«Le Carré 150» s’attire des huées

VICTORIAVILLE. «Affreux», «froid», «laid», «poche», «laboratoire», «cartésien», «carré rouge», «carré aux dattes (ou aux dates)», «pas assez organique», «rien de moins artistique qu’un carré», «sales chiffres en place de belles lettres», «ça sonne trop Montréal», «10/30», «centre commercial». La liste est longue des réactions indignées qu’a suscitées l’annonce du nom du futur lieu de diffusion culturelle de Victoriaville Le Carré 150.

Le concert de critiques se joue ces dernières heures surtout sur Facebook depuis que la nouvelle est sortie mardi soir.

Si le nom se voulait «rassembleur», il l’est surtout, ces heures-ci, pour grouper les opposants, tous ces gens qui auraient souhaité que le nom évoque l’histoire de l’emplacement, le cinéma Laurier, l’opérateur Robert Carrier, Victoriaville tout au moins. Certains souhaiteraient que la décision soit révisée et invite à porter le «carré rouge» pour protester.

D’habitude réservé, même l’auteur jeunesse, Alain M. Bergeron, a donné publiquement son opinion, disant que le nom choisi éclipsait la mission du futur complexe culturel. Un nom doit dire quelque chose, évoquer une personne, une mission, une raison, ce que ne fait pas «Le Carré 150», écrit-il. Fidèle à lui-même, il pimente son propos d’une note d’humour en disant que ce nom-là ne passe pas… qu’il ne tourne pas rond. S’ensuivent les commentaires d’une trentaine de personnes pour appuyer ses arguments.

Dans une autre page FB, le journaliste Yanick Poisson critique la manière de faire de Diffusion Momentum. Il s’en prend au fait que la démarche pour trouver le nom et l’identité visuelle a coûté 30 000 $. Certains soutiennent qu’un concours populaire aurait coûté moins cher et aurait donné de meilleurs résultats.

«On s’y attendait!»

«On s’attendait à ces réactions et critiques», affirme Kateline Grondin, responsable des communications et de la mise en marché chez Diffusion Momentum, ce projet d’envergure soulevant toujours les passions, dit-elle. D’autant qu’il y avait un véritable attachement de la population à l’égard du cinéma Laurier. «On s’était aussi indigné du nom de la Grande Place des Bois-Francs», rappelle-t-elle.

Elle souligne que Diffusion Momentum voulait «aller de l’avant» avec la construction d’un nouvel espace culturel, lui donnant un «nom actuel, facile à prononcer, qui passera le temps».

Elle dit que l’annonce provoque des remous, mais que la poussière va retomber et que, lorsque les gens entreront dans le complexe, l’«expérience grandiose qu’ils y vivront» reléguera leur déception quant au nom. Et puis, ajoute-t-elle, les gens ont le droit de s’exprimer.

Mme Grondin souligne que les références historiques au cinéma Laurier et à Robert Carrier auront une place à l’intérieur du complexe. «Mais, il était clair que pour le nom de l’édifice, on ne voulait pas utiliser le mot Laurier, un nom surutilisé, galvaudé.» Et on ne voulait pas accoler le nom d’une personne au futur lieu de diffusion culturelle, comme on se refusait à une désignation commerciale. D’ailleurs, et le maire Rayes le rappelle sur son compte Facebook, la Ville ne donne à un lieu, un bâtiment, une rue que le nom de gens disparus. Elle a fait une entorse à sa politique en donnant, de son vivant, le nom de Robert Caron à l’édifice municipal de la rue De Bigarré, ce bâtiment ayant abrité la compagnie (Vic Métal) de M. Caron.

Il n’était pas question d’organiser un concours populaire, répond Kateline Grondin. «On se serait retrouvé avec toutes sortes de noms incroyables ou encore avec les mêmes propositions tournant autour de Robert Carrier et le Laurier. On voulait être appuyé par une firme professionnelle de communications, Orange Tango ayant travaillé avec d’importantes institutions comme l’Opéra de Montréal, le Musée des Beaux-Arts, la Tohu, le Cirque du Soleil.»

Sur la question des 30 000 $, Kateline Grondin précise que c’est le coût de la démarche pour trouver le nom et l’identité visuelle et que l’argent provient des revenus d’exploitation de Diffusion Momentum. «Diffusion Momentum est un organisme à but non lucratif qui s’autofinance à 85% à même ses revenus. Son budget est de 1,6 million $. Tout cela pour dire que les 30 000 $ ne proviennent même pas des fonds publics dédiés à la construction.»

Kateline Grondin dit que, finalement, les détracteurs du nom ne sont pas si nombreux compte tenu de la taille de la population que desservira Le Carré 150. Elle invite d’ailleurs les gens d’accord avec le nom – et il y en a, ici comme à l’extérieur de Victoriaville, signale-t-elle – à témoigner leur appréciation. Ils sont peu nombreux à le faire jusqu’ici.

Et, non, le processus n’est pas réversible. «Ça fait des mois qu’on y adhère. Nous n’avons pas travaillé seuls et l’appellation a été approuvée par le conseil d’administration de Diffusion Momentum et par le conseil municipal de Victoriaville. Donnons-nous le temps de s’adapter !», conclut Mme Grondin.