Mylène Paquette raconte son aventure à des élèves très attentifs

VICTORIAVILLE. La centaine d’élèves de cinquième secondaire de l’École secondaire Le tandem ont écouté avec grand intérêt, mardi matin, la navigatrice Mylène Paquette, la première personne des Amériques à franchir à la rame, d’ouest en est, l’océan Atlantique Nord.

La venue de la célèbre navigatrice, on la doit à Pascal Couture, un enseignant d’espagnol. «On tenait à sensibiliser les jeunes à l’importance de poursuivre leurs rêves et de surmonter les difficultés», a-t-il souligné.

Pendant plus d’une heure, supportée par des séquences vidéo et quelques photos, Mylène Paquette a partagé son expérience avec son jeune auditoire.

Préposée aux bénéficiaires à l’hôpital Sainte-Justine de Montréal, Mylène Paquette a découvert sa passion pour le nautisme au cours d’une fin de semaine de voile au Lac Champlain avec sa sœur.

Puis c’est en consultant Internet, un bon jour, que s’installe dans son esprit son projet de traverser l’océan à la rame.

Mylène s’inspirera d’une adolescente décédée du cancer et qu’elle a côtoyée à l’hôpital. «Elle m’a bouleversée et fait beaucoup réfléchir. Les peurs sont légitimes. Moi, j’ai peur de l’eau. Mais on n’a pas le droit de laisser la peur nous immobiliser. On n’a pas le droit de ne pas réaliser nos rêves à cause de la peur. Je me suis dit que j’allais affronter ma peur de l’eau», a-t-elle confié aux élèves.

La préparation

Pareille épopée requiert toute une préparation! Celle-ci a duré cinq ans, 1850 jours. «Sur l’océan, malgré les moments difficiles, je n’ai songé qu’une fois à abandonner, parce que je vivais mon rêve. Sur l’océan, j’ai vécu les plus beaux moments de ma vie. Par contre, la longue préparation n’a pas toujours été facile», a indiqué l’aventurière de 36 ans.

Alors que d’autres individus auraient pu se poser mille et une question avant d’entreprendre un tel périple, Mylène, elle, n’avait que deux questions en tête : le coût de l’aventure et dans combien elle réaliserait son exploit.

«Si j’avais su qu’il m’en coûterait 250 000 $ et que cela nécessitait cinq ans de préparation, jamais je ne me serais lancée dans l’aventure», a-t-elle confié. «Mais c’est bon, parfois, d’être naïf, a-t-elle renchéri, de toujours croire à nos rêves et de ne jamais se laisser décourager par l’extérieur.»

Avant son périple en solitaire, Mylène Paquette, en guise de préparation, a réalisé une traversée de l’Atlantique Sud avec cinq autres rameurs au début de l’année 2010. «J’y ai découvert, à ce moment, une motivation incroyable. Cette motivation, ce fut la quantité incroyable de déchets dans l’océan, a-t-elle observé. Cette quantité m’a vraiment bouleversée. Et je me suis trouvée une mission, me disant que j’allais faire des communications en environnement, que j’allais écrire un livre pour dire à quel point la mer est belle et de son incroyable écosystème.»

Pas étonnant, donc, de la voir devenir, en 2011, ambassadrice pour la Fondation David Suzuki au Québec.

Un mentor

Mylène Paquette a choisi comme nom «Le Hermel» pour désigner son bateau qui lui a permis, entre le 6 juillet et le 12 novembre 2013, de franchir les 5000 km séparant Halifax en Nouvelle-Écosse et Lorient en France.

«Hermel Lavoie, c’est mon mentor devenu mon meilleur ami. Il a rendu mon bateau fin prêt pour la traversée, y consacrant plus de 3000 heures de bénévolat. Il a cru plus en moi que moi-même. Hermel, c’est celui pour qui j’avais le goût de réussir», a mentionné la navigatrice.

Des moments difficiles

Le début de la grande aventure n’aura pas été de tout repos. Après le mal de mer des quatre premiers jours, Mylène affronte des conditions difficiles. «Sur les 45 premiers jours, je n’ai pu passer que 9 jours à ramer. J’ai dû passer 36 jours à attendre les conditions adéquates. Après 3 ou 4 jours, je pestais», a-t-elle exprimé, avouant son découragement.

Son équipe au sol, toutefois, l’a convaincu à poursuivre sa route, en l’assurant qu’elle avait tout pour réussir.

Sans compter tous les internautes qui lui ont expédié des messages d’encouragement. «Les deux mots les plus fréquents qui revenaient, c’était: lâche pas», a-t-elle signalé.

Finalement, Mylène a compris le sens de ces mots. «Ne pas lâcher signifie tenir quelque chose, avoir le contrôle sur quelque chose. Ainsi, la seule chose sur moi sur laquelle je peux exercer un contrôle, c’est mon attitude, celle que je choisis face aux événements. Il faut cesser d’angoisser, a-t-elle constaté, arrêter d’anticiper des événements négatifs et demeurer positif.»

Et c’est, a-t-elle dit, ce qu’elle souhaite que les jeunes retiennent. «Se rappeler qu’on a juste du contrôle sur notre attitude et que les pires choses qu’on peut vivre peuvent nous amener les plus belles», a-t-elle soutenu, en relatant son expérience de l’ouragan Humberto.

La violente tempête a fait des ravages. Il ne lui restait plus qu’un appareil de communication. Son équipe a fait appel au prestigieux navire de croisière, le Queen Mary 2, pour qu’on lui achemine un nouveau téléphone satellite. «Humberto m’a apeurée, m’a fait chavirer trois fois, mais l’ouragan m’a aussi apporté la chose la plus grandiose de ma traversée, a-t-elle fait remarqué. J’ai rencontré, en plein milieu de l’océan, les 3500 passagers du navire. Trop souvent, on se concentre sur ce que les éléments nous enlèvent.»

Affronter ses peurs

Mylène Paquette a dû faire face à sa peur de l’eau, sa peur des requins. Il lui fallait bien plonger dans l’océan pour nettoyer la coque de son bateau et enlever les anatifes qui ralentissaient considérablement sa vitesse. «C’était mon plus gros défi, a-t-elle avoué. Mais avec l’aide d’une psychologue et de la visualisation, j’ai combattu ma peur de l’eau, j’y ai fait face. C’est ce qui m’a rendu le plus fier.»

Oui, elle a croisé quelques requins sur son chemin. Mais ceux-ci n’ont pas été menaçants. «Les baleines bleues, cependant, étaient impressionnantes, intimidantes. Mais le mammifère le plus dangereux se trouvait dans le bateau», a-t-elle souligné, expliquant avoir pris certains risques, commis certaines erreurs et pris de mauvaises décisions. «Il ne faut jamais baisser la garde et tenir les choses pour acquis», a-t-elle réalisé.

L’importance de partager

Convaincue de l’importance de repousser ses limites et ses peurs, Mylène Paquette raconte son exploit. «Je trouve important de transmettre ces valeurs aux jeunes qui rencontreront des difficultés pour qu’ils s’en inspirent pour surmonter des défis qu’ils auront à relever», a-t-elle dit.

La navigatrice mijote d’autres projets en navigation, mais du côté de la voile. «J’ai compris que ça allait plus vite.»

Mais elle continuera à témoigner de son expérience. «Nous travaillons sur un projet de documentaire scénique, non pas sous forme de conférence, mais plutôt d’immersion graphique et sonore. Les gens vivront les émotions comme s’ils étaient dans le Hermel, ils vivront l’aventure comme s’ils se trouvaient dans le bateau avec moi. On entre dans l’histoire comme on le fait dans le livre que j’ai écrit (Dépasser l’horizon aux éditions La Presse)», a-t-elle expliqué.

Cette présentation doit prendre son envol en novembre à Montréal pour ensuite effectuer une tournée au Québec. Un arrêt à Victoriaville est prévu.