Cancer : et s’il pouvait être détecté en respirant dans une machine?

Une entreprise thetfordoise développe depuis 2017 un équipement qui pourrait permettre de détecter un cancer au stade précoce, avant même les premiers signes ou symptômes.

La méthodologie existe déjà pour des applications de recherche, mais l’objectif d’Yves Gamache, André Lamontagne et André Fortier de ASDevices est de rendre cette technologie accessible pour les bureaux médicaux et les pharmacies.

(Photo gracieuseté)

«Il y a quatre ans, j’ai mis la main sur certains articles dont les plus âgés dataient d’il y a une vingtaine d’années. Des gens qui œuvraient en recherche de diagnostic de cancer travaillaient à faire la corrélation avec les composés organiques volatiles (COV) que l’on expire et certains types de cancer. Aujourd’hui, on retrouve un équipement qui peut le faire, mais il vaut 500 000 $. C’est trop dispendieux pour le mettre dans un bureau de médecin», affirme Yves Gamache.

C’est en lisant ces articles que ce dernier a réalisé que son entreprise, qui n’évoluait pas dans le domaine médical, avait la technologie pour faire un appareil plus performant et beaucoup moins coûteux. Il prévoit que l’équipement devrait valoir environ 50 000 $ lorsqu’il sera prêt pour la commercialisation. «Il pourrait être disponible dans un bureau de médecin au moment d’un suivi annuel. Il suffit de mettre le masque et de respirer dedans, ça prend seulement cinq minutes», soutient l’entrepreneur.

L’air expiré des poumons contient une grande quantité d’informations permettant d’identifier des problèmes de santé comme les cancers, l’asthme, les ulcères et bien d’autres. «Par exemple, la détection de styrène indique la présence d’un cancer du foie alors que celle de toluène marque la présence d’un cancer de la prostate. À partir de ce constat, nous travaillons à l’élaboration d’un appareil qui permettra de détecter et d’identifier toute trace de cancer chez un être humain», explique le président d’ASDevices, André Lamontagne.

Deuxième phase

Le projet entame présentement sa deuxième phase qui vise à consolider l’intégration des différentes technologies nécessaires, soit incorporer un système de prétraitement d’échantillons, un système chromatographique et un système de mesure dans un seul et même appareil.

Si une grande partie des travaux s’effectue à Thetford Mines, des partenaires externes du monde médical sont également mis à contribution pour leurs connaissances plus approfondies dans ce domaine.

Yves Gamache estime qu’il faudra encore deux ans pour mener à terme ces travaux, mais il est persuadé que le résultat de ceux-ci révolutionnera le monde médical. «En plus de détecter la présence de cancer, notre appareil aidera également à désengorger le système de santé. Il permettra de sauver beaucoup de vies. Je trouve désolant de voir un paquet de mes amis qui sont morts de cancer parce qu’ils ont été détectés trop tard.»

L’intérêt étranger

Jusqu’à maintenant, ASDevices a investi plus de 3 millions $ dans différents projets. Déjà, plusieurs investisseurs étrangers ont manifesté leur intérêt pour la technologie de l’entreprise, mais les entrepreneurs préféreraient s’associer à des partenaires canadiens afin que l’expertise demeure ici. M. Gamache déplore toutefois qu’il n’y ait presque pas d’intérêt au Canada.

«Nous allons publier dans un grand magazine médical en Allemagne, l’article est en rédaction, mais chez nous, nous ne sommes pas connus. Nous avons reçu 12 Chinois récemment et nous en recevrons d’autres en août. Ce n’est pas compliqué, ils veulent tous nous acheter», dit-il.

Selon André Lamontagne, un pays comme la Chine est plus enclin à investir dans l’innovation. «Quand ce ne sont pas des projets qui vont rapporter des dividendes à court terme, c’est difficile d’avoir de l’aide ici, tandis qu’en Chine, ils vont donner de l’argent même en sachant que le retour pourrait prendre beaucoup de temps. Je crois que c’est une question de mentalité.»

Yves Gamache espère toutefois que la situation s’améliorera quant au financement de l’innovation. «Le fédéral est moins rigide que le provincial. J’espère que François Legault va terminer le ménage à Investissement Québec. Ce qu’ils font dans le cadre de leurs programmes pour ceux qui conviennent et qui peuvent rapporter rapidement, c’est merveilleux, mais quand il s’agit d’une startup, c’est difficile.»