a vu la procédure être reportée au 16 mars.

Quant à Allen et Mutombo, ils reviennent devant la justice, vendredi.