Cette culpabilité qui ruine les relations interpersonnelles

VICTORIAVILLE. Il y a des gens qui, malades, se sentent coupables d’être un fardeau pour leurs proches. Et ces derniers vivent aussi de la culpabilité, celle de n’en faire jamais assez. «Et ils se sentent même coupables d’être en santé. On appelle cela la culpabilité du survivant», explique la psychologue Rose-Marie Charest.

C’est de cela dont elle parlera le mercredi 3 juin, à la Place 4213, à 19 heures, invitée par le Comité des usagers du CSSS d’Arthabaska-et-de-L’Érable.

Elle parlera de culpabilité, de responsabilité, d’engagement, de relations interpersonnelles et de la peur de devenir égoïste, la crainte numéro 1 des Québécois, affirme-t-elle.

L’ex-présidente de l’Ordre des psychologues du Québec (elle a quitté ses fonctions le 22 mai), en sera à sa deuxième visite à Victoriaville. Il y a tout juste 10 ans (en novembre 2015), elle avait traité de bonheur, invitée par le CSSSAE.

En entrevue au téléphone, elle soutient que sa conférence se module au mandat que lui a confié le Comité des usagers ainsi qu’à l’auditoire qu’il peut s’attirer. «Souvent, les comités d’usagers se composent de personnes proches de gens malades.»

Reste que son propos devrait s’attirer un plus large public, la culpabilité étreignant beaucoup plus que les cœurs des proches aidants. «C’est malheureux la culpabilité, parce qu’on a tendance à vouloir fuir ce qui nous rend coupable.»

Pourtant, dit-elle, il est prouvé que l’engagement envers ses proches, dans le bénévolat, dans son travail, rend heureux.

Il comporte toutefois des pièges, poursuit-elle. «Comme l’obligation de performance. L’échec d’un enfant deviendra l’échec du parent. Le proche qui réclame des soins pour la personne malade vivra aussi un sentiment d’échec.»

Comment faire en sorte que sa responsabilité ne dégénère pas en culpabilité? Comment conserver un équilibre? Certains ne sauront pas tracer la limite, craignant qu’en donnant du lest à l’engagement, ils deviennent égoïstes. Ceux-là risquent de craquer, explique encore la psychologue. «L’égoïsme, c’est de ne penser qu’à soi, c’est une souffrance. Or, c’est naturel pour l’humain d’aller vers les autres. Les gens qui sont bien avec eux-mêmes favorisent le bien-être des autres. Être empathique, c’est avoir la capacité de se mettre à la place de l’autre, mais aussi de savoir revenir à sa place.»

Rose-Marie Charest, plusieurs la connaissent pour les nombreuses entrevues et chroniques qu’elle a livrées à la radio et à la télévision. D’ailleurs, un recueil réunit ses chroniques de l’émission C’est bien meilleur le matin à Radio-Canada sous le titre @Ri>Avec psychologie (Libre Expression).

Pendant 17 ans, elle a présidé l’Ordre des psychologues, fonction qu’elle a délaissée il y a quelques jours et qui la délivrera des responsabilités inhérentes à la présidence et, d’une certaine manière, du mandat de parler au nom des membres de la corporation. «Je pourrai parler en mon nom personnel.»

Elle veut se consacrer aux communications, animer et participer à des colloques, prononcer des conférences, accorder des entrevues dans les médias.

L’a ravie, ce titre «La psychologue qui parle au monde» coiffant un portrait d’elle paru dans la revue des diplômés de l’Université de Montréal. «Mon rôle n’est pas de montrer ce que je sais.»

Lorsqu’elle est appelée à donner son point de vue à la suite d’une tragédie, elle pense à tous ces gens qui, seuls dans leur maison, sont exposés au flot de drames que les médias leur présentent en continu.

Ayant déjà publié La dynamique amoureuse : entre désirs et peurs (Bayard) et co-écrit Oser le couple avec Jean-Claude Kaufmann (Bayard), Mme Charest a entrepris la rédaction d’un nouvel ouvrage qu’elle pourrait publier au début de l’année 2016 aux Éditions La Presse.

Elle y abordera le thème du pouvoir… de tous les pouvoirs. Ceux que procure l’argent, la politique ou le statut social. «Je parlerai assurément de la peur de prendre le pouvoir et de la relation que les femmes, même celles bourrées de talents, entretiennent avec le pouvoir.»

Elle documentera son ouvrage en réalisant des interviews. Avançant l’idée d’en mener une avec Pierre Karl Péladeau, elle répond qu’elle n’y avait pas songé, ajoute qu’il s’agit d’une bonne suggestion. «Mais je ne suis pas certaine qu’il accepterait!»