Une oeuvre remplie de sens

Il y a quelques semaines, on a procédé, à Val-d’Or, au dévoilement d’une œuvre commémorative, intitulée «KIKISOKITE8EK8AK» et réalisée par la Victoriavilloise Chantal Simard.

L’artiste a expliqué, en entrevue téléphonique, qu’elle allait régulièrement dans la municipalité abitibienne, où demeurent son père biologique et ses sœurs. «J’ai des contacts au centre autochtone et j’avais énoncé ma disponibilité si jamais il y avait des projets», a-t-elle indiqué.

C’est ainsi qu’on lui a fait parvenir l’appel de projet auquel elle a répondu. Finalement, il lui a été attribué ce qui lui a permis de réaliser son œuvre, la plus imposante jusqu’à maintenant.

Le monument veut rendre hommage aux 12 femmes autochtones dénonciatrices de cas d’abus par des policiers, ce qui a mené à la Commission Viens. Il est installé au site culturel Kinawit. Il lui aura fallu travailler près d’une année et faire de nombreux aller-retour à Val-d’Or pour réaliser l’œuvre. «Je voulais faire participer la communauté. J’ai organisé, entre autres, un atelier de bâtons de parole en rapport avec la dénonciation des femmes. Après, j’ai ramassé les bâtons et j’en ai fait des moules, coulés en bronze. Ils ont été incorporés à l’œuvre», a-t-elle raconté.

L’ensemble de la sculpture, faite d’aluminium et de béton (pour la base), a été réalisé à Victoriaville. On y retrouve les quatre directions (la base de la philosophie des Premières Nations dira Chantal), ce qui ramène au cycle de vie, et est formée de quatre profils de femmes autochtones représentant autant de points cardinaux : une jeune (l’est), une adolescente (le sud), une femme mature (l’ouest) et une aînée (le nord). «Toujours en lien avec les femmes disparues et assassinées, un des profils représente Cindy Ruperthouse, le symbole de ces femmes pour lui rendre hommage en même temps», a-t-elle ajouté.

Quant au titre, «KIKISOKITE8EK8AK», c’est un mot algonquin qui signifie «Elles ont eu du courage». La base en béton, représente le tambour ou par le cercle avec des sentiers tout autour, où on retrouve les herbes sacrées utilisées pour les cérémonies : le tabac, le cèdre, le foin d’odeur et la sauge. «Ces femmes continuent, par leurs reflets, de projeter leurs danses de paroles et d’ainsi poursuivre cette mission de courage. Jour après jour, ce cercle de femmes en mouvement rappelle que nos générations sont liées entre elles et que nos ancêtres restent présents et bien vivants», peut-on lire sur le panneau explicatif.

Chantal Simard a mis beaucoup de travail dans cette œuvre. Elle a  l’intention de recommencer la création cet hiver dans ce créneau bien particulier, toujours en lien avec les nations autochtones. «C’est dommage que lorsqu’on a un créneau particulier, on soit contraint à travailler à l’étranger», déplore-t-elle en ajoutant qu’à Victoriaville justement, il y aurait avantage à mettre en place des projets rappelant la présence des Abénaquis sur le territoire. «Quelque chose de plus significatif que de nommer un parc. Une œuvre culturelle fait partie d’un patrimoine, d’une histoire et nécessite des recherches», a-t-elle indiqué.