La cloche a sonné, annonçant la retraite de Mme Pat

Le 18 juin à 12 h 30, la cloche a sonné la fin des classes et de la carrière en enseignement de Mme Pat (Patricia Lapointe).

Celle qui a enseigné les arts plastiques pendant 30 ans, majoritairement à l’École secondaire Monique-Proulx (sauf une année au Tandem de Victoriaville et une autre au primaire à Warwick), a donc décidé de passer à une autre étape de sa vie. Toutefois les arts et la création continueront d’être son carburant.

De ses années passées avec les jeunes, Mme Pat (elle se fait appeler comme ça depuis une vingtaine d’années, le «madame» inspirant le respect de l’enseignante et «Pat», un diminutif joyeux qui amène une proximité) a de nombreuses anecdotes, toutes plus sympathiques les unes que les autres. La voyant interagir avec ses élèves, tous sont d’accord pour dire qu’elle avait le don de les intéresser, d’aller chercher le meilleur chez eux.

De ses petits coucous, comme elle les appelle (parmi d’autres sobriquets), elle n’a que de beaux souvenirs. «J’aimais ça enseigner et j’avais l’avantage d’enseigner une matière que j’aimais aussi», insiste-t-elle. Dans sa classe, une carte du monde, un globe terrestre et toujours de la musique. La porte ouverte, tous se sentaient bienvenus là où elle n’hésitait pas à chanter l’opéra lorsque l’occasion se présentait. «Je n’ai jamais eu peur de me retrouver en perte de mes moyens devant un de mes élèves. Je connaissais ma matière.»

Mme Pat n’a jamais interdit les cellulaires dans ses cours. «C’est merveilleux en art d’avoir ces mini-ordinateurs. Quand je leur parlais de la toile «Guernica» de Picasso, ils allaient voir sur le téléphone et savaient rapidement de quoi je parlais On gagne du temps avec ça», appréciait-elle. Parfois, si un élève s’aventurait à envoyer un texto pendant les cours, Mme Pat allait le voir et lui disait simplement : «Tu ne voudrais pas que je te l’enlève, que j’aille voir tes courriels… Je ne te le dirai plus». Et c’était compris.

Elle savait établir des liens avec ses élèves, aller chercher le meilleur d’eux-mêmes, peu importe leur capacité ou condition. Et si en début d’année, elle se retrouvait avec des groupes avec plusieurs cas particuliers, elle parvenait à leur enseigner la matière. «Même chose pour mes petits coucous de cette année. La moitié aurait mieux aimé être en sports, mais ils ont fait la job», apprécie-t-elle.

Souvent, ce sont les élèves qui déterminaient les projets à faire en classe. Mme Pat leur donnait le choix. Jamais rien de prévu en début d’année, elle était toujours prête à s’adapter au groupe et à ses intérêts. Comme avec ce grand roux, avec des problèmes d’audition à qui elle a dit simplement : Tu dois être un Viking… Et c’était parti pour le thème de l’année. Le groupe a fabriqué des chapeaux de Viking, appris à dessiner les runes conçues des boucliers et appris beaucoup sur ce peuple et son mode de vie.

Avec ses «cocos» du secondaire 2 quelques minutes de son dernier cours comme professeure au secondaire

«Je ne refaisais jamais les mêmes projets d’année en année parce que ça m’ennuyait», confie-t-elle. Et dans sa classe, elle avait souvent une ou deux toiles qu’elle travaillait sous le regard des élèves lorsqu’il restait quelques minutes au cours. «Ils me demandaient de faire tel mélange de couleurs et voulaient que je continue», explique-t-elle.

Laisser décider les élèves, les écouter et leur faire confiance aura guidé l’enseignante dans toute sa carrière. Et cette petite phrase célèbre de l’école «faire le travail demandé dans le temps demandé», aura aussi été répétée de nombreuses fois dans sa classe. «J’étais en préretraite depuis trois ans (avec une charge de 84% tout de même). J’aurais pu quitter quand je voulais. Mais j’ai voulu boucler la boucle avec une belle cohorte. J’ai eu une année extraordinaire», a-t-elle exprimé.

En 30 ans, les adolescents ont changé, mais ils sont toujours intéressés. Il suffit, selon elle, de faire le lien avec eux. «Il y a davantage de cas diagnostiqués. Avant on n’avait pas ça. Il faut être capable d’évaluer les élèves, leur talent et leur effort», estime-t-elle. Maintenant retraitée, elle n’a pas l’intention de quitter pour autant l’enseignement. Pour commencer, elle va donner des cours privés de peinture et n’exclut pas l’idée de faire du remplacement. «Le ministre Legault a aussi dit vouloir investir dans le parascolaire. Moi, ça me tente», lance-t-elle. Cela lui permettra de garder le contact avec ces jeunes qui l’animent depuis longtemps. «Je réalise que j’ai toujours eu le miroir de l’adolescence devant moi. L’effervescence de la musique, de la mode, du premier voyage à New York, la remise des diplômes, le bal des finissants», énumère Mme Pat.

Elle va continuer de peindre, de faire de la couture (dont ses vêtements), des décors (dont ceux de la comédie musicale du Cégep de Victoriaville cette année) et bien d’autres choses encore.

«Je suis un modèle de 1957, se compare-t-elle. Pas un petit modèle sport, une familiale avec des barres en bois dans laquelle tu peux mettre huit enfants, un panier de pique-nique, un chevalet et un chien», lance-t-elle. À 62 ans, elle a toujours plein de projets artistiques et autres qu’elle veut réaliser et l’énergie nécessaire pour le faire.

C’est davantage le 23 août qu’elle commencera à se sentir à la retraite. Pour le moment, elle est en vacances d’été, comme depuis les 30 dernières années. Après, elle préparera sa participation au Chemin des artisans à l’automne et cette exposition prévue du 17 février au 20 mars 2020 au Cégep de Victoriaville.