«HFD», le credo de l’architecte André Bourassa

VICTORIAVILLE. Architecte depuis une trentaine d’années, André Bourassa a attiré une trentaine de personnes avec sa conférence commandée par la Ville de Victoriaville. Son auditoire était curieux d’en savoir davantage sur le lien à faire entre l’architecture, les humains, l’environnement.

Dans la salle de généalogie de l’édifice Alcide-Fleury il y avait des gens fanas de M. Bourassa qui connaissent son ton coloré et animé et surtout son parcours orienté vers la construction écologique et durable. Il y en avait aussi pour qui il est un inconnu et qui s’attendaient à ce qu’il parle du centre-ville de Victoriaville, de sa revitalisation.

D’emblée, il a prévenu ces derniers que là n’était pas son propos.

Il a fait l’éloge des bons coups de Victoriaville avec son programme Victoriaville Habitation Durable, auquel il a contribué. Il en a parlé comme d’un programme «perfectible», mais qui avait l’immense mérite d’être géré à partir de Victoriaville… plutôt que depuis Washington, comme la certification LEED. «La certification LEED s’appuie sur de très bons principes, mais elle est devenue la bébelle de l’industrie américaine.» Quant à NovoClimat, il en espère une réforme, qui ne viendra probablement pas.

Il a aussi donné un coup de chapeau à la Ville de Victoriaville pour son Écoparc industriel, même pour ses efforts de densification de son autre parc industriel.

Vitrine des matériaux écolos

Toujours concernant Victoriaville, il a dit que s’il «s’appelait ville du développement durable», il lui importerait de créer une vitrine de matériaux de construction écologiques comme il en existe en Europe.

Il a d’ailleurs profité de l’occasion pour annoncer que les 5, 6 et 7 octobre prochain, se tiendrait, à Asbestos, un colloque France-Québec sur les écomatériaux et biosourcés. Des conférenciers de renom devraient y présenter les résultats de leurs recherches et des projets de construction.

Un credo, le HFD

S’il devait résumer sa conférence en trois lettres, l’ex-président de l’Ordre des architectes du Québec (il l’a été pendant huit ans), André Bourassa dirait «HFD». Trois lettres pour désigner l’harmonie, la fonctionnalité, la durabilité, qualités devant être prises en compte lorsqu’il s’agit de s’élancer dans l’aventure d’une construction. Il ne les a d’ailleurs pas inventées, Vitruve les évoquait dans les dix volumes de son traité d’architecture en 1547!

Il a donné l’exemple de la maison de l’OSM à Montréal pour lequel la ministre Monique Jérôme-Forget n’avait privilégié qu’un critère, l’acoustique. Il a rapporté ce qu’un ingénieur lui avait raconté sur la maison qu’il venait de se construire. Tout était bien… mais «elle est laide», a admis l’ingénieur.

André Bourassa a parlé de l’équilibre à maintenir entre les H, F et D. Il a eu à «arbitrer» plusieurs chicanes de couple, un conjoint étant F, l’autre étant davantage D.

Avant de se lancer dans un projet de construction, il faut se poser plusieurs questions, a-t-il poursuivi. Est-on de style néorustique, contemporain, sobre, Feng Shui? Connaît-on son site? De quel budget, de quelles ressources on dispose? Est-on patient? Est-on ville ou campagne? Veut-on réduire son empreinte sur l’environnement?

Parlant des humains, de l’indéniable problème d’hypersensibilité environnementale, des maisons écologiques… et de celles qui ne le sont pas, M. Bourassa s’est montré très critique à l’égard de certaines tendances, comme les toitures végétalisées, concept qu’il conseille de ranger dans la «filière 13». «Imaginez ce qu’il en coûte pour faire les cheveux d’une maison!»

Il a également dénoncé la démesure de cette tendance à la vitrification des maisons et des édifices. «Tout ce qu’il faudra ensuite dépenser en chauffage et en climatisation!»

En entrevue après la conférence, il a raconté que pour la piscine Édouard-Dubord de Victoriaville, ayant participé à la sélection de l’entrepreneur, le comité avait demandé qu’on réduise de moitié le vitrage proposé par le gagnant. «Trop de vitrage aurait nécessité deux fois plus de surveillance de la piscine pour les reflets que cela aurait créé sur l’eau. C’est un tic d’architecture que de multiplier les fenêtres alors qu’elles devraient être un privilège. À quoi sert de vitrer un escalier?»

Ayant pendant 15 ans donné des conférences sur la qualité de l’air pour la SCHL et en offrant sur le bois pour l’Université du Québec à Chicoutimi, André Bourassa a aussi parlé de contaminants et des matériaux plus écologiques comme le béton chanvré, les blocs de terre, la paille, les copeaux de bois, la laine de roche. Et de ces nouveaux matériaux qui devraient chasser le polystyrène de nos murs alors qu’il disparaît progressivement des emballages. Des alternatives commencent à s’offrir sur le marché pour isoler les murs d’une maison que l’on veut performante et perspirante.

Et il a répondu à celui qui lui demandait si la maison 2015 devait avoir un sous-sol qu’il n’y avait pas de «recette» en cette matière. C’est un investissement, a-t-il dit, qu’il faut, de surcroît, savoir gérer. Il a expliqué comment un sous-sol pouvait constituer un risque pour la santé humaine si on n’y prenait pas garde.