Nouvel éclairage sur le secteur manufacturier

Au cours des dernières années, la Fédération des chambres de commerce du Québec a beaucoup insisté auprès des gouvernements du Québec et du Canada afin qu’ils apportent un appui tangible à l’innovation et aux investissements du secteur manufacturier. Où en sommes-nous aujourd’hui?

La firme québécoise E&B Data vient de rassembler des données intéressantes sur notre secteur manufacturier. Entre 2010 et 2014, alors que la croissance économique totale (PIB) du Québec s’établissait en moyenne à 1,5% par an, le secteur manufacturier québécois a mieux fait. Il a enregistré une hausse annuelle des ventes de 2,5% et une croissance des exportations de 6,1%. Pendant cette période, les investissements ont aussi augmenté de 14,2%. Sans être spectaculaire, c’est tout de même le signe d’un indiscutable dynamisme des entreprises québécoises. Cinq régions se sont particulièrement distinguées durant la période étudiée au chapitre des investissements manufacturiers : Montérégie, Montréal, Saguenay-Lac-Saint-Jean, Centre-du-Québec et Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine (grâce au projet de Ciment McInnis à Port-Daniel—Gascons). Il s’agit là de nouvelles encourageantes pour l’économie régionale.

Comme le secteur manufacturier est totalement ouvert à la concurrence internationale, l’investissement devient une condition essentielle à la compétitivité. Mais la nouvelle réalité économique du secteur fait en sorte que les investissements n’entraînent plus la création directe d’autant d’emplois, compte tenu des impératifs de productivité. Par exemple, durant la période 2000-2006, chaque million de dollars investis dans le secteur de la transformation alimentaire entraînait la création de 4,5 emplois. Le même million investi dans ce secteur entre 2007 et 2013 a soutenu la création directe de 2,3 emplois, deux fois moins. Le même phénomène est observé par E&B Data dans la fabrication de produits chimiques. Un million de dollars d’investissement y génère environ 0,4 emploi aujourd’hui, alors qu’il permettait de créer un emploi au début des années 2000.

Il y a cependant d’autres répercussions positives sur l’économie. D’abord, sans ces investissements, les emplois actuels disparaitraient rapidement. De plus, les salaires des employés du secteur manufacturier dépassent de près de 20% celui des autres travailleurs (moyenne de 48 000 $ par année vs 41 000 $), générant donc un meilleur bien-être économique pour un grand nombre de Québécois. Et surtout, l’activité d’une entreprise manufacturière génère de nombreux emplois autres chez les fournisseurs de biens et de services. La transformation de l’aluminium, par exemple, fait appel à 4164 fournisseurs, dont 863 au Saguenay-Lac-Saint-Jean. De nombreuses entreprises n’existeraient pas ou auraient un volume d’activités nettement réduit si elles ne pouvaient compter sur un ou plusieurs clients manufacturiers. C’est notamment le cas des équipementiers ainsi que des entreprises de services informatiques, de formation, d’ingénierie, de gestion des ressources humaines, d’environnement, de construction, de commerce international, de droit … C’est donc une large de l’économie qui bénéficie par ricochet de la vitalité manufacturière.

Bref, dans toutes les régions du Québec, des entreprises manufacturières sont des vecteurs de croissance et de développement, tant par leurs activités propres que par les emplois indirects qu’elles génèrent. Il faut saluer leurs investissements parce qu’ils expriment la confiance de ces entreprises en l’avenir et leur volonté de contribuer à la prospérité des régions où elles sont implantées. L’État doit agir comme partenaire en élaborant un «plan de match» afin que le Québec et ses régions aient un environnement d’affaires compétitif. C’est toute cette dynamique régionale qu’il faut appuyer.

Par Françoise Bertrand, O.C., C.Q.

Présidente-directrice générale

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)