Rivière Nicolet : beaucoup a été fait… beaucoup reste à faire

WARWICK. Et si, après dix ans d’existence, on demandait à COPERNIC comment va la rivière Nicolet? À cela, Karine Dauphin, directrice générale de l’organisme, répondrait que beaucoup d’actions ont été posées, mais que beaucoup reste à faire. Et puis, ajoute-t-elle, il faut savoir que les gestes que l’on pose aujourd’hui n’ont pas un effet immédiat sur la qualité de l’eau de la rivière. «Parce que la pollution y est diffuse (pesticides, azote, phosphore, coliformes fécaux), il faudra compter une bonne soixantaine d’années avant que nos actions aient un impact sur l’eau.»

À Warwick, devant une vingtaine de participants et juste avant la tenue de l’assemblée générale de COPERNIC (organisme de concertation pour l’eau des bassins versants de la rivière Nicolet) présidé par Caroll McDuff, Mme Dauphin a dressé le bilan du premier Plan directeur de l’eau (PDE) adopté dans la foulée de la Loi adoptée en 2009.

Le PDE, a-t-elle expliqué, d’entrée de jeu, a été confectionné à la suite d’un portrait diagnostic de la rivière Nicolet et de ses tributaires et accepté à la suite d’une consultation publique.

Elle a rappelé que le PDE recensait 61 actions à poser (64% ont été réalisées, 18% sont en cours) pour améliorer le sort de la Nicolet, la qualité et la quantité de ses eaux.

L’importance des milieux humides

On y avait répertorié des problèmes majeurs d’érosion des berges, de glissements de terrain, d’érosion des sols, de sédimentation, d’inondations, d’eutrophisation et de pollution par des coliformes fécaux et des pesticides.

La protection des milieux humides constituait et constitue encore un enjeu majeur qui figurera au PDE de deuxième génération pour lequel COPERNIC attend toujours le feu vert du gouvernement du Québec. Sept ministères devaient y apposer leur sceau.

Au sujet des milieux humides pour lequel on devrait bientôt disposer d’un inventaire complet, Mme Dauphin a expliqué qu’on comprenait mieux aujourd’hui leur rôle indispensable d’éponge, prévenant les inondations lors de crues, rejetant leur eau en période de sécheresse. D’ici 2020, on se propose de restaurer les fonctionnalités de 20% de ces milieux humides (on serait à 6% actuellement).

D’ailleurs, elle a expliqué le nouveau concept de «dynamique fluviale». Par nature, un cours d’eau méandre et divague. Auparavant, on cherchait à redresser le lit des rivières, a-t-elle expliqué. Aujourd’hui, il faut penser autrement et la «gestion doit se faire de l’amont à l’aval, pas seulement sur une section». Elle a ajouté qu’il faudra aussi composer avec des pluies plus abondantes et que sur 100 kilomètres, une rivière avait besoin d’un espace de «liberté» d’un kilomètre.

Manque de financement

Si COPERNIC existe depuis dix ans, le gouvernement du Québec ne lui a vraiment confié un mandat de protection qu’en 2009 avec sa «Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection».

Sans réclamer plus de pouvoirs réglementaires, la directrice générale de COPERNIC dit toutefois qu’il a fallu définir le mandat que le gouvernement lui avait tracé «en deux lignes». «Et composer avec un manque de financement», précise-t-elle.

Ce problème de financement, le président l’a aussi abordé dans son bilan, disant qu’il s’agissait d’une incohérence politique. Il a fait allusion aux modèles ontarien et français où le support financier est de 20 à 30% supérieur. Il précise toutefois que le milieu régional contribue aussi pour une part importante dans les projets de gestion de l’eau.

Karine Dauphin donne l’exemple des stations d’échantillonnage. «On a travaillé fort pour ajouter deux autres stations aux cinq que l’on avait. On peut y faire des analyses pour les coliformes, le phosphore et l’azote, pour les matières en suspension et pour la turbidité. Mais pas pour les pesticides, cela coûterait trop cher.» Et il faudrait multiplier les analyses pour effectuer des suivis plus rigoureux de la qualité de l’eau.

La géomorphologue de formation dit encore que l’amélioration du sort de la Nicolet passe par la sensibilisation et la mobilisation. «On a eu à promouvoir le modèle de gestion intégrée. Et c’est d’autant plus ardu que c’est du scientifique.»

Karine Dauphin poursuit en disant qu’il faudra davantage agir sur la Nicolet pour prévenir les problèmes plutôt que de seulement réagir quand elle déborde.