Premier budget de la CAQ : en route pour 21,1 milliards de surplus sur six ans

Alors que le Québec fait face à des défis majeurs, notamment en termes de changements climatiques et de vieillissement de la population, le gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) choisit dans son premier budget de ne pas utiliser la marge de manœuvre importante dont il dispose pour répondre à ces défis et préfère consacrer des sommes colossales à la réduction du poids de la dette.

«Le budget d’aujourd’hui prévoit que les surplus cumulés d’ici 2023-2024 atteindront 21,1 milliards de dollars. Il semble que le gouvernement soit guidé par son obsession de rattraper le niveau d’endettement public de l’Ontario plutôt que de répondre aux besoins de la population ici et maintenant», affirme Guillaume Hébert, chercheur à l’IRIS.

Santé
Le budget du Québec 2019-2020 octroie 215 M $ pour l’ajout de personnel soignant. En campagne électorale, François Legault avait insisté sur l’importance de revoir la rémunération des médecins au Québec, affirmant qu’une telle renégociation lui offrirait une marge de manœuvre d’environ 1 G $ annuellement pour la réalisation de ses engagements électoraux. Force est de constater que cet enjeu est absent du budget.

«En évitant de toucher aux ententes-cadres avec les médecins, le gouvernement se prive d’un milliard de dollars qu’il pourrait dès maintenant injecter dans le système de santé pour aider à décharger l’ensemble du personnel. Revoir sans attendre la rémunération des médecins nous aurait permis de dépenser 5 fois plus pour du nouveau personnel soignant», indique Guillaume Hébert, chercheur à l’IRIS spécialisé notamment sur les enjeux de santé. Il ajoute que «le gouvernement a déjà reculé une première fois à l’automne en refusant de geler les augmentations prévues pour les médecins spécialistes. On apprend aujourd’hui qu’il se contentera d’attendre les résultats de l’étude commandée sur la question et pendant ce temps, la facture de la rémunération des médecins continuera d’augmenter».

Transport et environnement
«En matière de changements climatiques, le gouvernement a la responsabilité de donner un important coup de barre. Aujourd’hui, il nous présente des mesures cosmétiques plutôt que structurantes», indique Julia Posca, chercheure à l’IRIS. Elle ajoute que «par ailleurs, plusieurs des mesures proposées par le gouvernement pour protéger l’environnement et améliorer la gestion des matières résiduelles, bien qu’elles soient pertinentes, ne visent qu’à encourager de bonnes pratiques environnementales. Étant donné l’ampleur des défis climatiques actuels, il aurait été plus avisé de limiter certaines pratiques nuisibles pour l’environnement.»

Pénurie de main-d’œuvre
Le budget du Québec 2019-2020 alloue 146 M $ pour la mise en place d’un parcours d’immigration personnalisé et pour l’offre de services élargie en francisation et en intégration. «Les investissements pour l’accueil des personnes immigrantes sont pertinents, mais ils sont insuffisants», déplore Julia Posca, chercheure à l’IRIS. «Il est regrettable qu’aucune mesure ne soit mise de l’avant afin de lutter contre la discrimination à l’embauche qui affecte un grand nombre de personnes immigrantes. À cet effet, l’implantation de programmes d’accès à l’égalité en emploi dans les petites et moyennes entreprises aurait été avisée», soulève la chercheure qui se spécialise entre autres sur les enjeux d’inégalités.

Par ailleurs, il semble pertinent de miser sur la prolongation de carrière des personnes de 60 ans et plus étant donné le vieillissement de la population. «Le gouvernement va dans la bonne direction en injectant 113 M $ afin de prolonger la carrière des personnes de 60 ans et plus. Toutefois, les employeurs étant plus portés à embaucher des personnes plus jeunes, rien ne garantit que ces incitatifs seront efficaces», conclut madame Posca.