Ça fait 100 ans

Le vendredi 24 avril 2015 marquera le 100e anniversaire du génocide arménien. Les historiens affirment que plus de 1,5 million d’Arméniens ont été exterminés par les Jeunes-turcs.

Parmi ces personnes assassinées, à Mardin en Turquie, mes grands-parents paternels, Malcolm Besmargian et son épouse. Forcé à l’exil vers la Syrie, mon père Joseph, fils unique, alors âgé de 8 ans, a survécu on ne sait trop dans quelles conditions au génocide. Tout comme sa grand-mère avec qui il marchait côte à côte dans le défilé des déportés. Cette dernière devait cependant s’effondrer sur la route aux côtés de son petit-fils. Joseph devenait ainsi seul dans ce monde hostile, et ce, sans aucun soutien.

La lecture d’une série d’articles, étalés sur trois jours dans le quotidien La Presse, au début du mois, m’a appris un certain nombre de choses sur le massacre arménien. Je veux préciser que le mot génocide relié à la mort des parents de mon père était pour ainsi dire tabou dans la famille. Il ignorait les questions qui lui étaient posées. Avait-il été témoin de leur assassinat? On l’ignore. Quant au détail entourant le décès de sa grand-mère, il nous a été confié par Marie Besmargian, cousine germaine de Joseph et fille de Grégoire, établi à Asbestos déjà depuis quelques années à l’époque.

Comme par hasard, la journaliste derrière les articles de La Presse, Rima Elkouri, au début du mois, s’est rendue à Mardin, à la recherche d’informations sur son grand-père Naïm, né aussi dans cette ville, survivant du génocide, et déporté vers la Syrie. Je le rappelle, c’est aussi à Mardin où ont vécu mes ancêtres. Mon grand-père aurait été très impliqué dans la hiérarchie catholique de son milieu.

Grâce à l’initiative de son oncle Grégoire, des connaissances de celui-ci en Syrie et à la collaboration de la Croix-Rouge, croit-on, mon père a été retrouvé en 1924. Il avait 17 ans. Quelque temps plus tard, il débarquait à Halifax par bateau. À son arrivée au Canada, il ne parlait ni français, ni anglais. Au fil du temps, aux côtés de ses cousins et cousines, et à l’école, à Asbestos, il a réussi à se familiariser avec la langue de Molière.

Après 15 ans en terre québécoise, en 1939 pour être précis, il épouse, à l’âge de 33 ans, une Warwickoise de souche, Rosa Labelle. De cette union sont nés trois filles et quatre garçons toujours très fiers de leur origine arménienne et qui n’ont jamais connu leurs grands-parents paternels. Pas plus d’ailleurs que ceux du côté maternel.

Gilles Besmargian

Victoriaville