Fermes : mieux prévenir les incendies avec un nouvel outil

La région a été particulièrement éprouvée cette année. Des incendies ont ravagé des bâtiments agricoles, causant non seulement des pertes importantes, mais aussi des traumatismes chez les familles et des impacts dans les communautés. La réduction des risques d’incendie passe certainement par la prévention, mais un nouvel outil peut aussi y contribuer.

La technologie, développée par Prevtech Innovations, une entreprise basée à Saint-Hyacinthe, permet de détecter les anomalies électriques et de générer des alertes en temps réel sur les téléphones intelligents des producteurs et ceux de leurs électriciens, aussi mis à contribution. L’électricité joue un grand rôle dans les incendies en milieu agricole. Le directeur du Service de sécurité incendie de Princeville, Christian Chartier, l’a maintes fois constaté. «Les installations électriques sont responsables de la plupart des feux», note-t-il.

Et ces incendies d’importance ont des répercussions dans le milieu. «Souvent, ce sont de vieux bâtiments qui brûlent. Et bien souvent, à la suite d’un incendie, les fermes ne sont pas reconstruites, souligne M. Chartier. D’où l’importance de sauver les bâtiments qu’on a. Il ne s’agit pas de sauver seulement un bâtiment, mais aussi le gagne-pain des personnes, de sauver le bétail. Aujourd’hui, les producteurs travaillent pendant des années pour obtenir une bonne génétique de troupeau.»

Tony Rodrigue en train d’expliquer son procédé. (Photo www.lanouvelle.net)

À Princeville, le Service de sécurité incendie, considérant l’importance du secteur agricole dans l’économie régionale, a décidé de passer à l’action après avoir, depuis quelques années, effectué de la sensibilisation. «Cette année, on a entrepris l’inspection des bâtiments agricoles au complet. On vérifie, bien sûr, l’électricité, mais aussi bien d’autres aspects. On vérifie l’ensemble du bâtiment», précise Christian Chartier, conscient des enjeux.

«Une ferme qui n’est pas rebâtie, la communauté s’en ressent. Cela représente des pertes de revenus de taxes municipales. Et ce n’est pas dit que le citoyen, après un incendie, ne décidera pas de s’en aller ailleurs», fait-il remarquer.

Le produit

L’entreprise a développé un procédé visant un secteur bien précis : les fermes avec animaux. «On ne fait que cela. On a conçu une technologie pour le monde agricole, car les solutions existantes ne touchaient véritablement que le secteur industriel. Nous avons développé et testé le système sur le terrain pendant 20 mois. Un système qui a obtenu sa certification CSA en janvier et que reconnaissent des compagnies d’assurance dont les clients peuvent bénéficier d’un rabais de 10% sur la valeur des bâtiments, des équipements et des animaux», indique le directeur du développement des affaires, Tony Rodrigue.

La compagnie a accouché du système qui, selon lui, correspond le mieux aux besoins. «Ce que nous voulions, c’était une solution simple avec installation rapide. En 10, 15 minutes, je peux informer le producteur sur le fonctionnement du système qui assure une surveillance en continu et qui détecte les anomalies. Les 20 mois de tests ont permis de déterminer les seuils, le moment pour lever le drapeau pour ce que soit valable concernant les défauts électriques et la détection de chaleur dans les panneaux électriques. Car s’il y a trop de fausses alarmes, les gens débrancheront le système et ne l’utiliseront pas», explique Tony Rodrigue.

À ce jour, le dispositif a été implanté dans quelque 150 établissements agricoles un peu partout au Québec, dont certains dans les MRC d’Arthabaska et de L’Érable. Des maîtres-électriciens en assurent l’installation. Le mécanisme fonctionne bien, assure M. Rodrigue. «Certaines anomalies ont été détectées dans tous les cas, sauf un. Des cas critiques, souligne M. Rodrigue, on en a décelé environ 90, des problèmes qui auraient pu dégénérer. Encore là, difficile de dire si cela aurait pu mener à un incendie.»

En fait, explique-t-il, dans 99% des cas, le système permet de sauver un appareil qui cessera de fonctionner. «Le producteur peut savoir à l’avance ce qui va lâcher et de prendre les mesures correctives. Dans plusieurs cas, on évitera simplement les désagréables conséquences d’un arrêt d’opération», précise Tony Rodrigue. Dans une infime proportion (1%), les astres peuvent s’aligner pour mener à un sinistre.

Et quand un feu éclate dans une ferme, bien souvent, ça ne pardonne pas. «Selon les assureurs, la réclamation moyenne pour l’incendie d’une ferme laitière s’élève à trois millions de dollars», précise M. Rodrigue. «Aujourd’hui, ce ne sont plus des fermes, mais de véritables industries. Maintenant plutôt que d’avoir 10 fermes dans un rang, on en a plus qu’une seule qui a acheté les autres», renchérit Christian Chartier.

Le chef pompier princevillois voit d’un bon œil la mise en marché d’une telle technologie, un outil de prévention qui constitue le nerf de la guerre. «Pas toujours facile d’évaluer l’impact de prévention. Mais depuis 2006, année de mon entrée en prévention, le nombre d’incendies a considérablement diminué», observe M. Chartier.

Rencontre d’information

Quelque part à l’automne, une fois les récoltes terminées, Tony Rodrigue et Christian Chartier souhaitent organiser, à l’intention des producteurs, une rencontre d’information pour leur expliquer le système.

«Quand une anomalie est signalée, un message texte ou un courriel est acheminé, non seulement au producteur, mais aussi à son électricien. Et nous aussi, nous y sommes pour surveiller. Ainsi, le client ne peut feindre l’ignorance, l’électricien non plus», mentionne M. Rodrigue.

On implique donc le client dans le processus. «Lui-même contribue à identifier le problème à la suite de l’alerte. Il devient ainsi difficile pour lui de ne pas prendre les mesures nécessaires pour corriger la situation», note-t-il Tony Rodrigue dit constater de plus en plus une réelle volonté du monde agricole de se doter d’un plan d’action afin de réduire les risques d’incendie.