Retour du baseball à Montréal : quelle hypocrisie politique!

Quelle hypocrisie que cette motion de l’Assemblée nationale. «Pour toutes les interventions qu’on fait au ministère de l’Économie, on regarde le retour sur l’investissement, les répercussions sur les recettes fiscales et la création d’emplois.» «Le baseball devrait fonctionner selon les règles de l’entreprise privée.»

Je suis sur le fond d’accord avec ces énoncés. Mais quelle hypocrisie d’affirmer cela pour ce projet très médiatisé alors que couramment on applique l’opposé.

Cette théorie est-elle appliquée lorsqu’on met de l’argent à répétition dans une entreprise publique alors qu’une partie de cet argent est dilapidée en bonis de performance et que ladite performance est discutable? Est-ce plus justifié de mettre des millions dans l’industrie du taxi, une industrie dépassée, de subventionner un groupe d’entrepreneurs ou d’entreprises, et ce, à répétition? De subventionner des producteurs de cinéma, de festivals et leurs promoteurs qui sont fortunés dans plusieurs cas? Est-ce justifiable de subventionner un grand prix? A-t-on appliqué cela pour le Centre Vidéotron? Est-ce plus justifié de sauver un chantier maritime ou une industrie en déclin pour la xième fois. Je pourrais élaborer comme ça pendant longtemps…

Il est temps qu’on valorise les gens qui ont réussi et qui créent de la richesse au lieu de les dénigrer. On aurait dû faire une motion d’appuis et les féliciter de leur initiative tout en affirmant notre intention de collaborer à la réussite du projet.

Un groupe d’entrepreneurs fortunés, qui ont tous réussi avec éloquence dans leur domaine respectif, veut redonner à Montréal, au Québec, en investissant pour ramener une équipe de baseball. Ils sont prêts à prendre un risque énorme pour ramener le baseball à Montréal avec possibilité de rendement très faible, voire nul à mon avis, même dans un scénario optimiste, et ce, compte tenu des règles en place dans le baseball majeur et du risque au niveau de la devise. Un rendement aucunement comparable avec celui offert par leurs entreprises ou leurs placements, une décision de cœur et non de tête, de toute évidence.

Ceux-ci payent de généreux impôts personnels et corporatifs, sont impliqués au niveau caritatif en contribuant massivement à diverses causes et sans eux et les autres fortunés nous serions dans le pétrin et ne pourrions pas nous payer les services sociaux en place au Québec. On devrait donc les féliciter d’avoir encore le goût d’entreprendre au lieu de s’assoir sur leurs lauriers.

Pourquoi ne pas être fier de la réussite de notre élite et d’apprécier leur contribution au lieu de mettre tous les entrepreneurs dans le même bain à cause de quelques cas de corruption. Sans eux, il n’y aurait pas toutes ces fondations, ces services gratuits et autres. Leur contribution monétaire s’avère être des milliers de fois plus grandes que le faible pourcentage de notre population qu’ils représentent.

Moi, je suis fier des Bronfman, des Garber, des Bouchard et tous les autres. Ce sont des modèles pour moi, étant moi-même un entrepreneur à plus petite échelle et ayant bâti mon entreprise à partir de rien. Je suis aussi fier de ma contribution personnelle au fonctionnement de l’état québécois, même si la gestion de celui-ci n’est pas toujours efficace. Je suis un peu exaspéré d’entendre les gens dénigrer les «riches entrepreneurs».

À part quelques exceptions, les entrepreneurs payent de lourds impôts ici au Québec et contribuent de façon exceptionnelle au développement économique, même si, pour plusieurs d’entre eux, il était plus rentable d’opérer leurs entreprises ailleurs au Canada ou en Amérique, car c’est souvent plus avantageux au niveau fiscal entre autres.

Concernant le retour sur l’investissement pour les futurs actionnaires, on repassera. Par contre, le retour pour la ville et la province au niveau visibilité est énorme et n’ira pas dans les poches des investisseurs. Je suis convaincu que le retour serait titanesque, non pas pour les investisseurs, mais pour le tourisme, la visibilité de la ville et de la province. Nous n’avons qu’à penser à tout le développement immobilier qu’un stade apporterait, et ce, aux alentours du site choisi. Ceci étant dit, les retombées seront bien plus grandes au niveau public que pour les investisseurs eux-mêmes. Je me permets de poser la question, vous avez des millions à investir, les mettez-vous dans une équipe de baseball?

Poser la question, c’est y répondre. Nous avons la chance d’avoir un groupe d’amoureux du baseball assez fortuné pour prendre ce risque……alors pourquoi ne pas faciliter les choses. Je ne parle pas de tout leur donner, de subventions, je parle de faciliter les choses, d’être enthousiaste et positif.

Quel serait le problème à les aider à concrétiser ce projet quand on pense à toutes les retombées positives, ne serait-ce qu’en termes de visibilité, de publicité pour la ville de Montréal, entre autres. Je ne parle pas ici d’aide pour l’achat de la franchise ou du stade, mais je parle de faciliter les choses pour les infrastructures, le terrain. Par exemple céder la parcelle de terrain dont ils ont besoin en bas de la valeur marchande en tenant compte des retombées. Offrir un congé ou rabais de taxes pour le stade. Il faut saisir cette opportunité pendant qu’elle passe, car ça ne reviendra possiblement jamais compte tenu des coûts exorbitants pour obtenir une franchise en comparaison avec 2004 quand on a perdu notre équipe. Pour ma part, j’aime mieux aider les gens qui réussissent et qui livrent à répétition, plutôt qu’aider les gens qui ne livrent pas ou faillissent à répétition. Alors, au lieu de faire preuve d’opportunisme politique, faisons preuve d’imagination, de créativité et d’ouverture pour faciliter la réalisation de ce projet. Ceci serait explicable et justifiable à la population, car les gens comprennent le bon sens quand c’est bien expliqué avec les bonnes raisons et les bons arguments, sans partisanerie politique.

Pensez-y! À chaque bulletin sportif en Amérique du Nord, sur chaque site internet sportif, le nom de Montréal qui circule sur les fils de presse, une publicité qu’on n’aurait pas les moyens de se payer autrement, et ce, en priorité dans les bulletins sportifs aux États-Unis, car le baseball est le sport national et celui-ci occupe une place de choix par rapport au hockey par exemple. Imaginons tous les matchs télévisés avec la mention «Montréal» derrière le marbre. Avons-nous eu droit à la même publicité positive avec les autres investissements publics?

Nous avons la chance de nous réapproprier une équipe de baseball professionnelle. Il ne faut pas la manquer, surtout que le retour monétaire direct ou indirect sera, hors de tout doute, bien plus exceptionnel pour les divers paliers gouvernementaux que pour les investisseurs.

Cependant, il y a un bémol, on doit éliminer de l’équation l’idée d’une franchise partagée avec une autre ville. Pour que les gens s’identifient à l’équipe, elle doit être celle d’une ville, Montréal.

Il est maintenant temps de lancer une campagne de prévente d’abonnements de saison avec engagement de cinq ans minimum pour appuyer le groupe d’investisseurs et pour démontrer aux paliers de gouvernements et au baseball majeur l’intérêt des Québécois pour le retour d’une franchise à Montréal.

En terminant, je félicite les promoteurs de ce projet et merci pour vos réalisations et votre participation à l’essor du Québec. J’espère que j’en inciterai quelques-uns à sortir de l’ombre.

Éric Bernier

Entrepreneur

Victoriaville