Médias régionaux : loin du paradis, mais toujours vivants

Les entreprises médiatiques vivent des transformations profondes, engendrées en partie par le déplacement des revenus publicitaires vers les géants du numérique. Marc-Noël Ouellette, copropriétaire d’icimédias, qui compte 21 hebdomadaires, dont La Nouvelle Union et L’Avenir de L’Érable, indique que même si tout n’est pas rose dans le secteur, les journaux locaux demeurent indispensables.

«Ce que l’on déplore, c’est que même des institutions publiques, des municipalités, des MRC et la province transfèrent une trop grande proportion de leurs dépenses publicitaires vers des organisations qui ne paient ni impôts ni taxes au Canada», commence-t-il.

Une fois ce constat émis, il rappelle le rôle crucial des hebdos régionaux. Selon lui, le désert journalistique, c’est-à-dire l’absence de journaliste soumis à un code de déontologie et affecté à une région donnée, pourrait s’avérer catastrophique. «S’il y a un accident de train, il y aura une couverture nationale. Mais sans la couverture régulière et quotidienne de ce qui se passe dans nos régions, cela crée un vide», de dire M. Ouellette. Un conflit entre deux entités, comme une municipalité et une commission scolaire, exemplifie-t-il, pourrait n’être connu que par la voie de communiqués diffusés sur les médias sociaux. Ainsi, impossible d’obtenir des détails impartiaux de l’affaire. «Le travail du journaliste est de défier, scruter et questionner. S’il ne se fait pas, nous avons accès à de l’information filtrée, mais pas à du journalisme», note-t-il.

Chez icimédias, l’identité visuelle des plateformes a été revue au cours des dernières années, les efforts ont été concentrés sur le contenu des journaux et l’on a décentralisé le processus décisionnel afin que la rédaction demeure à l’image des localités desservies. Le tout dans une vision quelque peu à contre-courant des manœuvres observées chez d’autres groupes de presse. Il n’en reste pas moins que les offres numériques constituent le nerf de la guerre. Une nouvelle version des sites web de ses hebdomadaires a aussi vu le jour à la fin de 2018. «Bientôt nous aurons de nouveaux produits. On veut diversifier nos offres et continuer à investir en rédaction», mentionne-t-il quant aux stratégies d’avenir de l’entreprise.

La réalisation de sondages auprès du lectorat représente également une façon de souligner la pertinence de ses publications. D’ailleurs, celui effectué dans la MRC d’Arthabaska en début d’année a révélé un intérêt marqué pour l’information diffusée dans La Nouvelle Union. «Ça montre que le rôle du journal et de son site web est fondamental pour la diffusion de l’information dans une région. Dans ce cas, il s’agissait de Victoriaville, mais on est convaincu que ce sera la même chose partout ailleurs. On voit un très haut degré de satisfaction du travail qui se fait dans nos journaux. Les gens s’y fient», expose M. Ouellette.

La Commission sur l’avenir des médias d’information s’amorcera le 26 août. Renel Bouchard, copropriétaire d’icimédias, sera l’un des trois représentants de l’association Hebdos Québec, qui déposera un mémoire. «Nous ferons valoir aux élus l’importance d’une presse de qualité et indépendante, en région spécialement», confirme Marc-Noël Ouellette.

Les 5 M $ accordés in extremis à Groupe Capitales Médias rassurent, d’une part, la direction d’icimédias, quoique le geste lui apparaisse inéquitable. On souhaite que, à la suite de la commission, le gouvernement s’assure que le programme mis en place s’avère juste et accessible à tous les médias écrits. «Le gouvernement ne pouvait faire autrement. Mais reste que le même groupe reçoit à nouveau tous les deniers publics», observe M. Ouellette.

Quant à sa propre entreprise, même si «ce n’est pas le paradis», l’homme d’affaires se dit satisfait de son évolution et confiant en l’avenir.