Libre arbitre?

Pour faire suite à la «une» et à l’article paru dans La Nouvelle Union du 27 juillet 2014, pour moi, l’insalubrité, telle que décrite, s’inscrit comme la conséquence grave d’un problème beaucoup plus profond et c’est ce problème qui tue.

Quand on m’a décrit, l’année dernière, l’état des lieux dans lesquels Marjo a vécu, cette description semblait relever de la fiction; on m’a alors montré quelques photos. Et pourtant j’étais intervenue à deux reprises – et peut-être trois – avec une amie, entre 1993 et 1997, pour nettoyer la maison. C’était loin de ressembler à ce que les photos laissent voir.

Je n’avais pas revu Marjo depuis 1998 ou 1999. Nous avons eu quelques conversations téléphoniques depuis ce moment jusqu’en janvier 2013.

Justement, lors d’une de ces conversations, sans doute au début ou au milieu des années 2000, il m’a semblé évident qu’elle n’allait pas bien et se dirigeait vers pire que ce que j’avais déjà vu. Je lui suggère alors fortement de demander de l’aide professionnelle. Elle m’a dit qu’elle était suivie par une travailleuse sociale. Je téléphone donc au CLSC et parle à la spécialiste à qui je fais part de mes appréhensions et lui demande d’intervenir. Elle me répond que la personne en cause doit elle-même faire la démarche, que c’est une question de «libre arbitre».

J’ai fortement réagi en mentionnant qu’on récupérait les animaux blessés ou maltraités pour les diriger vers la SPA ou un autre refuge où on en prendrait soin. La dame a alors rétorqué que les animaux ne raisonnaient pas, eux. Elle m’a aussi dit que je ne pouvais pas porter plainte n’étant pas de la famille ou une voisine (il paraît que la loi a changé depuis). J’ai répliqué que je ne portais pas plainte, que je demandais de l’aide pour elle. La notion de «libre arbitre» a refait surface.

Mon questionnement : une personne qui est en détresse psychologique – ou mentale – a-t-elle la capacité de raisonner sur sa situation?…

Quand on loge un appel au 9-1-1 ou ailleurs pour demander de l’aide parce qu’une personne a une blessure ou un malaise physique, nous obtenons de l’assistance, personne ne nous laisse entendre que c’est à l’autre de faire la démarche. (Même que nous pouvions, jadis, être sanctionnés pour non-assistance à personne en danger; est-ce encore le cas aujourd’hui?). Pourquoi lorsque j’ai appelé à l’aide pour une personne qui – de toute évidence – semblait éprouver un problème d’ordre psychologique ou mental était-il alors question de «libre arbitre»?

C’est cette notion que je remets en cause ici; je le répète, une personne aux prises avec un tel problème a-t-elle la capacité de «raisonner» sur sa situation ou n’a-t-elle pas, pour en arriver là, perdu tous ses moyens?

Cette notion de «libre arbitre» existe-t-elle encore aujourd’hui?… J’espère que oui, mais qu’on en a revu les limites.

 

Christiane Duchemin

Victoriaville