30 mois d’emprisonnement réclamés pour Normand Boudreault

VICTORIAVILLE. Si le juge David Bouchard de la Cour du Québec entérine la suggestion proposée par la poursuite et la défense, Normand Boudreault de Bécancour prendra la direction du centre de détention pour une durée de 30 mois. Le magistrat annoncera sa décision à 14 h.

En avant-midi, jeudi, les procureurs ont exposé leurs arguments. Le procureur de la poursuite, Me Éric Thériault, a d’abord rappelé brièvement les faits entourant l’accident fatal de septembre 2012 survenu face au 198, route 261 à Maddington et qui a coûté la vie à Jean Thibault, un très grand ami de l’accusé qui aura 49 ans à la fin du mois.

Le jour des tragiques événements, a indiqué Me Thériault, les deux hommes ont consommé de l’alcool à différents endroits, notamment à Daveluyville.

Puis la sortie de route s’est produite sur le chemin du retour. Le véhicule s’est retrouvé dans le fossé. Normand Boudreault serait sorti du véhicule une vingtaine de minutes plus tard pendant que la victime s’y trouvait toujours, un bras coincé sous le véhicule.

«Même si une résidence se trouvait en face, l’accusé a pris la direction de son domicile, marchant 9,3 km pendant plus de trois heures. Quand tous sont revenus sur les lieux, M. Thibault était décédé, la tête dans l’eau. La noyade est la cause du décès», a précisé Me Thériault.

La défense ne conteste pas les faits, sauf un, a fait savoir Me Jean-Philippe Anctil, l’avocat de Normand Boudreault. «Même si ça ne change rien au fond de l’histoire, mon client tient à dire que la victime, qui était dépressive à la suite du décès de son père, a soudainement donné un coup de volant, ce qui a causé la sortie de route», a indiqué Me Anctil.

Mais ce qu’on reproche à Normand Boudreault, a expliqué la poursuite, c’est qu’à la suite de l’accident, il ait préféré se rendre chez lui plutôt que de solliciter de l’aide dans les nombreuses maisons qu’il a croisées sur son chemin, dont une résidence qui se trouvait en face du lieu de l’accident.

Les représentations

La négligence criminelle causant la mort, a souligné le représentant du ministère public, est passible d’un emprisonnement à perpétuité.

«La peine de 30 mois qu’on suggère est raisonnable, elle se situait au milieu de la fourchette des peines de 12 à 48 mois qu’on retrouve en semblable matière», a fait savoir Me Thériault.

«Comme citoyen, on a un devoir. Dans ce cas-ci, il n’a pas été rempli. Le besoin de dénonciation et de dissuasion doit être privilégié», a-t-il noté, tout en exposant, comme facteurs aggravants, le contexte de consommation d’alcool, les bris de conditions survenus par la suite, et la faible remise en question et la déresponsabilisation de l’accusé, selon le rapport présentenciel.

Comme facteurs atténuants, Me Thériault retient le plaidoyer de culpabilité. «Il reconnaît les faits. De plus, il a entrepris des démarches thérapeutiques à la suite d’une dépression. La suggestion proposée m’apparaît des plus raisonnables et se situe à mi-chemin entre la dénonciation et la réhabilitation», a-t-il fait valoir.

Les proches de la victime, par ailleurs, ne tenaient pas à assister aux procédures et n’entretiennent aucune rancœur envers Normand Boudreault. «La mère semble sereine et sincère, elle n’entretient pas de rancœur envers l’accusé qui entretenait une belle relation d’amitié avec la victime. Elle en est à un stade de pardon. Même chose pour son frère», a confié le procureur de la poursuite.

En défense, Me Anctil a, d’entrée de jeu, indiqué qu’il s’agissait «de la fin douloureuse des procédures», pour son client. «Ce n’est évidemment pas comparable à la douleur des proches de la victime qui était un très bon ami, a-t-il souligné. Il s’agit, ici, de faits particuliers. M. Boudreault a eu des problèmes physiques à la suite de l’accident et n’a pu retrouver son emploi de camionneur. Une dépression l’a amené à des démarches thérapeutiques. Depuis les événements, il est abstinent et n’a pas bu une goutte d’alcool.»

Aujourd’hui encore, selon son avocat, l’accusé démontre une fragilité émotive. «Il lui est difficile de parler de l’accident, de concevoir ce qui est survenu. Dans les circonstances, la peine suggérée est appropriée. Elle n’est pas déraisonnable», a conclu Me Anctil.