Entre liberté et répression, Bellavance craint une rupture

VICTORIAVILLE. Si, en aucun moment, le député André Bellavance n’a craint pour sa sécurité, confiné durant un peu plus de douze heures dans son bureau d’Ottawa mercredi, les lendemains sont plus inquiétants. «Malgré le très bon discours de Stephen Harper, j’ai peur que les conservateurs profitent du moment pour adopter d’autres lois qui risquent de brimer les libertés individuelles.»

Le député de Richmond-Arthabaska souligne qu’il n’a pas encore de «critique» à faire, mais il dit qu’il faut rester vigilant quant aux mesures de sécurité qui, inévitablement, seront resserrées.

«Je n’ai pas encore de critique à faire. Mais je pense qu’il faudra du recul et du doigté avant d’adopter de nouvelles mesures. Il y a un fragile équilibre à tenir entre les libertés individuelles et la sécurité de la population. Existe déjà une loi antiterroriste qui donne des pouvoirs aux forces policières. Avant d’en adopter d’autres, il faudra examiner si celle-là présente des lacunes qu’on pourrait corriger.»

Par exemple, le député indépendant dénonce toujours les «arrestations arbitraires» comme celles survenues lors de la manifestation à Toronto.

Par ailleurs, M. Bellavance dit qu’il faudra poser des questions, se demander pourquoi on n’avait pas procédé, auparavant, à l’arrestation du présumé assassin du caporal Nathan Cirillo. «On lui a enlevé son passeport parce qu’on considérait qu’il était un danger pour l’étranger! Et ici? Peut-être n’avait-on pas de raison de l’arrêter ici. Je ne veux pas porter de jugement, mais je pense que c’est une question qu’on est en droit de se poser.»

Le député de Richmond-Arthabaska tenait à se rendre à la Chambre des communes au lendemain de l’attentat, répétant qu’il fallait démontrer que les actes de violence ne doivent pas altérer les convictions des parlementaires. «J’étais fier de me présenter au Parlement ce matin.»

Déjà, toutefois, il était plus difficile d’accéder à la colline parlementaire, une seule voie d’accès avait été aménagée, obligeant chaque personne à montrer sa carte. Et les lieux n’étaient pas accessibles aux visiteurs.

Le député a décrit l’atmosphère à la Chambre en disant qu’on sentait encore de la tension dans l’air, mais que, entre députés, des liens d’amitié, tout au moins de grand respect, s’étaient noués. «Les députés se faisaient l’accolade; on sentait que tout le monde était sur la même longueur d’onde, solidaires.»

La cérémonie au cours de laquelle, par une ovation, on a rendu hommage au sergent d’armes Kevin Vickers – qui a abattu le tireur – a constitué un moment très émotif, dit encore le député Bellavance. «Beaucoup avaient les larmes aux yeux en le remerciant.»

M. Bellavance dit qu’il ne connaissait pas le jeune caporal Cirillo. Il connaissait toutefois de vue l’agent de sécurité blessé lors des événements de mercredi.

Le député a pu sortir de son bureau vers 20 h 30 le soir de l’attentat. Contrairement à d’autres et malgré le confinement, il pouvait tout de même se rendre à la salle de toilettes ou à la cafétéria les deux étant situées à proximité de son bureau.

Il n’a pu sortir du Parlement par le chemin habituel et, heureusement pour lui, a pu récupérer son véhicule et s’est dirigé vers Gatineau, le centre-ville d’Ottawa étant complètement fermé. «Il y avait des policiers partout!»

Comme la veille, le député déplore cet attentat, cette «attaque au cœur de la démocratie».